Nucléaire iranien : un « accord d’étape » mais vers quoi ?

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Accord nucléaire iranien

La chef de la diplomatie de l'Union européenne Federica Mogherini a présidé les négociations à Lausanne. Ici à côté du  ministre iranien des Affaires étrangères Mohammad Javad Zarif le 30 mars dernier. (©Union européenne, 2015) 

Le 2 avril, un accord d’étape a finalement été annoncé entre les « 5+1 »(1) et l’Iran sur son dossier nucléaire, près de 48h après la fin théorique des négociations. Quel est le contenu de cet accord ?

Un pré-accord à confirmer d’ici fin juin

Le groupe des « 5+1 » (Allemagne, Chine, États-Unis, France, Royaume-Uni, Russie) et l’Iran avaient entamé une nouvelle phase de négociations à Lausanne le 26 mars dernier. Ils se sont entendus hier sur un plan d’actions (« Joint Comprehensive Plan of Action ») dont voici les principaux éléments :

  • nombre de centrifugeuses : l’Iran s’engage à réduire de deux tiers le nombre de ses centrifugeuses installées, aujourd’hui au nombre de 19 000 dans le pays. Sur les 6 104 qu’il conserverait (toutes de « première génération »), 5 060 seraient autorisées à continuer à enrichir de l’uranium (pour une période de 10 ans) ;
  • enrichissement de l’uranium : l’Iran s’engage à ne pas enrichir l’uranium à un taux supérieur à 3,67% lors des 15 prochains années. Seule l’installation de Natanz sera autorisée à enrichir de l’uranium (contrairement à celle de Fordow) et aucune autre installation ne pourra être construite à cette fin (pour une période de 15 ans). Son stock d’uranium faiblement enrichi devrait être réduit à près de 300 kg contre près de 10 tonnes aujourd’hui. Les stocks excédentaires seront placés sous surveillance de l’AIEA ;
  • inspections de l’AIEA : les inspecteurs de l’Agence internationale seront autorisés à accéder à toutes les installations nucléaires iraniennes ainsi qu’aux mines d’uranium et aux sites de production du « yellow cake » (pour une période de 25 ans) ;
  • levée conditionnelle des sanctions : les États-Unis et l’Union européenne lèveront leurs sanctions liées au dossier nucléaire iranien après vérification par l’AIEA du respect des engagements iraniens.

Ce pré-accord constitue les bases du texte final qui doit être entériné avant le 30 juin prochain. D’ici là, « chacune des deux parties va continuer d’essayer d’avancer ses pions mais on ne voit pas de risque majeur qui remettrait en cause cette négociation » précise Thierry Coville, chercheur associé à l’IRIS.

Une étape historique après 12 ans de négociations

Si l’Iran possède les premières réserves prouvées de gaz naturel au monde, c’est l’énergie nucléaire dans ce pays (plus précisément la crainte d'une utilisation détournée à des fins militaires) qui focalise l’attention de la communauté internationale depuis plus d’une décennie. Des négociations sont entamées dès 2003 entre l’Allemagne, la France, le Royaume-Uni et l’Iran. Téhéran accepte alors d’appliquer le protocole additionnel au traité de non-prolifération (TNP).

Après son élection en 2005, Mahmoud Ahmadinejad relance le programme d’enrichissement d’uranium en Iran. Le dirigeant déclare un an plus tard être en mesure de fabriquer une bombe atomique en moins d’un an, marquant alors une phase tendue des relations avec l’Occident. En 2009, l’Iran accepte de reprendre des négociations avec les « 5+1 » après 14 mois d’interruption totale. De nouvelles sanctions contre l’Iran (incluant un embargo pétrolier) en 2012 et l’élection d’Hassan Rohani un an plus tard entament une nouvelle phase dans les négociations.

Un accord préliminaire sur le programme nucléaire iranien est ainsi conclu en novembre 2013, puis prolongé en novembre 2014 pour une durée de 7 mois. Jusqu’au texte actuel âprement négocié…

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