L’énergie dans le monde et en France : que retiendrez-vous de 2018 ?

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Fêtes de fin d'année 2018

Connaissance des Énergies vous souhaite à toutes et tous de joyeuses fêtes de fin d’année. (©Pixabay)

Connaissance des Énergies prend ses quartiers d’hiver et vous propose de retrouver quelques grandes problématiques énergétiques qui ont marqué 2018. Nous vous souhaitons à toutes et à tous de très joyeuses fêtes et vous donnons rendez-vous le mercredi 2 janvier 2019 pour le retour des publications.

L'énergie dans le monde en 2018

Hausse des émissions de gaz à effet de serre - l’« urgence » climatique en question 

En 2018, les émissions mondiales de CO2 liées à la consommation d’énergie fossile et à l’industrie pourraient augmenter de 2,7% selon les dernières estimations du Global Carbon Project rendues publiques en pleine COP24. La Conférence Climat organisée à Katowice a accouché d’un « mode d’emploi » (rulebook) nécessaire à l’application de l’accord de Paris mais n’a pas été le théâtre d’un rehaussement des ambitions des 197 Parties(1) en matière de lutte contre le changement climatique (à l’exception des îles Fidji et Marshall).

Pour rappel, le GIEC juge nécessaire de réduire de près de moitié les émissions mondiales de gaz à effet de serre d’ici à 2030(2) pour espérer contenir le réchauffement climatique à 1,5°C d’ici à la fin du siècle (par rapport aux températures de l’ère préindustrielle). Dans une déclaration commune à la COP24, les Parties ont uniquement salué le fait que le rapport « 1,5°C » commandé au GIEC ait été achevé « dans les délais », en appelant « à faire usage des informations » dudit rapport(3).

Selon les prévisions de l’AIE, le mix énergétique mondial restera, en l’état des engagements actuels, largement dominé par les énergies fossiles dans les décennies à venir, malgré une croissance très rapide des énergies renouvelables. En 2017, les énergies fossiles ont encore compté pour 85,2% de la consommation mondiale d’énergie primaire selon les dernières données de BP.

À cette « transition » très lente du système énergétique mondial se superpose la hausse quasi continue de la consommation mondiale d’énergie (+ 2,1% en 2017 selon l’AIE) et en particulier sous sa forme électrique. Pour faire face à cette croissance de la demande, l’Inde et l’Asie du Sud-Est prévoient notamment d’avoir encore massivement recours au charbon, qui a compté pour 38% de la production mondiale d’électricité en 2017. La consommation de cette énergie devrait encore augmenter en 2018(4), puis rester stable d’ici à 2023 selon les dernières estimations de l’AIE.

Mix énergétique mondial
La consommation mondiale d'énergie primaire a approximativement doublé au cours des 35 dernières années. (©Connaissance des Énergies, d'après BP Statistical Review of World Energy)

Évolution des cours du pétrole – la grande incertitude

Sur les 11 premiers mois de l’année 2018, le cours moyen du baril de Brent a atteint 72,3 $(5) (contre 54,25 $ en moyenne en 2017). Cette hausse moyenne de près d’un tiers du prix du brut en 2018 masque d’importantes variations au cours des derniers mois, qui traduisent les nombreuses incertitudes sur les marchés pétroliers.

Au cours du premier semestre 2018, le prix du baril de Brent a augmenté (74 $ au deuxième trimestre 2018, soit 6 $ de plus qu’au trimestre précédent), entre autres sous l’effet des efforts des pays membres de l’OPEP et de leurs partenaires (réunis sous le terme « OPEP+ ») pour limiter leur production pétrolière(6), mais aussi des perturbations et des inquiétudes relatives à l’offre au Venezuela, en Iran ou encore en Libye.

Dans un contexte de hausse des cours, les producteurs « OPEP+ » se sont accordés en juin 2018 sur une remontée du niveau global de leur production. Les sanctions américaines prévues contre les exportations iraniennes de brut ont toutefois contribué à pousser encore les cours du brut à la hausse, jusqu’à 81,03 $ en moyenne par baril de Brent en octobre 2018 (provoquant en France une remontée significative des prix des carburants, qui a contribué à l’émergence des « gilets jaunes »).

Début novembre 2018, les États-Unis ont réduit les craintes d’une offre insuffisante sur les marchés pétroliers, en accordant finalement des exemptions à 8 pays(7), autorisés à poursuivre leurs achats de brut iranien(8). Le cours moyen du baril de Brent a alors chuté de 20% en novembre 2018 (par rapport au mois précédent), cette chute se poursuivant en décembre (avec un baril de Brent coté à moins de 55 $ au 21 décembre).

Face à cette évolution, les 25 pays dits « OPEP+ » (15 pays membres de l’OPEP et 10 producteurs hors OPEP dont la Russie) se sont entendus début décembre 2018 sur une nouvelle réduction de leur production de pétrole brut, devant atteindre au total 1,2 million de barils par jour (Mb/j) à partir de janvier 2019 pour « une période initiale de 6 mois ».

De nombreuses incertitudes persistent toutefois, notamment sur l’importance de la future hausse de production américaine de pétrole de schiste (qui pourrait profiter de la baisse de production « OPEP+ »). Rappelons que la production de pétrole brut des États-Unis a atteint un niveau record (11,5 Mb/j en septembre 2018), dépassant ainsi la production russe. Pour la première fois depuis des décennies, les États-Unis ont par ailleurs été exportateurs nets de « pétrole » (en comptabilisant brut et produits pétroliers) durant la semaine du 24 au 30 novembre 2018 selon l'EIA.

Cours du Brent
Sur les 11 premiers mois de 2018, le cours moyen du baril de Brent a atteint 72,3 $. (©Connaissance des Énergies)

L'énergie en France en 2018

Présentation de la nouvelle PPE – 14 fermetures de réacteurs nucléaires envisagées d’ici à 2035

Après plusieurs reports, la nouvelle programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) de la France a été présentée fin novembre 2018. Elle prévoit entre autres la fermeture de 4 à 6 réacteurs nucléaires d’ici à fin 2028 (en incluant les deux tranches de la centrale de Fessenheim). D’ici à 2035, 14 des 58 réacteurs nucléaires actuellement en service pourraient être arrêtés selon le calendrier envisagé.

Le gouvernement a fixé pour objectif de réduire à 50% la part du nucléaire dans la production électrique française en 2035 (contre 71,6% en 2017), au lieu de l’horizon 2025 initialement fixé dans la loi de transition énergétique(9).

Précisons également que la PPE prévoit d’au moins doubler les capacités électriques renouvelables en France métropolitaine d’ici à fin 2028, à un niveau compris entre 102 et 113 GW (contre 48,6 GW à fin 2017). Rappelons ici que les facteurs de charge – qui déterminent in fine le volume d’électricité produit – peuvent fortement différer d’une filière à une autre, voire d’une installation de production à une autre. 

En amont de la présentation de la PPE s’est déroulé un débat public du 19 mars au 30 juin 2018 en France. Dans ce cadre, « 86 rencontres publiques auxquelles ont assisté 8 000 personnes » ont notamment été organisées. Un questionnaire visant à recueillir l’avis des Français sur la politique énergétique nationale a reçu près de 11 150 réponses et 400 citoyens tirés au sort (« G400 ») ont également débattu de la feuille de route énergétique.

Calendrier nucléaire
Calendrier de fermetures de réacteurs nucléaires présenté par François de Rugy le 27 novembre. (©Connaissance des Énergies)

Fiscalité carbone et « gilets jaunes » – l’impasse

En octobre 2018, les prix moyens des carburants dans les stations-service françaises ont atteint 1,52 €/l (dont 56,7% de taxes) pour le gazole et 1,56 €/l (dont 61% de taxes) pour le SP95, soit près de 20% de plus que l’année précédente. Cette hausse était imputable d’une part à l’augmentation annuelle de la fiscalité pesant sur ces carburants(10) mais surtout à la remontée des cours du pétrole brut durant les mois précédents.

La perspective d’un nouveau renchérissement des carburants, avec notamment la hausse de la composante carbone prévue début 2019, a entraîné l’émergence du mouvement des « gilets jaunes », qui a débouché sur plusieurs manifestations nationales à partir de mi-novembre 2018.

Après de premières annonces d’Édouard Philippe (doublement de la prime à la conversion pour les 20% des Français les plus modestes, augmentation du chèque énergie et extension du nombre de bénéficiaires,  prime à la conversion pour les chaudières au fioul, etc.), les hausses des taxes sur les prix des carburants, initialement prévues au 1er janvier 2019, ont été annulées.

Pour rappel, les taxes intérieures de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) intègrent depuis avril 2014 une contribution climat-énergie, « taxe carbone » dont le niveau est censé être rehaussé chaque année (44,6 €/t de CO2 en 2018, montant qui devait être initialement porté à 55 €/t de CO2 en 2019, avec une cible de 86,2 €/t de CO2 en 2022) 

Et vous, que retiendrez-vous de 2018 ?

Nous vous invitons à retrouver ci-dessous quelques-uns de nos articles d’actualité les plus consultés en 2018 et à poursuivre la discussion sur nos réseaux sociaux :

 
Retour des publications le mercredi 2 janvier 2019.
Sources / Notes
  1. 196 pays et l’Union européenne.
  2. Par rapport au niveau de 2010.
  3. Les projections actuelles envisagent une hausse de température de près de 3°C d'ici la fin du siècle, sur la base des contributions annoncées par les États.
  4. Après deux années de baisse, la consommation mondiale de charbon a augmenté de près de 1% en 2017
  5. Cours du pétrole brut, Ministère de la Transition écologique et solidaire.
  6. Depuis fin 2016.
  7. Chine, Inde, Turquie, Japon, Corée du Sud, Taïwan, Italie, Grèce.
  8. En théorie jusqu’à début mai 2019.
  9. Objectif jugé non réaliste abandonné par Nicolas Hulot en novembre 2017.
  10. Hausse moyenne de 7,6 centimes d’euro par litre pour le gazole et de 3,84 c€/l pour l’essence au 1er janvier 2018.

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