À Fessenheim, la crainte d'un « trou d'air » économique après l'arrêt de la centrale nucléaire

  • AFP
  • parue le

La centrale nucléaire de Fessenheim avait amené dans son sillage quelques milliers de travailleurs avec de bons salaires et leurs familles. Son arrêt va les faire partir, laissant craindre un trou d'air économique pour ce territoire des bords du Rhin, désireux de séduire des entreprises pour prendre rapidement le relais.

Poste, banques, hôtel-restaurant, pharmacie, boulangerie, mais aussi médiathèque ou supermarché : abreuvée par les millions d'euros versés par EDF, Fessenheim propose nombre de commerces et d'équipements à ses 2 500 habitants. "Avant c'était la zone la plus pauvre d'Alsace, industriellement il n'y avait rien. On a pu prospérer avec la centrale. On ne peut pas maintenant revenir 50 ans en arrière !", souligne le maire, Claude Brender (UDI) alors que le premier réacteur doit être définitivement arrêté le 22 février et le second, le 30 juin.

Avant que la décrue des effectifs ne s'amorce, la centrale EDF générait près de 2 000 emplois directs, indirects et induits. Soit environ 5 000 personnes concernées, familles incluses. Selon la direction du site, 650 salariés d'EDF et 300 d'entreprises prestataires y travaillent encore. À leur tour, 200 salariés EDF partiront en 2020. En 2025, date prévue du début du démantèlement, ils ne seront plus que "60 salariés d'EDF et une centaine de salariés prestataires".

Attirer des entreprises

Ces départs pourraient causer environ cinq millions d'euros de perte de revenus pour les seuls commerces de proximité des alentours. "On va souffrir sur le court terme, on devrait perdre 5 à 10% de notre chiffre d'affaires mais les maisons sont rachetées sur Fessenheim et je pense que la qualité de vie ici va attirer du monde des environs", estime le directeur du Super U, Olivier Porcu. Le magasin tente déjà d'attirer la clientèle allemande toute proche, avec produits allemands et affichages bilingues.

En matière d'emplois, le chômage ne devrait pas exploser puisque les salariés d'EDF seront réaffectés ailleurs, mais la population de Fessenheim devrait diminuer. "C'est une obligation pour nous de recréer de l'emploi" pour attirer de nouveaux habitants, explique Claude Brender. "On cherche à donner de la disponibilité foncière aux entreprises, mais c'est long", complète Gérard Hug, président de la communauté de communes Pays Rhin-Brisach (34 000 habitants).

Une zone économique longeant le Rhin, baptisée EcoRhena, et un développement du port fluvial de Colmar-Neuf-Brisach sont en projet, sous le pilotage à venir d'une société d'économie mixte franco-allemande. "Nous sommes dans la préparation de cette phase d'accueil rapide d'entreprises. C'est un terrain à transformer, une structure portuaire et ferroviaire à équiper, une stratégie industrielle à créer", tournée en particulier vers les énergies renouvelables, explique Jean Rottner, président de la région Grand-Est.

L'espoir était né de voir Tesla y implanter sa première usine européenne, mais le constructeur américain a choisi la banlieue de Berlin. "Il faut que l'on puisse le plus rapidement possible attirer des entreprises sur cette zone", qui doit être "binationale", argumente Myriam Paris, directrice à Colmar de la Chambre de commerce et d'industrie (CCI).

« Exsangue »

Selon son collègue, François Strub, directeur des équipements, "l'hypothèse probable" est celle de "premiers aménagements début ou courant 2021", avec "au mieux" un démarrage d'activités fin 2021 ou début 2022, ce qui augure d'"un petit trou d'air" à l'arrêt de la centrale.

Cet arrêt est "lourd de conséquences sociales, économiques et environnementales", a rappelé le député (LR) Raphaël Schellenberger, qui préside une commission parlementaire de suivi et a critiqué "un nouveau rendez-vous manqué pour l'État à Fessenheim" après les doutes émis par Elisabeth Borne, ministre de la Transition écologique, sur un projet de "technocentre" sur le site de la centrale.

L'autre difficulté, véritable menace selon les élus, est la fiscalité. Centrale ou pas, 2,9 millions d'euros continueront à être versés au Fonds national de garantie individuelle des ressources (FNGIR) instauré à la disparition de la taxe professionnelle, dont les contributions sont fixes.

"On n'aura plus la recette fiscale de la centrale (6,5 millions d'euros, ndlr), mais on continuera à payer", s'étrangle Gérard Hug, réclamant que l'État "neutralise" ce reversement. Sinon Claude Brender craint que le territoire n'en sorte "exsangue". "C'est une décision de l'État de fermer une centrale qui aurait pu continuer à tourner", souligne le premier. "On ne peut pas juste faire subir les conséquences au territoire", poursuit le second, réclamant du concret, "pas que des promesses".

Commentaires

AtomicBoy44

Ils peuvent craindre, c'est assuré qu'il vont tous bcp y perdre.

AtomicBoy44

Le clientélisme politique sera tjrs le plus destructeur de notre pays. Le totem de Fessenheim est la honte de Flamby et royale qu'il faudra tjrs leur coller sur le dos et cela pour 2.6% de voix d'EVA JOLY.

Il sont prêt a détruire une zone économique entière pour gagner 2.6% de voix ! Et on les comprends, sans ça ils n'auraient jamais gagné l'élection de 2012 ! Avec le recul, si on regarde ce qu'il a fait de son mandat, c'est médiocre et ahurissant de se dire que 4 ans après les attentas de 2015, vous avez des gens qui défilent aux cris de allah ouh ackbar dans les grandes avenues de paris !

Ils nous méprisent et sont donc méprisables. votez avec vos billets et placez votre argent ailleurs que dans les banques en Euro.

Les français sont des veaux, Pitoyable gâchis économique et industriel.

FRANCOIS CHEVALLIER

Qui veut modérer ces propos, délirants, faux ? Il n'y a pas de partisanisme dans la décision de fermer Fessenheim, c'est pour ouvrir Flammanville. Intéressez-vous au factuel plutôt que d'imaginer un complot contre vous, quoiqu'avec une telle imagination, vous allez bien y arriver...

Jean-Pierre MANIN

C'est un énorme gâchis et une monumentale erreur, uniquement pour gagner quelques pour cent de voix aux élections. Après l'avis de l'ASN, Fessenheim aurait pu continuer à produire durant au moins 10 années un courant décarboné et bon marché. Mais par pure idéologie, inculte et ignare, on sacrifie sur l'autel de l'écologie et de l"éolien fatal ", une énergie qui nous aurait permis de ne pas dépendre des autres pays, dont l'Allemagne qui produit un courant très carboné à partir du charbon et du lignite ! de plus cela aura des répercussions sur notre économie nationale et sur le tissu social de cette région. Au total on sera perdants et le courant deviendra de plus en plus cher, surtout pour les basses catégories sociales.
JP Manin ingénieur CNRS à la retraite

FRANCOIS CHEVALLIER

C'est vous qui êtes un idéologue du nucléaire. Si vous êtes d'accord, on va venir déposer un container avec des déchets nucléaires dans votre jardin. Alors, toujours d'accord avec ce mode de production décarbonné qui laisse aux générations futures des produits dangereux ? Le dévellopement des enr devrait pourtant vous mettre la puce à l'oreille...

Lecteur 27

Bien sûr que la fermeture de Fessenheim est un profond gâchis - de la destruction multiforme de valeur (le coût de la fermeture, les pertes de recettes pour une entreprise nationale, le "remplacement" de ces pertes par le surcoût de GWh renouvelables/subventionnés, la consommation de terres agricoles supplémentaires, de matières premières rares etc etc ...). Où est le gain ? Pas dans la diminution des émissions de GES évidemment (peut-être même le contraire puisque l'intermittence appelle nécessairement du pilotable rapide - donc du charbon (comme en Allemagne) ou du gaz), ni dans le gain de voix aux élections (j'espère que les gouvernements successifs l'ont compris), la plupart des écolos/anti-nucléaires ayant perdu le sens des réalités et croyant dans un avenir radieux où le vent, le soleil, la sobriété promise des consommateurs et l'absence d'arithmétique (au diable les calculs) régneront en maître. Les déchets nucléaires dans le jardin ? Etrange question ... Le monsieur du dessus recevrait-il dans son jardin les déchets (beaucoup plus nombreux et guère moins dangereux) de tous les objets qu'il utilise dans sa vie quotidienne et moins quotidienne, qu'il (et sa famille) porte sur lui, dans sa voiture, dans son bateau, dans sa maison, dans les eaux usées qu'il fabrique directement et indirectement etc .... ? Non, bien sûr: le traitement des déchets quels qu'ils soient n'est pas une affaire de "jardin'" (le sien ou le nôtre), c'est une affaire industrielle, prise en charge par l'industrie elle-même, sérieusement. Pour une fois dans l'histoire industrielle du pays, on a en particulier avec l'industrie nucléaire un secteur industrie qui prend au sérieux ce sujet ... publiquement. Allez habiter dans certains des anciens départements miniers français et vous saurez alors ce qu''est un pays/une industrie qui ne se préocuppaient pas alors de ses déchets. Plaignez vous: le débat sur l'enfouissement des quelques "déchets" nucléaire (qui ne viennent pas tous de la génération électrique) vous permet de continuer de persifler méchamment contre l'électro-nucléaire et à tenter de laisser le problème ouvert pour mieux le faire interdire. Le gâchis de Fessenheim n'est pas seulement un gâchis pour l'industrie électrique, c'est aussi un gâchis pour la région et un gâchis intellectuel car il symbolise à mes yeux la paresse intellectuelle de l'opinion qui croit encore que l'électro-nucléaire dégage des gaz à effet de serre, que c'est une industrie du passé et que le vent et les micro-centrales continueront à fournir les vases quantités d'énergie électrique dont nous continuerons à avoir besoin.

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