COP21 : la Tunisie dévoile ses plans

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La Tunisie ambitionne d’éviter l’émission de 207 millions de tonnes équivalent CO2 sur la période 2015-2030 par rapport au scénario tendancielle. Ici, vue du désert près de Tozeur. (©photo) 

Les Nations Unies ont publié mercredi la contribution de la Tunisie dans le cadre de la COP21 de Paris (30 novembre-11 décembre 2015). Focus sur la situation énergétique de ce pays qui est souvent moins mise en lumière que celle de ses voisins du Maghreb, l’Algérie (1er producteur de gaz africain) et le Maroc (hôte de la future COP22).

Un objectif en matière d’intensité carbone

Dans sa contribution nationale, la Tunisie annonce vouloir baisser son intensité carbone, c’est-à-dire ses émissions de gaz à effet de serre (GES) par point de PIB(1), de 41% d’ici à 2030 par rapport au niveau de 2010. Il est précisé que les trois quarts de cet effort doivent provenir du secteur de l’énergie (dont l’intensité carbone baisserait de 46% sur la période considérée).

L’annonce d’une réduction de l’intensité carbone masque le fait que les émissions de GES de la Tunisie vont, si le pays atteint cet objectif(2), augmenter de près de 50% d’ici à 2030 (42,4 millions de tonnes équivalent CO2 contre 28,3 en 2010). Il est toutefois reconnu par les Nations Unies que la lutte contre le changement climatique ne doit pas entraver le développement économique des pays en voie de développement qui ne portent pas de « responsabilité historique » comme c’est le cas des pays développés.

La Tunisie rappelle d’ailleurs qu’elle ne compte que pour 0,07% des émissions mondiales de GES en 2010. Rapportées à la population (11 millions d’habitants en 2014), ses émissions restent près de deux fois inférieures à la moyenne mondiale(3).

Quid du secteur énergétique ?

Le gaz naturel satisfait 51% des besoins énergétiques de la Tunisie selon les dernières données de l’ONU portant sur l’année 2012. Le mix énergétique tunisien est très carboné, compte tenu de la part également importante du pétrole (37,2%). Les importations tunisiennes d’énergie (essentiellement du gaz naturel provenant d’Algérie) ont augmenté de plus de 125% entre 1990 et 2012. Elles atteignent désormais un niveau proche de celui de la production énergétique de la Tunisie sur son sol.

Tunis ambitionne de réduire la consommation nationale d’énergie primaire de 30% à l’horizon 2030 par rapport au scénario tendanciel (le taux de croissance démographique s’est ralenti aux alentours de 1% par an au cours de la dernière décennie). Pour y parvenir, des efforts particuliers seront portés sur les mesures d’efficacité énergétique.

Le pays souhaite par ailleurs développer les énergies renouvelables et porter leur part (éolien, solaire photovoltaïque et thermodynamique) dans son mix de production électrique à 14% en 2020 et 30% en 2030 contre seulement 4% en 2015. Cet objectif doit notamment être atteint grâce à la mise en œuvre du Plan Solaire Tunisien(4) et permettre de réduire le recours aux centrales à gaz qui ont fourni presque 95% de l’électricité nationale en 2014. La Tunisie compte par ailleurs tripler la contribution énergétique du solaire thermique d'ici à 2030 (objectif de 220 m2 de capteurs solaires installés pour 1 000 habitants contre 73 en 2015).

Un appui international nécessaire

La Tunisie précise qu’elle baissera « de manière inconditionnelle » son intensité carbone de 13% et nécessite par ailleurs (pour les 28% restants) le soutien de la communauté internationale, principalement sous forme de financements, d’aide à la formation et de transferts technologiques. L’ensemble des besoins financiers pour mettre en œuvre sa contribution avoisine, selon les estimations tunisiennes, 18 milliards de dollars dont près de 7,9 milliards devraient être consacrés aux énergies renouvelables et 7 milliards aux mesures d’efficacité énergétique.

Précisons que la lutte contre les dérèglements climatiques constitue un enjeu sensible pour la Tunisie qui est déjà en situation de stress hydrique(5) et craint une augmentation de la température annuelle du pays de 2,1°C d’ici à 2050. Cette problématique climatique figure d'ailleurs dans la nouvelle constitution adoptée par la Tunisie(6) en janvier 2014.

Sources / Notes

(1) A valeur constante 2005.
(2) Elles seraient multipliées par 2,4 entre 2010 et 2030 selon le scénario de référence (sans engagement spécifique).
(3) En 2012, les émissions tunisiennes par habitant sont de 2,33 tonnes d'équivalent CO2 contre 4,51 tonnes en moyenne dans le monde.
(4) Plan Solaire Tunisien, Agence nationale pour la maîtrise de l’énergie 
(5) Disponibilité de ressources renouvelables d’eau de l’ordre de 385 m3 par an par habitant.
(6) L’État s’y engageant à l'article 44 à « garantir un environnement sain et équilibré et participer à l’intégrité du climat en fournissant les moyens nécessaires ».

Situation énergétique de la Tunisie, ONU

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