Londres lève le moratoire sur la fracturation hydraulique

  • AFP
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La technologie est très controversée et son potentiel contesté : le gouvernement britannique a pourtant levé jeudi un moratoire sur la fracturation hydraulique, suspendue en 2019 par l'exécutif conservateur de l'époque en raison des risques sismiques.

"Pour renforcer la sécurité énergétique du Royaume-Uni, le gouvernement britannique a levé aujourd'hui le moratoire sur la production de gaz de schiste en Angleterre", indique un communiqué gouvernemental.

L'exécutif de la nouvelle Première ministre Liz Truss, elle aussi conservatrice, précise que les futures demandes d'autorisation de forage seront examinées à la lumière "des besoins nationaux et mondiaux en gaz" et seulement là "où il existe un soutien local".

Les défenseurs de l'environnement font valoir de longue date que la fracturation hydraulique ("fracking" en anglais), provoque des tremblements de terre et comporte des risques de pollution, pour un faible potentiel de production énergétique.

"La fracturation hydraulique aura un impact négligeable sur les factures d'énergie, tout en envoyant davantage d'émissions néfastes pour le climat dans l'atmosphère", résume Danny Gross de Friends of the Earth.

Les industriels du secteur eux-mêmes ne sont pas convaincus, jugeant qu'il s'agit avant tout d'une posture politique.

"Je ne pense pas qu'il y ait une chance de fracturation au Royaume-Uni à court terme", parce que la géologie n'est pas adaptée, a ainsi affirmé mercredi au quotidien Guardian Chris Cornelius, fondateur de la société britannique Cuadrilla, qui était la seule à avoir un projet de forage en cours dans le pays avant le moratoire.

Revirement

L'opposition travailliste a dénoncé jeudi au Parlement un revirement des conservateurs, qui avaient promis dans leur manifeste électoral de 2019 qu'ils ne "soutiendraient pas la fracturation hydraulique à moins que la science ne montre catégoriquement qu'elle peut être effectuée en toute sécurité".

L'annonce de jeudi "montre que (les Britanniques) ne peuvent jamais croire un mot de ce gouvernement", a tancé Ed Miliband, responsable du changement climatique au Parti travailliste.

"Il est important que nous utilisions toutes les sources de carburant disponibles dans ce pays", a rétorqué le ministre de l'Energie et des Entreprises Jacob Rees-Mogg, jugeant qu'il était préférable de ne pas dépendre de "dictatures" et plus écologique d'utiliser le gaz produit localement que de l'importer.

La fracturation hydraulique consiste à extraire du pétrole et des gaz emprisonnés dans le sous-sol en injectant des fluides à forte pression pour fracturer les roches. L'industrie s'est beaucoup développée dans les années 2000 et 2010 aux Etats-Unis, devenus en 2014 le premier producteur pétrolier mondial.

Pourtant, la Californie a annoncé l'an dernier interdire la fracturation hydraulique à partir de 2024, alors que son coût environnemental et sanitaire est de mieux en mieux documenté, entre secousses sismiques et pollution de l'air et de l'eau près des exploitations.

« Priorité absolue »

Un rapport sur l'extraction de gaz de schiste, commandé plus tôt cette année par le gouvernement britannique et publié jeudi, relève que "la prévision de l'occurrence de grands tremblements de terre et de leur ampleur attendue est complexe et reste un défi scientifique".

"Il existe de nouvelles méthodes (...) qui pourraient aider à gérer le risque d'activité sismique" mais "des travaux supplémentaires sont nécessaires", selon le British Geological Survey (BGS), un institut britannique d'études géologiques, dans un communiqué.

Liz Truss avait annoncé au début du mois, juste après son entrée en fonction, son intention de lever l'interdiction de la fracturation hydraulique, mais aussi de réexaminer la trajectoire du pays vers la neutralité carbone - sans toutefois remettre en cause l'objectif de l'atteindre d'ici 2050.

Si la stratégie du précédent gouvernement prévoyait déjà une relance de l'exploration en mer du Nord, la sécurité énergétique ayant éclipsé l'urgence climatique depuis l'invasion de l'Ukraine par la Russie, le gouvernement de Mme Truss met les bouchées doubles.

"La sécurité énergétique est une priorité absolue" fait valoir Jacob Rees-Mogg, assurant vouloir "faire en sorte que le Royaume-Uni soit un exportateur net d'énergie d'ici 2040".

Le gouvernement britannique a ainsi confirmé jeudi que 100 nouvelles licences d'exploration et forage en mer du Nord seraient accordées. Le processus d'attribution doit être lancé dès le début du mois d'octobre.

Commentaires

tep

Ah, le pragmatisme anglais..
En attendant en France, pour se protéger de l'exploitation des vilains gaz de schiste, on en a non seulement interdit l'exploitation, mais même l'évaluation des réserves !!

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