Électricité : les échanges reprennent dans l’ARENH

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Nucléaire ARENH

Les fournisseurs alternatifs peuvent bénéficier avec le dispositif ARENH de l’amortissement du parc nucléaire français. Ici, la centrale de Nogent-sur-Seine. (©EDF-Didier Marc)

La Commission de régulation de l’énergie (CRE) a annoncé le 1er décembre une remontée des demandes d’électricité pour le premier semestre 2017 dans le cadre du dispositif ARENH. Rappels sur ce mécanisme clé de l’ouverture à la concurrence.

Un dispositif censé favoriser l’ouverture à la concurrence…

Depuis juillet 2007, tous les consommateurs d’électricité en France sont libres de choisir le fournisseur de leur choix. Pour favoriser l’ouverture à la concurrence comme l’exigeait l’Union européenne, la France a adopté en novembre 2010 la loi « Nome » (Nouvelle organisation du marché de l’électricité) qui a imposé à EDF de céder jusqu’à un quart de sa production nucléaire à la concurrence à un tarif défini par arrêté dit ARENH (Accès Régulé à l’Electricité Nucléaire Historique).

Ce dispositif permet ainsi depuis juillet 2011 aux fournisseurs alternatifs de racheter une partie de la production électrique nucléaire d’EDF à un prix «  coûtant » régulé (intégrant notamment les coûts d’exploitation et de nouveaux investissements de maintenance)(1). Les nouveaux entrants doivent en faire la demande auprès de la CRE(2).

Après de longs débats, le tarif ARENH a été fixé à 40 euros par mégawattheure (MWh) pour la période du 1er juillet au 31 décembre 2011 et est resté depuis lors à un niveau de 42 euros par MWh. Le code de l’énergie prévoit que la demande totale d’électricité des fournisseurs dans le cadre de l’ARENH ne peut pas excéder(3) 100 TWh par an (hors fourniture au titre de pertes par les gestionnaires de réseaux)(4). Pour rappel, le parc nucléaire français a généré 416,8 TWh en 2015, soit 76,3% de la production électrique cette année-là.

…Délaissé ces dernières années par la concurrence

Les volumes demandés par les fournisseurs alternatifs dans le cadre de l’ARENH n’ont jamais atteint 100 TWh par an au cours des dernières années. En 2014 et 2015, ces demandes s’étaient limitées respectivement à 71,5 TWh et 16,1 TWh. La CRE, qui est responsable des échanges réalisés dans le cadre de l’ARENH, rappelle même qu’aucun volume d’électricité n’avait été demandé dans le cadre de l’ARENH en 2016. En cause, les prix sur les marchés de gros, parfois inférieurs au tarif ARENH, voire « négatifs » lors de certaines périodes.

L’injection croissante d’électricité issue de sources intermittentes (éolien et photovoltaïque), rémunérée hors marché à un prix garanti, a en effet eu tendance à faire chuter les prix de gros. Sur les marchés de gros, les prix spot « day-ahead » (veille pour le lendemain) en France ont ainsi oscillé la plupart du temps en dessous du niveau du tarif ARENH au cours des dernières années.

Pour le premier semestre 2017, la CRE constate en revanche « une augmentation importante des demandes d’ARENH des fournisseurs alternatifs », avec un volume total demandé s’élevant à 40,75 TWh (et 41,45 TWh à date pour le second semestre). Ce regain d’intérêt pour le dispositif est lié à la prévision d'une hausse des prix sur les marchés de gros. « Les alternatifs anticipent un prix de gros en moyenne supérieur à 42 euros/MWh et utilisent donc cette option à coût nul pour se couvrir », explique Jacques Percebois, Professeur d’économie à l’Université Montpellier I, qui cite les craintes de délestage, d'une demande d'électricité plus forte ou encore de nouveaux arrêts de tranches nucléaires.

Quantité d'électricité livrée par semestre dans le cadre du dispositif ARENH et évolution des prix de gros. (©Connaissance des Énergies, d'après CRE)

Quantité d'électricité livrée par semestre dans le cadre du dispositif ARENH et évolution des prix de gros. (©Connaissance des Énergies, d'après CRE)

Quel avenir pour l’ARENH ?

Le dispositif ARENH fait encore l’objet de débats aujourd’hui, tant sur son efficacité que sur son juste niveau alors que les coûts de maintenance d’EDF augmentent afin de renforcer la sécurité de son parc nucléaire. Un décret en conseil d’État doit définir précisément la méthodologie de fixation du prix de l’ARENH, indique la CRE, mais celui-ci n’a toujours pas été publié.

Selon Jacques Percebois, ce mécanisme a jusqu'ici eu le mérite de permettre à des concurrents d'EDF de gagner des parts de marché à l’image de Direct Energie. « Les alternatifs ont pu jouer à armes égales avec EDF mais n'oublions pas que les kWh nucléaires sont au départ la propriété d'EDF, c'est donc un système qui peut se discuter », remarque le directeur du CREDEN(5). Dans le code de l'énergie, il est prévu de maintenir le dispositif ARENH en place jusqu’au 31 décembre 2025(6).

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