Petroplus, symbole d’un marché en perte de vitesse?

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Début 2012, on compte 11 raffineries en France métropolitaine, en incluant le site de Petit-Couronne. (©Connaissance des Énergies)

Eric Besson, ministre en charge de l’industrie et de l’énergie, se déplaçait ce matin sur le site de la raffinerie Petroplus de Petit-Couronne, en Seine-Maritime. Les difficultés rencontrées par le secteur sur le marché européen y ont été rappelés. Etat des lieux.

Point sur le raffinage en France et en Europe

Le raffinage du pétrole est un procédé industriel qui permet de transformer le pétrole brut importé en différents « produits », énergétiques (essence, gazole, fioul, etc.) ou non-énergétiques (bitume, naphtas utilisés en pétrochimie, etc.). Début 2010, la France dispose de 14 raffineries ayant alors une capacité annuelle de raffinage de 98,5 millions de tonnes de pétrole. Cette année-là, seuls 64 millions de tonnes de pétrole brut sont cependant importées pour raffinage. La France est en surcapacité de production et il ne reste, début 2012, que 11 sites exerçant des activités de raffinage (en France métropolitaine, en comptant Petit-Couronne dont les activités sont actuellement arrêtées).

Une autre contrainte pèse sur le secteur du raffinage en France et en Europe : la diésélisation du parc automobile. En 2010, les raffineries françaises produisent 11,5 millions de tonnes d’essence (soit 3,3 millions de tonnes de plus que la consommation française) et 20,5 millions de tonnes de gazole (soit près de 13 millions de moins que la demande)(1). La demande de diesel n’a cessé d’augmenté depuis 1994 tandis que celle de supercarburants (SP 95, SP 98) est en forte diminution. La France est alors contrainte d’importer du gazole (près de 50% de ses importations de produits pétroliers).

Rappelons que la production de gazole ne peut se substituer à celle d’essence puisque la distillation initiale du pétrole brut permet précisément de séparer les essences (« coupes légères ») du gazole (« coupes moyennes »). Il est donc nécessaire de trouver des débouchés pour exporter les excédents d’essence. Des investissements peuvent toutefois être réalisés pour augmenter le taux de production de gazole. Par exemple, Total investit en 2006 près de 550 millions d’euros en Normandie pour installer un hydrocraqueur permettant d’augmenter de 30% la production de gazole avec une même quantité de pétrole brut.

En plus des difficultés précédemment évoquées, le secteur du raffinage en Europe est confronté à :

  • une baisse de la demande en produits pétroliers (-10,8% en 2010), en partie liée à la crise économique ;
  • la concurrence des pays émergents qui ne sont pas soumis à des réglementations environnementales aussi exigeantes qu’au sein de l’Union européenne.

Selon la Commission européenne, les activités de 18 des 104 raffineries européennes seraient ainsi menacées depuis 2008.

Le site de Petit-Couronne, exemple d’un marché en berne

Les cinq raffineries exploitées par le groupe suisse Petroplus sont en particulier menacées par la situation décrite ci-dessus. Parmi elles se trouve le site français de production de Petit-Couronne (près de Rouen) qui emploie 550 salariés. Les activités de raffinage y ont été interrompues le 2 janvier dernier. La raffinerie a été placée en redressement judiciaire le 25 janvier dernier après l’annonce de Petroplus de sa prochaine mise en faillite. Des repreneurs sont actuellement recherchés.

Eric Besson a confirmé ce matin l’étude de plusieurs solutions, dont celle de l’investisseur suisse Klesch. Au Parlement européen, la députée française Estelle Grelier a appelé à renforcer les taxes sur les importations de produits pétroliers (déjà raffinés) afin de préserver les raffineries européennes soumises à concurrence(2). Cette proposition est jugée irréaliste par les industriels et inapplicable par la Commission européenne, au regard des principes de l’OMC(3). A cette occasion, la Commission européenne a rappelé que l’industrie pétrochimique de l’UE, soumise au SCEQE dès 2013, bénéficiera de quotas d’émission alloués gratuitement afin de ne pas être trop affectée par la concurrence internationale.

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