Batteries et métaux rares : l'Europe risque une « double dépendance » vis-à-vis de la Chine, avertit la PDG d'Eramet

  • AFP
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L'Europe risque une "double dépendance" vis-à-vis de la Chine en matière de transition énergétique, à la fois pour l'extraction des métaux rares et pour leur transformation industrielle, a averti lundi Christel Bories, PDG du groupe minier français Eramet.

"L'Europe doit faire attention de ne pas se se retrouver avec une double dépendance chinoise : à la fois sur l'extraction et sur la raffinerie" des métaux comme le manganèse, le cobalt, le nickel ou le lithium, utilisés dans la fabrication des batteries électriques, a déclaré Mme Bories sur BFM Business, alors que son groupe, recentré sur les activités minières stratégiques, affiche une hausse de 8% de son chiffre d'affaires au premier trimestre.

"La batterie d'un véhicule électrique, c'est 40% de la valeur du véhicule, et une grande partie de son poids, ce sont des métaux : nickel, manganèse, cobalt, lithium, les fameuses batteries lithium-ion" a-t-elle rappelé. "On parle de gigafactory (de batteries, NDR), mais d'où vont venir les matières premières ?" s'est-elle interrogée en estimant que l'Europe devait avoir "des acteurs miniers" capables "de développer et de produire de façon responsable les métaux de la transition énergétique".

Alors qu'Eramet est considéré comme un acteur stratégique par l'État français, "il n'y pas beaucoup d'autres acteurs européens" dans le secteur, a relevé Mme Bories qui vient d'être renouvelée à son poste. "Il faut développer ou aider à développer des entreprises comme nous. Il y a aussi des start-up dans ces domaines-là" a-t-elle noté. Selon elle, l'Europe doit "faire de la géopolitique, c'est-à-dire ce qu'on appelle de la diplomatie économique pour se lier à des pays qui ont ces richesses-là. La Chine fait cela extrêmement bien de façon efficace depuis de nombreuses années et donc a mis la main sur beaucoup de ressources" a ajouté Mme Bories.

La croissance du groupe metallurgique et minier a été tirée au premier trimestre par celle de ses mines justement et par la hausse des prix des métaux sur les marchés mondiaux, malgré le recul des ventes des alliages haute performance de sa filiale Aubert et Duval, affectés par la crise de l'aéronautique.

Au total, la production de minerais et métaux a vu ses ventes progresser de 18% à 683 millions d'euros. Celle de minerai de manganèse a augmenté de 17% à 1,5 million de tonnes au Gabon, le chiffre d'affaires relié à l'extraction du minerai de nickel a fait un bond de 58%. La troisième activité minière du groupe, liée à l'exploitation de sables minéralisés au Sénégal, a vu son activité reculer de 20% sur un an.

Commentaires

olivier DE BOISSEZON

Voilà un sujet intéressant. Une start up grenobloise (RECUPYL) récupère les matériaux rares des batteries et accumulateurs "usagés", pour réalimenter la filière de production de batteries, sans passer par la case "extraction".
En 2020, j'ai entendu lors d'une émission scientifique, une suggestion du CNRS de Grenoble à la gouvernance européenne de favoriser cette filière fiable de récupération des ions rares (par une membrane osmotique "réglable") afin de constituer en quelques années un stock stratégique européen de ces matériaux rares afin de diminuer sa dépendance minière et économique dont cet article parle, et de viser une autonomie de production, stable financièrement.
Joli challenge pour le monde d'après.

Serge Rochain

Vous avez raison Monsieur Boissezon, le siècle en cours restera dans l'histoire comme le premier de l'ère du recyclage. L'époque des extractions minières suivi de la séparation des composites depuis un minerai pour en extraire ses corps simples est dernière nous. Il y a aujourd'hui plus de fer sur les tas d'ordures que dans les mines de fer (image à généraliser pour tous les métaux). L'avenir de la métallurgie n'est plus dans les techniques de raffinage des minerais mais dans les nouvelles techniques de raffinage des produits élaborés obsolètes pour en séparer ce que l'on y a assemblé. La Terre ne s'en portera que mieux et nous y gagneront à ne plus dépendre que de ce que l'on a déjà sur notre territoire et non des pays producteurs d'autrefois. La nouvelle indépendance énergétique c'est l'exploitation de ce que le Soleil nous délivre de façon directe ou indirecte à l'aide de dispositifs que l'on recycle à l'infini in situ, et non plus extraire de la matière du sol d'un autre pays pour le transformer en énergie sans possibilité de recyclage.

arroyo

séduisant en effet (concept com' d'"urban mine" ou eco. circulaire plus largement), mais procédé et matière récupérée sont souvent bien plus coûteux que des matières "premières" qui restent bien plus accessibles que l'on pense souvent (Recupyl "vieille startup", existe-elle encore, a propos ?)

Blaizot

Le recyclage est indispensable mais il y a des nouveaux besoins inexistants anterieurement
-le praséodyme, le neodyme et le nobium pour les éoliennes marines et les mobilités électriques
-le lithium, cobalt et graphite pour les batteries
-sans parler des minerais ( et de l’eau) nécessaire aux électrolyseurs pour l’hydrogéne.
Et bien sûr et toujours le cuivre ( pourtant très bien recyclé: merci aux manouches) pour connecter les nouvelles éoliennes et panneaux solaires, le béton et l’acier. Et on doit construire cette économie des énergies renouvelables dès maintenant avec une population de plus en plus importante et demandeuse... aller vers les ré c’est passer des hydrocarbures aux métaux!

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