Nucléaire : « toujours pas de progrès » dans les discussions avec l'Iran selon le directeur de l'AIEA

  • AFP
  • parue le

L'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) a réitéré, dans un rapport consulté jeudi par l'AFP, sa "vive inquiétude" sur l'absence d'avancées dans les discussions avec l'Iran sur la question de trois sites non déclarés.

"Il n'y a toujours pas eu de progrès", déplore le directeur général Rafael Grossi, qui note cependant la proposition de Téhéran de recevoir des responsables de l'instance onusienne "d'ici fin novembre".

Il attend à cette occasion des "clarifications" dans ce dossier de traces d'uranium enrichi retrouvées par le passé en divers endroits, afin de "pouvoir garantir que le programme nucléaire iranien est exclusivement pacifique".

L'Agence réclame de nouveau des "explications techniquement crédibles" de l'Iran, "y compris l'accès aux sites et au matériel, ainsi que la collecte d'échantillons", souligne le document - confidentiel à ce stade, préparé en amont du Conseil des gouverneurs prévu en milieu de semaine prochaine à Vienne, où siège l'AIEA.

Les deux parties ont repris contact le 7 novembre, l'Iran ayant envoyé une délégation en Autriche.

Un diplomate européen a ironisé sur ce calendrier: "avant chaque conseil, Téhéran fait un geste" pour éviter le vote d'une résolution critique au moment du Conseil, a-t-il dit, tout en espérant que la visite annoncée marque un nouveau "départ".

Ce dossier est un des principaux points sur lesquels butent les négociations qui ont démarré en avril 2021 à Vienne pour ranimer l'accord de 2015, torpillé trois ans plus tard par l'ancien président américain Donald Trump.

Téhéran réclame en effet une clôture de l'enquête de l'AIEA pour parvenir à un compromis avec ses interlocuteurs directs (Allemagne, France, Grande-Bretagne, Chine et Russie), tandis que les Etats-Unis y participent indirectement.

"Incertitude" grandissante

Après des signaux positifs en août, les pourparlers sont désormais au point mort.

Le pacte de 2015, connu sous son acronyme anglais JCPOA, vise à empêcher l'Iran de se doter de l'arme atomique - un objectif qu'il a toujours nié poursuivre.

Mais à la suite du retrait des Etats-Unis et du rétablissement des sanctions américaines qui étouffent son économie, Téhéran s'est progressivement affranchi de ses obligations.

Dans un rapport séparé, l'AIEA fait état de stocks d'uranium enrichi accumulés de 3.673,7 kgs à la date du 22 octobre, un total inférieur de 267,2 kgs comparé au mois d'août mais bien supérieur au plafond de 202,8 kilos auquel la République islamique s'était engagée en 2015.

Surtout l'Iran enrichit toujours plus à des niveaux élevés, loin de la limite fixée à 3,67%: il dispose ainsi de 386,4 kgs à 20% (contre 331,9 kgs auparavant) et de 62,3 kgs à 60% (contre 55,6 kgs), seuil proche des 90% nécessaires à l'élaboration d'une bombe.

Cette montée en puissance se produit alors que l'AIEA est confrontée depuis près de deux ans à une nette restriction de ses inspections sur place.

Du fait de cette situation, il faudra à l'instance onusienne environ "quatre mois", selon le même diplomate, pour reconstituer le puzzle des activités si l'accès est rétabli, en cas d'accord entre Téhéran et les grandes puissances.

"Plus cette situation persiste, plus l'incertitude grandit", avertit l'AIEA.

Fin octobre, le chef de la diplomatie américaine, Antony Blinken, avait dit avoir peu d'espoir quant à une issue rapide des discussions, invoquant les conditions préalables exigées par Téhéran.

Une reprise du dialogue semble d'autant plus difficile que l'Iran est secoué par une contestation populaire inédite depuis plusieurs années après la mort le 16 septembre d'une jeune femme de 22 ans, Mahsa Amini, décédée après son arrestation par la police des moeurs.

Ajouter un commentaire