PPE: le secteur de l'énergie sous tension attend sa feuille de route

  • AFP
  • parue le

Le secteur de l'énergie en France est en ébullition dans l'attente de connaître la feuille de route énergétique du gouvernement aux multiples conséquences sociales, économiques et environnementales, et qui va modeler le secteur pour les dix prochaines années.

La Programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE) pour les années 2019-2023 et 2023-2028 est attendue pour la fin octobre. "Le déroulé de nos travaux nous permet de maintenir cet objectif" même si ce n'est "pas à un jour ou une semaine près", indiquait cette semaine le ministre de la Transition écologique et solidaire, François de Rugy.

Signe que le dossier est complexe, la première version de la nouvelle PPE sera rendue publique avec plusieurs mois de retard, alors qu'elle était initialement attendue fin juin ou début juillet. Et les arbitrages seront rendus au plus haut niveau de l'État, indique-t-on de source gouvernementale. C'est même Emmanuel Macron qui devrait faire les annonces, a-t-on appris de sources concordantes.

L'un des gros enjeux sera de déterminer la trajectoire de baisse de la place du nucléaire dans la production d'électricité. La France, qui a produit près de 72% de son électricité grâce au nucléaire l'an dernier, veut ramener cette part à 50% pour réduire sa dépendance à cette énergie, à un horizon désormais repoussé à 2030 ou 2035.

Le parc nucléaire actuel compte 58 réacteurs, dont les deux de la centrale de Fessenheim qui doivent fermer et qui posent déjà un casse-tête social et politique au gouvernement.

"Nous ne souhaitons pas que (d'autres) réacteurs ferment avant 2029 mais ce n'est pas à nous d'en décider", a déclaré le PDG d'EDF, Jean-Bernard Lévy. L'électricien veut en effet prolonger ses réacteurs à 50 ans avant d'en arrêter certains, puis lisser les fermetures sur les années 2029-2060.

De son côté, François de Rugy affiche une certaine prudence et souligne que le gouvernement a déjà décidé l'arrêt prochain de quatre centrales à charbon, très polluantes. "Nous sommes très soucieux de la sécurité d'approvisionnement électrique des Français", souligne-t-il. Il y a encore quelques mois l'ex-ministre Nicolas Hulot promettait lui un "échéancier" précis d'ici à la fin de l'année afin "qu'on sache quels réacteurs et le nombre de réacteurs" qui doivent fermer.

« Boîte de Pandore »

Certains acteurs s'inquiètent même d'un retour en arrière sur les ambitions dans les énergies renouvelables, censées représenter 32% de la consommation d'énergie et 40% de la consommation d'électricité en 2030.

Car la loi sur la transition énergétique de 2015 va devoir être révisée pour intégrer le nouveau calendrier de la baisse du nucléaire. "C'est un peu cette ouverture de la boîte de Pandore que nous craignons", affirme Jean-Louis Bal, président du Syndicat des énergies renouvelables (SER), "que ce soit l'occasion pour certains de revoir les objectifs d'énergies renouvelables".

"On va être extrêmement vigilant", abonde Pauline Le Bertre, déléguée générale de France Énergie Éolienne: "On parle d'une date, d'une énergie, et les changements doivent rester cantonnés à cela". Les présidents des région Occitanie, Pays de la Loire, Bretagne et PACA, ont aussi écrit au Premier ministre Edouard Philippe pour lui demander de ne pas oublier dans la PPE l'éolien flottant, filière émergente dans ces territoires.

D'autres acteurs s'agacent aussi de la tournure prise par les débats. Didier Holleaux, directeur adjoint d'Engie, dénonce des scénarios "tout électrique" voire "tout nucléaire", reposant sur la thèse d'une hausse envisagée de la consommation de courant, loin d'être partagée par tous.

Le biogaz ou la chaleur renouvelable ont ainsi du mal à se faire une place dans les discussions, alors que la PPE concerne l'avenir de toutes les énergies et de tous leurs usages (chauffage, transports, etc.), afin d'en diminuer les émissions de gaz à effet de serre.

Selon de nombreux experts, l'un des principaux outils à mobiliser est la réduction de la consommation globale d'énergie, et la France s'est fixé l'objectif de la diviser par deux d'ici 2050. Or, selon les calculs du ministère de la Transition écologique, ce ne sera pas le cas, du fait du retard pris dans les transports et le bâtiment.

Ajouter un commentaire

CAPTCHA
Image CAPTCHA
Saisir les caractères affichés dans l'image.

Suggestion de lecture