Royaume-Uni: l'industrie nucléaire renaissante confrontée à des vents contraires

  • AFP
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Avec plusieurs projets dans ses tuyaux, l'industrie nucléaire compte rester une source majeure d'électricité au Royaume-Uni mais doit affronter la concurrence d'une énergie éolienne en plein essor.

Le français Areva, le chinois CGN, le japonais Hitachi, l'américain Westinghouse: plusieurs fabricants étrangers de réacteurs ont envoyé leurs représentants à une conférence sur l'industrie nucléaire mondiale à Londres ces derniers jours. Une occasion pour ces grands noms de promouvoir leur technologie, mais aussi d'évoquer leurs projets au Royaume-Uni où le secteur cherche à renaître. "L'énergie nucléaire doit fait partie du mix électrique. Personne ne dit qu'il faut tout alimenter au nucléaire mais il doit avoir sa place", explique à l'AFP Tom Greatrex, le directeur de l'Association de l'industrie nucléaire britannique.

Mis en service à partir de la fin des années 1950, les réacteurs britanniques arrivent en fin de vie et, de la quinzaine encore opérationnels, un seul fonctionnera en 2030. Depuis des années, les autorités travaillent avec des industriels pour renouveler ce parc, Londres voulant multiplier les sources d'énergie face à la hausse de la consommation et conjurer le spectre du black-out. Résultat, plusieurs grands projets plus ou moins avancés sont sur la table.

Porté par EDF associé à CGN, Hinkley Point C est le seul où les travaux ont commencé, afin de construire deux réacteurs EPR d'ici la moitié de la prochaine décennie dans le Somerset (sud-ouest de l'Angleterre). Lancé après dix ans de préparation, c'est le premier chantier du genre depuis une génération mais la technologie EPR n'est pas encore éprouvée et les travaux vont entraîner retards et surcoûts. EDF envisage en outre une petite soeur pour Hinkley à Sizewell dans le Suffolk (est), tandis que CGN voudrait faire homologuer sa technologie maison pour une centrale dans l'Essex (est).

A Moorside en Cumbrie (nord-ouest), la construction prévue de trois réacteurs pourrait prendre du retard du fait du désengagement attendu de l'industriel japonais Toshiba, en grande difficulté. Le fournisseur de la technologie des réacteurs, Westinghouse, est malgré tout optimiste.

"Le gouvernement britannique est porteur d'une belle vision, ce qui n'est pas le cas d'autres pays" en Europe, a expliqué le PDG du fabricant américain, José Gutiérrez, pendant la conférence. L'Allemagne a notamment tourné le dos au nucléaire depuis l'accident de Fukushima au Japon en 2011.

Leader de l'éolien offshore

Un autre industriel japonais, Hitachi, porte d'ailleurs un projet distinct à Wylfa (Pays de Galles) et met la dernière main à l'homologation de son réacteur. "Le Royaume-Uni est le meilleur endroit au monde pour le nucléaire car il ne suscite pas d'importante polémique politique", assure David Powell, un responsable européen de Hitachi.

Au final, si ces initiatives aboutissent le nucléaire maintiendra sa part de 21% dans la production d'électricité du pays, contre 42% pour le gaz, 9% pour le charbon et 24% pour les énergies renouvelables. Mais le nucléaire qui suscite dans le monde entier scepticisme et méfiance de l'opinion fait face à des soucis spécifiques au Royaume-Uni.

L'industrie doit s'y préparer au Brexit qui vera le pays quitter Euratom, régulateur européen du secteur, avec des risques d'assèchement de main d'oeuvre qualifiée et de complications administratives. L'énergie atomique est en outre accusée d'être trop chère, a fortiori depuis la confirmation de projets de fermes éoliennes offshore qui devraient fournir du courant moins cher que Hinkley Point C - même si les autorités contestent toute comparaison hâtive.

M. Greatrex objecte que le tarif électrique moyen de l'ensemble du parc éolien reste supérieur à celui de Hinkley, et que les prochaines centrales nucléaires produiront moins cher grâce à l'expérience tirée du vaste chantier d'EDF. "Contrairement à l'éolien, le nucléaire fournit une énergie constante et constamment disponible, quel que soit le temps", met-il aussi en exergue.

Reste qu'avec 11% de la production d'électricité, l'énergie éolienne sur terre et sur mer représente une concurrence redoutable parmi les énergies non-émettrices de carbone - a fortiori pour l'offshore dont le Royaume-Uni est le leader mondial avec un gros tiers des capacités mondiales, d'après le Global Wind Energy Council. Parmi les projets venteux confirmés, celui du danois Dong Energy au large du Yorkshire (nord-est), Hornsea, vise à lancer la plus vaste ferme éolienne au monde d'ici 2023.

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