La grogne monte à la pompe face à la hausse des prix des carburants : témoignages en Île-de-France

  • AFP
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Ils font le plein de leur voitures et semblent résignés face à la flambée des prix des carburants. Dans les stations services de la région parisienne, les automobilistes rencontrés jeudi par l'AFP râlent face aux compteurs qui s'affolent et désespèrent de voir la situation s'améliorer.

"C'est abusé ! Regardez le prix : gazole 1,71 euro. Franchement, c'est abusé", tempête Jamel, après avoir fait le plein de sa voiture dans une station du centre de Versailles, l'une des plus chères du département. "On travaille pour ça, on paie que ça. C'est trop", lâche l'homme de 45 ans, désabusé.

Depuis début octobre, les prix des carburants ont explosé : le prix du gazole a battu un record historique, à 1,5354 euro le litre en moyenne en France, et le sans plomb 95 a retrouvé ses sommets de 2012, à 1,6332 euro le litre.

"Ici, avant j'étais à 40 euros (de plein, NDLR) et maintenant je suis à 60 euros quasiment", constate Abdel Ryan Houari, 46 ans qui vient de faire son plein dans la station total d'Elancourt, près de Trappes (Yvelines), l'une des moins chères des environs.

"Avec ma petite retraite (1 000 euros), c'est pas évident", déplore Isabelle Barbier, secrétaire à la retraite, venue expressément à la station Intermarché de Vaux-le-Pénil (Seine-et-Marne) pour trouver le tarif le moins cher. "Je me promène moins depuis 3/4 mois" confie-t-elle, couverte d'une doudoune violette et lunettes assorties.

D'autres comme Wafa Bemdoumia, 37 ans, ont décidé d'équilibrer leur budget autrement : "cela pèse sur les loisirs et le reste", explique la mère de famille. Elle a besoin de sa voiture familiale "pour tout" : travail, courses, loisirs,... "Cela fait 20-30 euros de plus par mois minimum" calcule-t-elle, pour ce véhicule diesel. "Et en plus on a un diesel, c'est ce qui a le plus augmenté".

Tout augmente « sauf les salaires »

Les prix des carburants dépassent désormais ceux qui étaient en vigueur lors de la crise des "gilets jaunes", il y a trois ans, et réveillent les mécontentements d'alors.

Véronique, coiffeuse résidant à Melun ne digère pas cette nouvelle augmentation. "Avec le boulot, je n'ai pas le choix. C'est honteux, ce sont toujours les mêmes qui paient et toujours les mêmes qui s'en mettent dans les fouilles", clame-t-elle. "S'il n'y avait que ça qui avait augmenté... Il y a l'alimentaire, etc. Sauf les salaires", poursuit-t-elle, rappelant que depuis la rentrée 2021, les cours des produits alimentaires se sont également envolés.

Dans le nord de Paris, à la station essence boulevard de la Villette, les travailleurs se sentent prix en étau : "je dois nourrir ma femme qui ne travaille pas et notre enfant", explique M. Soumhoro, qui fait le plein de son scooter. L'homme de 29 ans travaille comme livreur Uber et a vu son budget mensuel exploser : "avant je dépensais environ 5 euros d'essence par jour, maintenant c'est plutôt 6", explique-t-il. "Ça fait beaucoup à la fin du mois". "Si j'arrive à économiser, j'achèterai un scooter électrique. Le monde est en train de basculer vers l'électrique", estime-t-il.

Pour d'autres, comme Olivier, un Versaillais qui jongle entre moto et vélo au quotidien, la solution doit venir du gouvernement. Il faut "que l'État (...) aille taxer autre chose ou fasse des économies dans son fonctionnement plutôt que sans arrêt augmenter l'essence et taper dans le portefeuille", s'exclame-t-il. "C'est un impôt déguisé (...), tout le monde le sait", accuse-t-il.

Les taxes (TICPE, TVA), qui comptent actuellement pour 50 à 60% du prix du litre de SP95 ou gazole selon les données de l'Union française des industries pétrolières, sont l'objet de nombreuses critiques.

Les autorités écartent pour l'instant la possibilité de réduire les taxes pour faire baisser les prix : "on n'en est pas là aujourd'hui", a déclaré mercredi le porte-parole du gouvernement, Gabriel Attal. Mais d'autres "mesures de protection" sont étudiées, promet-il. Faute d'un geste rapide et important, le mouvement de contestation des "gilets jaunes" pourrait renaître, prévient Sylvain Samba, un coursier de 25 ans : "avec ce qui se passe, il ne peut y avoir que des manifestations", assure-t-il.

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