La centrale à charbon de Cordemais peut-elle se mettre au vert ?

  • AFP
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Menacée de fermeture en 2022, la centrale à charbon de Cordemais (Loire-Atlantique) pourrait obtenir un sursis en brûlant du bois. Une perspective défendue par EDF, mais dénoncée par des associations qui craignent une "catastrophe écologique".

Un "projet intéressant": c'est ainsi que le ministre de la Transition écologique François de Rugy a qualifié la semaine dernière la volonté d'EDF de reconvertir le site de Cordemais, à 30 kilomètres à l'ouest de Nantes, en centrale biomasse. Si la reconversion aboutissait, la centrale pourrait fonctionner au-delà de 2022, date à laquelle le gouvernement s'est engagé à abandonner le charbon dans la production d'électricité (environ 1,5% des émissions de gaz à effet de serre en France).

L'annonce du ministre est un revirement par rapport à son prédécesseur Nicolas Hulot, qui critiquait une "technique" au "rendement énergétique faible" et une "utilisation massive de bois" contribuant "souvent à la déforestation", à l'Assemblée nationale le 27 juillet 2017.

Baptisé "Ecocombust", le projet d'EDF vise à remplacer progressivement le charbon par des granulés fabriqués à base de déchets de bois (tailles de haies, bois d'ameublement, panneaux, emballages...). A moyen terme, la centrale brûlerait 80% voire 100% de biomasse, pendant 500 à 1.000 heures par an (contre 4.500 aujourd'hui).

"La centrale tournera moins mais pendant des périodes de pointe. Le gros avantage, c'est qu'on n'a pas besoin de tout modifier", avance Joël Geffroy, maire (divers droite) de Cordemais.

EDF, qui a refusé de répondre aux questions de l'AFP, vante "un modèle innovant, vertueux et performant sur les plans écologique et économique", dans un dossier de presse.

Un "modèle" qui suscite le scepticisme des associations écologistes. Cécile Marchand, chargée de campagne aux Amis de la Terre, souligne ainsi que les granulés fabriqués à base de déchets risquent de détériorer la centrale en raison de leurs impuretés. "Aucun exploitant dans le monde n'a réussi à passer au stade industriel", affirme-t-elle.

"Le gros risque, c'est qu'EDF se retrouve à brûler du bois prélevé en forêt. Ce serait une catastrophe écologique, une catastrophe pour la biodiversité", prévient-elle, car les forêts contribuent aujourd'hui à absorber le CO2 de l'atmosphère.

Un scénario à la Gardanne, cette ancienne centrale à charbon des Bouches-du-Rhône qui brûle du bois de coupe et est accusée par les écologistes de menacer les forêts locales. "Si c'était ça, je serais furieusement contre", assure Ronan Dantec, sénateur écologiste partisan du projet d'EDF. Selon l'élu, le système "permet de valoriser les déchets de bois" qui "finissent actuellement en décharge".

"En aucun cas, le bois de forêt ne sera utilisé", abonde Gwénaël Plagne, de la CGT d'EDF. "C'est un sujet beaucoup trop controversé."

« Gaspillage inouï »

Le mutisme du groupe d'électricité laisse cependant planer un doute. "S'ils sont si sûrs d'eux, pourquoi ne s'expriment-ils pas?", interroge Cécile Marchand.

Autre critique des détracteurs du projet: le faible rendement de la centrale. "Elle gaspille les deux tiers de son combustible car elle ne valorise pas la chaleur perdue", pointe ainsi M. Fonteneau, président de l'association Virage Energie Climat. Il dénonce un "gaspillage énergétique inouï" par rapport aux centrales à cogénération modernes, qui produisent de l'électricité et de la chaleur pour les réseaux de chauffage urbain.

En outre, la reconversion n'empêchera pas "un drame social" du fait de la moindre activité de la centrale, estime M. Fonteneau, parlant de "centaines de destructions d'emplois" sur les quelque 600 salariés actuels (EDF et prestataires). "Faux", affirme M. Plagne, selon lequel "EDF sauve quasiment l'intégralité des emplois" avec Ecocombust. Mais là encore, le groupe n'a pas pris d'engagement public. Avec 1.500 emplois indirects et 27 millions d'euros versés aux collectivités, la centrale joue un rôle essentiel dans l'économie locale.

Mais c'est sans doute la question de la sécurité du réseau électrique qui risque de l'emporter, alors que la Bretagne ne produit que 15% de son électricité. Charbon ou pas, fermer la centrale de Cordemais pourrait s'avérer impossible si d'autres centrales n'étaient pas mises en service d'ici 2022 (EPR, gaz, éoliennes). "On demande quelques années de plus pour accompagner la montée en puissance des énergies renouvelables", avance Gwénaël Plagne.

Commentaires

Franckyky

Donc selon Gwénaël Plagne quand on divise la production d'une centrale par 8 on ne supprime pas d'emplois... c'est cool ça ! C'est une bonne nouvelle en fait ! Ou alors c'est une fake-news ?
à la limite si la production baissait de 20 à 30% on pourrait l'entendre... mais là on parle de 800% !!!!!!!!!!!

Aucune transparence de la part d'EDF et de la CGT, il y a un loup quelque part ?

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