Chine: le nord-est du pays attend son salut des capitaux étrangers

  • AFP
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Longtemps dominé par le charbon et les hauts fourneaux, aujourd'hui en déroute économique, le Nord-est de la Chine tente d'attirer les investisseurs étrangers pour s'inventer un avenir dans les technologies de pointe... non sans quelques ratés bureaucratiques.

Au coeur d'une "ceinture de la rouille" hantée par le déclin des industries lourdes, le Liaoning était la seule province de Chine en récession l'an dernier - alors même que le pays enregistrait une croissance de 6,7%. Mais à Shenyang, la capitale provinciale, les vieilles usines aux vitres condamnées et entourées d'herbes folles côtoient des parcs technologiques à l'activité frémissante.

Persuadé que les capitaux étrangers lui permettront de réussir sa délicate reconversion, Shenyang abrite un "Parc industriel sino-américain" spécialisé dans les équipements automobiles à haute valeur ajoutée. Des camions chargés de composants le desservent en empruntant des routes flambant neuves aménagées par la municipalité.

Les projets se précipitent: la province a lancé cette année une "Zone de libre échange pilote". Et un "Complexe sino-allemand de production d'équipements intelligents" est en cours de construction à Shenyang: BMW, Siemens et BASF s'y installeront. "Le gouvernement local nous offre de nombreux avantages, comme des facilités pour enregistrer les entreprises, des prix réduits pour les espaces industriels et commerciaux et des visas de trois ans pour les familles", s'enthousiasme Harald Kumpfert, président de la Chambre de commerce européenne à Shenyang.

Travail d'équipe

"On voit beaucoup plus de soutien pour les entreprises étrangères ici. Il y a un gros rattrapage à accomplir, et (les autorités locales) veulent travailler avec nous", sourit Jason Lee, directeur de développement pour Eastern America, l'organisation qui a acheté les terres où est aménagé le Shenyang American Industrial Park. Le contraste est drastique avec le reste du pays, où la moitié des firmes européennes se plaignent de discriminations en tout genre: obligation d'avoir un partenaire local ou de réaliser des transferts technologiques, concurrence déloyale, restrictions réglementaires...

Certes, le Liaoning, l'une des trois provinces du nord-est, se veut plus accueillant, mais dès qu'ils s'y établissent, les entrepreneurs étrangers rencontrent les mêmes obstacles qu'ailleurs, tempère M. Kumpfert, pointant de longues attentes pour décrocher certains permis et des règlements "opaques". Pour autant, cela n'empêche pas la Chambre d'observer une forte hausse des arrivées d'entreprises européennes. Difficile d'en évaluer l'ampleur exacte, faute de statistiques municipales.

Mais à en croire Harald Kumpfert, les firmes spécialisées dans les énergies renouvelables, le tourisme, l'agriculture ou les technologies de pointe ont de bonnes chances de prospérer dans cette ville en proie à une âcre pollution atmosphérique et engagée dans "une douloureuse restructuration".

Tracas administratifs

Le nord-est de la Chine reste tourmenté par les déboires des groupes étatiques dans les industries lourdes: des mastodontes du charbon et de la sidérurgie, plombés par les surcapacités et les dettes. Ils sont de surcroît pénalisés par la politique chinoise de rééquilibrage économique au profit des services, de la consommation intérieure, des énergies "propres" et des technologies avancées.

Le Liaoning, officiellement en récession, a admis avoir "falsifié" ses statistiques sur les années 2011-2014 pour camoufler l'ampleur des difficultés. M. Li, gestionnaire d'une usine d'isolants automobiles, espère que les capitaux étrangers permettront à la région de se redynamiser. "Si l'on a davantage de gens qui viennent investir, tout l'environnement s'améliorera. L'emploi, les salaires, beaucoup de choses iront mieux", espère M. Li --sans livrer son nom complet faute d'être autorisé à parler aux médias.

Le processus risque cependant d'être long. Au "Centre de services sino-allemand" de Shenyang, les bâtiments fraîchement construits demeurent quasi-vides. Ce n'est pas faute de marques d'intérêts, puisqu'une vingtaine de firmes étrangères sont déjà sur les rangs pour s'y installer, assure Wolfgang Wagner, directeur opérationnel de la structure. Seulement voilà: la plupart ont les plus grandes difficultés à décrocher les autorisations nécessaires pour louer des locaux dans ces bâtiments appartenant à l'Etat, déplore M. Wagner. "Au début, on imaginait que ces entreprises pourraient emménager en 2018. Mais finalement, ce ne sera pas avant 2019".

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