En Birmanie, le départ de groupes internationaux s'accélère

  • AFP
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TotalEnergies et Chevron ont grossi vendredi les rangs des entreprises étrangères qui ont décidé de quitter la Birmanie depuis le coup d'État militaire. D'autres sociétés ont néanmoins simplement suspendu leur activité, voire continuent leurs affaires sur place. Tour d'horizon.

Face à la répression de la contestation par l'armée, qui a fait plus de 1 500 victimes civiles selon les dernières estimations et prend de plus en plus la forme d'une guerre civile, des ONG maintiennent la pression sur les grands groupes internationaux, afin de les pousser à revoir leurs activités sur place.

Le secteur pétrolier se retire

Jusqu'ici, peu de grands groupes avaient annoncé leur départ de Birmanie: l'opérateur télécoms norvégien Telenor était l'un des rares, faisant le choix dès juillet dernier de vendre sa très rentable filiale locale, aux 18 millions d'abonnés, à une entreprise soupçonnée de liens avec la junte, la compagnie financière libanaise M1 Group. L'opération n'est cependant pas encore finalisée. Le groupe a également annoncé lundi son intention de se séparer de ses activités de paiement mobile, Wave Money, qu'il va céder à son co-actionnaire singapourien Yoma MFS Holdings.

Les majors pétrolières TotalEnergies et Chevron ont décidé de suivre le même chemin, annonçant vendredi leur retrait du pays, où ils étaient partenaires sur le champ gazier de Yadana. Implanté depuis 1992 dans le pays, uniquement dans le secteur du gaz, TotalEnergies y emploie plus de 200 personnes et justifie son retrait par un "contexte qui ne cesse de se dégrader au Myanmar, en matière de droits humains". Les activités du champ gazier seront réparties entre les deux partenaires restants, PTTEP, filiale de la société nationale d'énergie thaïlandaise, et MOGE, une société d'État birmane contrôlée par l'armée.

Quant au cigarettier britannique BAT, il a quitté la Birmanie en octobre dernier, après avoir "évalué la viabilité opérationnelle et commerciale à long terme" de l'entreprise dans le pays. Le géant du tabac employait avant le coup d'État plus de 100 000 personnes dans le pays de façon directe ou indirecte.

Ceux qui suspendent leurs opérations

L'énergéticien français EDF reste impliqué dans le projet de barrage hydroélectrique Shweli-3, un investissement évalué à 1,5 milliard de dollars toutefois suspendu depuis plusieurs mois. Si le consortium formé avec le japonais Marubeni et le birman Ayeyar Hinthar n'est pour l'heure pas remis en question, "EDF reste disposé à reconsidérer son engagement", à précisé le groupe vendredi.

Pas encore présent dans le pays, à la différence de son concurrent Suzuki, le constructeur japonais Toyota devait inaugurer début 2021 sa première usine en Birmanie, inauguration suspendue avec le coup d'État. La production n'y a toujours pas démarré, selon le site du constructeur.

Dans le secteur de l'habillement, pour lequel la Birmanie est un important fabricant, les groupes italien Benetton et suédois H&M ont suspendu toute nouvelle commande en provenance du pays depuis des mois. H&M n'a pas souhaité faire de commentaire sur ses opérations en Birmanie. L'AFP n'a pu joindre Benetton vendredi.

Certains restent, contraints ou par choix

Après avoir dans un premier temps mis à l'arrêt ses deux usines locales, dans la foulée du coup d'État, le constructeur japonais Suzuki les a rapidement rouvertes. Implanté depuis 1998 dans le pays, le groupe y produisait plus de 13 000 véhicules par an en 2019 et a entamé la construction d'une troisième usine en Birmanie.

Accor, qui exploite neuf hôtels en Birmanie, indique vendredi avoir "fait le choix de rester présent dans le pays et de maintenir un soutien à ses 1 000 collaborateurs sur place et aux communautés proches des hôtels du groupe". Accor "est entré en Birmanie avec l'espoir d'apporter des changements positifs à la population. C'est dans cet esprit que nous maintenons notre présence. Le tourisme est vital pour la Birmanie et reste l'un des derniers liens qui relient le peuple birman au monde", a indiqué à l'AFP une porte-parole du groupe.

Le brasseur japonais Kirin cherche depuis plusieurs mois à mettre fin à ses relations d'affaires avec l'armée birmane, avec laquelle il exploite localement deux brasseries, dénonçant des agissements "contraires" à ses principes en matière de droits de l'Homme. Les négociations sont cependant dans l'impasse, poussant le groupe à initier une procédure d'arbitrage commercial à Singapour en décembre.

Dans le même secteur, le danois Carlsberg, qui emploie environ 450 salariés sur place, a "réduit ses capacités" de production, sur fond de moindre consommation locale, sans prévoir de se retirer.

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