Nucléaire : Washington et Paris mettent la pression sur le nouveau président iranien

  • AFP
  • parue le

Les États-Unis et la France ont averti vendredi l'Iran que le temps pressait pour sauver l'accord sur son programme nucléaire et qu'il devait prendre des décisions "difficiles" sans plus tarder, s'attirant une réplique immédiate de Téhéran.

Une semaine après l'élection de l'ultra-conservateur Ebrahim Raïssi à la présidence de l'Iran, le chef de la diplomatie américaine Antony Blinken, en visite à Paris, a affirmé qu'il serait "très difficile" pour les États-Unis de retourner dans l'accord ("JCPOA") si les négociations devaient s'éterniser. "Il arrivera un moment où, oui, il sera très difficile de revenir aux standards établis par le JCPOA", a-t-il déclaré, lors d'une conférence de presse commune avec son homologue français Jean-Yves le Drian, sans donner toutefois de date butoir.

Si l'Iran "continue à faire tourner plus de centrifugeuses sophistiquées" et à accélérer son programme d'enrichissement, il se rapprochera dangereusement du moment ("breakout time") où il aura la capacité de fabriquer la bombe, a souligné le secrétaire d'État.

Le chef de la diplomatie française, dont le pays est cosignataire de l'accord avec l'Allemagne, le Royaume-Uni, la Russie et la Chine, a aussi exhorté Téhéran à faire un pas décisif en faveur d'un sauvetage du JCPOA. "Nous attendons des autorités iraniennes qu'elles prennent les dernières décisions, sans doute difficiles, qui permettront de conclure", a-t-il dit. "On arrive au terme du processus. On arrive dans la phase dure" qui "supposera des décisions courageuses et fortes", a-t-il martelé, tout en faisant part d'un "optimisme modéré mais d'un optimisme quand même".

« Importance vitale »

L'Iran, qui réclame une levée des sanctions américaines avant tout réengagement de sa part, n'a pas tardé à riposter : le sort de l'accord dépend avant tout d'une "décision" des "parties adverses", a asséné vendredi soir le porte-parole de la diplomatie iranienne, Saïd Khatibzadeh.

Les inquiétudes sont encore montées d'un cran avec l'expiration vendredi d'un arrangement temporaire entre l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) et Téhéran sur les inspections nucléaires. L'Iran avait restreint en février l'accès des inspecteurs et refuse depuis cette date de fournir en temps réel les enregistrements de caméras et autres outils.

Mais l'AIEA avait à l'époque négocié un compromis de trois mois avec Téhéran pour garantir que l'Iran conserverait ces enregistrements et les lui remettrait quand les États-Unis lèveraient leurs sanctions. Cet accord avait été prolongé en mai jusqu'au 24 juin.

Le directeur général de l'AIEA, Rafael Grossi, a informé le Conseil des gouverneurs que "l'Iran n'avait pas répondu à sa lettre". Il a insisté sur "l'importance vitale" de poursuivre ce travail de surveillance. "L'enregistrement des données... ne devrait pas être considéré comme une obligation" de l'Iran vis-à-vis de l'AIEA, a tweeté vendredi l'ambassadeur iranien auprès de l'AIEA Kazem Gharib Abadi. Il s'agissait d'une simple "décision politique de l'Iran", a-t-il ajouté.

Le JCPOA offre à l'Iran un allègement des sanctions occidentales et onusiennes en échange de son engagement à ne jamais se doter de l'arme atomique, et d'une réduction drastique de son programme nucléaire, placé sous un strict contrôle de l'ONU. Mais cet accord a été torpillé en 2018 par la décision de l'ex-président américain Donald Trump de s'en retirer et de rétablir les sanctions américaines. En riposte, l'Iran a renoncé à une partie de ses engagements.

À son arrivée à la Maison Blanche en janvier, Joe Biden a annoncé son intention d'y revenir et des négociations ont repris en avril dans la capitale autrichienne.

« Bienvenue chez toi ! »

Vendredi, la France et les Etats-Unis ont aussi affiché leur volonté de faire pression ensemble sur la classe politique libanaise afin de sortir le pays de la crise économique et financière sans précédent dans laquelle il est englué. "Nous constatons ensemble le drame que serait que ce pays se fissure, disparaisse", a résumé M. Le Drian.

Le président Emmanuel Macron s'est fortement impliqué, jusqu'ici sans succès, pour obtenir la formation d'un gouvernement susceptible de mettre en œuvre les réformes réclamées par la communauté internationale en échange de nouvelles aides.

Les deux ministres ont par ailleurs affiché leur plaisir à se retrouver à Paris et à échanger en français, Antony Blinken, qui a vécu une partie de sa jeunesse dans la capitale française, étant un parfait francophone. "Ici, tu es un peu chez toi. Je serais tenté de dire : bienvenue chez toi !", lui a lancé Jean-Yves Le Drian. Permettez-moi de dire à quel point je suis content de me retrouver en France, une deuxième patrie pour moi", a répondu son homologue.

Ajouter un commentaire

CAPTCHA
Image CAPTCHA
Saisir les caractères affichés dans l'image.