Ouganda : un rapport dénonce le « soutien » de l'État français aux projets de Total

  • AFP
  • parue le

L'État français met "tous ses moyens au service de Total" pour son gigantesque projet pétrolier controversé en Ouganda, "en totale contradiction avec les discours en faveur des droits humains et du climat" de Paris, accusent jeudi plusieurs associations. 

Dans leur rapport, les associations Les Amis de la Terre France, l'Observatoire des multinationales et Survie rappellent "les impacts dévastateurs sur les droits humains et l'environnement des projets Tilenga (extraction pétrolière) et EACOP (oléoduc géant) de Total en Ouganda et Tanzanie". Or, accusent-elles, "il n'y a pas que la major pétrolière qui ne tient aucunement compte des nombreuses alertes de la société civile et des scientifiques".

"En effet, l'État français, en totale contradiction avec ses discours en faveur des droits humains et du climat, met tous ses moyens au service de Total pour que ces projets néfastes aboutissent", ajoutent-elles. Ces projets "font l'objet d'une vive résistance de la part des populations locales" et "ont été dénoncés par quatre rapporteurs spéciaux de l'ONU", notent-elles.

"Des institutions publiques (Élysée, ministère des Affaires étrangères, ambassade de France en Ouganda, BpiFrance, Agence française de développement, Caisse des dépôts et consignations, Agence des participations de l'Etat, armée), censées représenter et défendre l'intérêt général, sont dévoyées au profit du pétrole et des intérêts privés d'une multinationale", écrivent les associations.

"En mai 2021, Emmanuel Macron a écrit au président Yoweri Museveni pour le féliciter de sa réélection et affirmer son souhait que les projets pétroliers de Total, et notamment l'oléoduc EACOP, voient rapidement le jour", dénonce le rapport.

Le rapport dénonce aussi "la proximité" de l'ambassadeur de France à Kampala Jules-Armand Aniambossou, en poste depuis 2019, avec le groupe pétrolier, et "l'omniprésence" de Total au sein de la communauté française en Ouganda.

Total "débauche d'anciens hauts fonctionnaires et responsables politiques, ou bien au contraire encourage ses cadres à retourner dans la fonction publique, avec pour résultat d'entretenir la confusion entre les intérêts de Total et de ses actionnaires et ceux de la France", critique dans le communiqué Olivier Petitjean, de l'Observatoire des multinationales.

Le rapport fustige une "machinerie des portes tournantes", dénonçant "des allers-retours de hauts fonctionnaires entre Total et différents ministères et institutions-clés" et cite les noms de plusieurs personnes.

"Alors qu'en Ouganda, la répression de la société civile et des voix dissidentes est de plus en plus forte, le gouvernement français n'hésite pas à développer sa coopération militaire avec le régime autoritaire ougandais", fustige aussi Thomas Bart, de Survie.

Le régime ougandais "a annoncé le déploiement de nouveaux contingents militaires pour +protéger+ les futures installations pétrolières; sur place, ces forces sont utilisées pour faire taire toute opposition au projet de Total", dénonce-t-il.

Interrogé par l'AFP, un porte-parole de TotalEnergies a indiqué que le groupe prendra "tout le temps nécessaire pour étudier ce rapport" et qu'il se réservait "le droit d'y répondre par le moyen le plus approprié".

"TotalEnergies rejette l'idée selon laquelle il existe une +confusion entre les intérêts publics et ceux de l'entreprise+ et "rappelle" qu'il est "à la fois normal et légitime d'attirer les meilleurs talents, d'où qu'ils viennent", a ajouté le porte-parole. "TotalEnergies rappelle qu'il considère le dialogue avec ses parties prenantes comme une dimension essentielle de la conduite responsable de ses activités", a poursuivi le porte-parole.

Sollicité par l'AFP, le ministère français des Affaires étrangères n'a pas fait connaître sa réaction dans l'immédiat.

Commentaires

Renzo Bee

Pourquoi faut il écouter ces ONG ? Quelle légitimité ont elles ?
Faut il rappeler que c'est l'Etat Ougandais qui est demandeur et qui decide de quoi et avec qui (rappelons le fameux sujet de la raffinerie). Rappelons que Total est ici associé au chinois CNOOC, et je ne vois aucune charge des ONG contre CNOOC, une asymétrie suspecte de charge contre TotalEnergies.
L'UE a commandité une grande étude pour savoir comment passer la cuisson au gaz et stopper la deforestation,(30 million de tonnes de bois par an), en utilisant les champs qui seront développés par CNOOC et TOTAL.
Croit on vraiment que l'Ouganda ne va pas se servir de ses gisements pétroliers pour améliorer le sort des 60 millions d'Ougandais ? Autant que cela soit avec TOTAL et non 100% chinois.
Assez peu rigoureux et intelligent de relayer des rapports faits par des ONG sans transparence sur leurs bailleurs.
Je considère cet activisme comme négatif pour les populations.

Lecteur 27

L'outrance du vocabulaire utilisé par ces ONG est ridicule. Leur seule excuse est leur ignorance des choses de ce monde et du fonctionnement de celui-ci. Le temps où on pouvait les écouter, quand elles alertaient sur quelques-uns de dangers qui menaçaient notre avenir, est bien loin. Maintenant que le monde -- en tout cas certains de ses grands acteurs (une grosse poignée d'Etats et quoi que les ONG en disent, un grand nombre d'entreprises internationales - car si celles ci n'ont pas de pouvoir réglementaire, elles ont plus de moyens techniques que les Etats pour agir dans le bon sens), ont compris la nécessité d'une ré-orientation de l'action collective, les ONG ont changé de nature et de stratégie. Elles ont en fait les mêmes problèmes que les entreprises quand celles-ci perdent le monopole de leur brevet, de leur produits ou leurs services et qu'elles sont copiées par tous leurs concurrents ... Ce sont les entreprises qui maintenalt les concurrences en s'engageant maintenant dans des développements plus intelligents qu'hier, rendant le discours de ces ONG quasiment inutile. Elles veulent à exister et survivre, donc continuer à trouver des ressources financières: il s'agit là aujourd'hui sans doute du moteur principal de ces ONG - et elles sont obligées, d'aller dans l'outrance pour tenter de continuer à exister. Quand allons nous être capables de mettre à jour publiquement leur stratégie de destruction qu'elles mènent même maintenant avec, ici et là, le concours des institutions judiciaires qui se perdent parfois en chemin ? En tout cas, ce n'est pas en leur donnant la parole comme c'est le cas tous les jours dans les médias en quête, justement, d'outrance et de buzz. Comme si les quelques rares projets qui sont, en matière pétrolière, sur le point d'être lancés par les gouvernements et l'industrie devaient être arrêtés brusquement ? Il faut gérer la décroissance --inélucatble-- des énergies fossiles et quoi qu'en pensent stupidement ces ONG, il ne faut pas stopper tout ça d'un seul coup, sauf à organiser le malheur du Monde. Quant aux accusations portées en direction de l'Etat français et de ses fonctionnaires qui auraient comploté, avec l'industrie, pour lancer le projet, elles sont immensément ridicules. Ces ONG ne reculeront jamais devant aucune outrance et stupidité. Quand cesserons nous de donner de l'importance à leur papiers (pompeusement qualifiées d'études) et qui ne sont souvent qu'un ramassis d'à peu près, de vagues raisonnements et mensonges auxquels seule l'outrance donne un peu de poids ?

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