Éolien : 10 000 MW en France, ça veut dire quoi ?

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Parc éolien de Fruges

Présentation de la structure de fixation d'une pale d'éolienne sur le parc de Fruges, le plus puissant en France. (©EDF-Jean-Lionel Dias)

Le Syndicat des énergies renouvelables (SER) a annoncé samedi que la France avait franchi le cap des 10 000 MW éoliens raccordés au réseau électrique national. Cette donnée témoigne d’une reprise de la croissance de l’éolien depuis l’an dernier. Nous vous proposons quelques rappels utiles à cette occasion.

Puissance et production : les chiffres clés de l’éolien en France

Les 10 000 MW (ou 10 GW) éoliens dont il est question désignent la puissance du parc éolien français raccordé au réseau électrique. Cette donnée est fréquemment communiquée pour témoigner du développement de ce parc. Selon le SER, le rythme de croissance de l’éolien a véritablement repris en 2014 (avec 1 173 MW raccordés cette année-là, soit un niveau proche du record de 2010), notamment grâce à une simplification des démarches administratives et à une sécurisation du tarif d’achat éolien. Pour rappel, la France s'est fixé comme objectif en 2009 d'atteindre une puissance éolienne installée de 19 000 MW sur son territoire à l'horizon 2020. 

La puissance ne constitue toutefois pas une donnée suffisante pour témoigner du poids de l’éolien. In fine, c’est bien les données de production qu’il convient de prendre en compte puisqu’elles témoignent de l’énergie réellement disponible. Or, un MW éolien ne produit pas la même quantité d’énergie qu’un mégawatt photovoltaïque ou nucléaire, de même qu’un mégawatt éolien a une production différente selon sa localisation et son niveau d’utilisation.

Le facteur de charge permet de mesurer le ratio entre l’énergie produite par une unité de production électrique et l’énergie qu’elle aurait pu produire si elle fonctionnait en permanence à sa puissance maximale. En France, le facteur de charge de l’éolien terrestre avoisine 23% en 2014 (14% pour le photovoltaïque, 75% pour le nucléaire)(1). Pour rappel, le parc éolien français a généré 17 TWh en 2014, soit environ 3,1% de l’électricité totale produite dans l’hexagone (540,6 TWh en 2014 dont 77% d’origine nucléaire). La production éolienne étant par nature intermittente, elle nécessite le développement de solutions de stockage et de « smart grids ».

Illustration : l’exemple du 3e parc éolien de France

Prenons le cas du parc éolien de Seine-Rive-Gauche Nord qui vient d’être inauguré dans l’Aube. Avec ses 75 MW installés, il s’agit du 3e plus important parc éolien en France en matière de capacité. Il est prévu par l’exploitant H2air(2) qu’il produise près de 183 000 MWh par an : cela signifie que les éoliennes vont produire de l’électricité l’équivalent de 2 440 heures par an à leur pleine puissance (sur 8 760 heures). Le facteur de charge attendu du parc est donc de 27,9%.

Lorsque des données de production sont communiquées, ces dernières sont parfois comparées de façon incomplète à la seule consommation électrique des foyers français « hors chauffage ». Dans le cas du parc de Seine-Rive-Gauche Nord, la production annuelle de 183 000 MWh pourrait ainsi, selon l’exploitant, satisfaire les besoins électriques de 46 000 foyers hors chauffage.

Or, près de deux tiers de la consommation d’énergie du secteur résidentiel est consacrée au chauffage selon l’Ademe(3). La consommation électrique d’un foyer chauffé à l’électricité (cas d’environ 35% des résidences principales en France(4)) est ainsi environ 3 fois celle d’un foyer « hors chauffage ». Rappelons par ailleurs que la consommation électrique française par habitant (de l’ordre de 7 MWh par an)(5) constitue une donnée plus significative pour mesurer l’impact réel d’une unité de production électrique à l’échelle nationale : 183 000 MWh correspondent sur cette base à la consommation électrique d’un peu plus de 26 000 personnes.

Répartition des éoliennes en France

En France, quatre régions disposent de la moitié de la puissance éolienne nationale :

  • la Champagne-Ardenne avec 1682 MW éoliens raccordés à fin juin 2015 (2 765 GWh produits en 2014);
  • la Picardie avec 1 472 MW (2 377 GWh) ;
  • le Centre-Val de Loire avec 885 MW (1 588 GWh);
  • la Bretagne avec 836 MW (1 396 GWh).

Répartition de la puissance éolienne installée en France

Répartition de la puissance éolienne installée en France par région (©Connaissance des Énergies)

La part de l’éolien dans le mix de production électrique des régions français varie fortement d’un territoire à un autre : elle atteint 74% en Picardie mais seulement 7% en Champagne-Ardenne qui dispose de deux centrales nucléaires (Chooz et Nogent-sur-Seine).

Et dans le monde ?

Dans le monde, la puissance éolienne installée a atteint 392 GW installés à fin juin 2015, selon les dernières données de la WWEA (World Wind Energy Association) dévoilées mercredi dernier. Au cours du premier semestre 2015, près de 21,7 GW éoliens ont été installés dans le monde (contre respectivement 13,9 GW et 17,6 GW aux premiers semestres 2013 et 2014). Pour expliquer ce développement plus rapide, la WWEA met en avant la plus grande compétitivité de la filière éolienne, les incertitudes concernant le cours du pétrole et les efforts de lutte contre les émissions de gaz à effet de serre (renforcés dans le cadre de la COP21).

Les capacités éoliennes sont principalement situées en Chine, aux États-Unis et en Allemagne. Notons en revanche que les données de production sont malheureusement rarement communiquées. Selon un rapport de l’AIE de fin 2013 dédié à l’éolien, cette filière fournit environ 2,6% de l’électricité mondiale mais pourrait compter pour 18% dans le mix électrique à l’horizon 2050 selon les projections de développement.

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