L'OPEP peine à trouver un accord sur une baisse de production

  • AFP
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Les pays de l'OPEP ont bouclé jeudi à Vienne une première journée de discussions sans parvenir à s'entendre sur les modalités d'une baisse de production fébrilement attendue par les marchés pour enrayer la chute des cours du pétrole mais redoutée par le président américain Donald Trump.

Après plusieurs heures de discussions entre les membres de l'Organisation des pays exportateurs de pétrole, le ministre saoudien de l'Énergie, Khaled al-Faleh, a créé la surprise en exprimant ses doutes sur la possibilité même d'un accord final alors qu'une nouvelle rencontre aura lieu vendredi. "Non, je ne suis pas confiant", a dit le ministre, précisant que les négociations butaient sur la répartition des quotas de baisse de production entre les quatorze pays de l'organisation.

Fait rare pour ce rendez-vous semestriel au siège de l'OPEP, la conférence de presse programmée à l'issue de la rencontre de jeudi a été annulée. Une autre rencontre est prévue vendredi à Vienne entre les pays de l'OPEP et leurs alliés, au premier rang desquels la Russie. Les deux ensembles pèsent plus de la moitié de la production mondiale de brut. "Nous espérons qu'un accord pourra être trouvé demain", a déclaré le ministre irakien du Pétrole Thamer al-Ghadbane.

Jeu d'équilibriste

L'OPEP cherche à contrebalancer la chute des cours, qui ont accusé un recul de 30% ces deux derniers mois, mais doit s'accorder sur le volume de cette réduction et sur la clé de répartition de l'effort. "Nous recherchons une baisse suffisante pour équilibrer le marché", avait souligné le ministre saoudien, poids lourd de l'organisation, avant le début de cette réunion cruciale.

M. al-Faleh a plaidé pour une baisse de production d'"un million de barils par jour". Mais ce niveau, inférieur aux attentes des marchés, a provoqué une nouvelle chute des cours dans les échanges européens, le baril de Brent passant même passagèrement sous les 60 dollars. "L'Arabie saoudite a suggéré une baisse de la production plus faible que ce que le consensus estimait", a expliqué David Madden, analyste pour CMC Markets.

Alors que Riyad est contraint à un délicat jeu d'équilibriste vis-à-vis de son allié américain, le ministre saoudien a assuré ne pas vouloir se laisser dicter sa conduite. Washington "n'est pas en position de nous dire ce que nous devons faire", a-t-il estimé devant la presse, ajoutant: "Je n'ai besoin de la permission de personne pour diminuer" la production.

Le président américain Donald Trump avait exhorté mercredi dans un tweet l'OPEP à "maintenir sa production en l'état" afin de ne pas mécontenter les consommateurs. L'organisation a produit 32,99 millions de barils par jour en octobre, selon l'Agence internationale de l'énergie.

Tout en se disant opposé à une baisse de la production de son propre pays en raison des sanctions américaines, le ministre iranien du Pétrole, Bijan Namdar Zanganeh, a lui aussi ironisé jeudi sur le tweet de M. Trump. "C'est la première fois qu'un président des États-Unis dit à l'OPEP ce qu'elle doit faire", a-t-il relevé. Le ministre a estimé que la plupart des pays de l'OPEP visaient un prix du brut compris "entre 60 et 70 dollars".

Rôle de la Russie

L'ampleur de la baisse de l'offre qui pourrait être annoncée à l'issue des discussions dépend aussi de l'effort que consentira la Russie avec laquelle l'OPEP est liée depuis fin 2016 par un accord de limitation de production.

Le ministre russe de l'Énergie, Alexandre Novak, qui doit assister à la réunion de vendredi à Vienne, a souligné jeudi à Saint-Pétersbourg que son pays suivait "la situation réelle et l'évaluation réelle du marché". Mais il a rappelé qu'en plein hiver, les "conditions climatiques" russes rendaient "beaucoup plus difficile de réduire (la production) que pour d'autres pays", laissant entendre qu'un éventuel effort de Moscou ne pourrait intervenir que plus tard. Pour les analystes de Commerzbank, "la Russie aura un rôle clé à jouer dans ce contexte".

Mercredi, la firme de courtage londonienne PVM avait estimé qu'une absence de baisse de production déclencherait "une frénésie de ventes dans des proportions bibliques et garantirait le retour à une surabondance mondiale de pétrole".

Mais la marge de manoeuvre de l'OPEP est d'autant plus réduite que les Saoudiens peuvent difficilement se permettre de s'aliéner le président américain après l'indignation internationale suscitée par l'assassinat du journaliste Jamal Khashoggi au consulat d'Arabie saoudite à Istanbul.

En juin, les producteurs avaient assoupli leur discipline avec pour objectif de permettre à la Russie et à l'Arabie saoudite d'extraire davantage pour compenser les pertes prévues de barils iraniens en raison du rétablissement des sanctions américaines.

Mais les exemptions accordées au dernier moment par les États-Unis à huit pays importateurs, à des niveaux plus élevés que ne l'attendait le marché, ont contribué au plongeon des prix de ces deux derniers mois, effaçant les gains engrangés depuis début 2017.

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