La filière photovoltaïque témoigne de son « parcours du combattant »

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Centrale de Belvezet (©Crédit Générale du Solaire)

Centrale de Belvezet (©Crédit Générale du Solaire)

Le think tank France Territoire Solaire souligne, dans une étude mise en ligne le 5 mai(1), les lourdeurs administratives qui ralentissent le développement du solaire photovoltaïque en France. Explications.

Le constat : un retard de développement par rapport aux objectifs de la PPE

En 2020, le solaire photovoltaïque a compté pour 2,5% de la production d’électricité en France métropolitaine (avec une production annuelle de 12,6 TWh) et pour 10,6% du mix électrique renouvelable. « Avec une exploitation nécessitant moins de personnel que d’autres filières, la production des centrales solaires a été peu impactée par la crise sanitaire » selon le gestionnaire de réseau RTE(2).

À fin 2020, la puissance cumulée du parc solaire métropolitain atteignait près de 10,4 GW. La programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) fixe pour la filière un objectif de 20,1 GW de capacités installées à l’horizon 2023, « ce qui supposera le raccordement en moyenne de 3 300 MW/an sur les trois prochaines années », souligne France Territoire Solaire (contre 820 MW installés en 2020).

Or, « le rythme annuel de déploiement ne progresse pas », déplore le think tank : il reste ainsi « 4 fois inférieur au rythme annuel qui serait nécessaire pour atteindre les objectifs prévus par la loi et la programmation pluriannuelle de l’énergie – rythme qui n’a rien d’impossible puisque c’est celui observé en Allemagne ou en Espagne depuis plusieurs années ».

Mix électrique 2020

La cause : « la lourdeur des procédures administratives »

« Le développement d’un projet de centrale solaire au sol requiert aujourd’hui une durée de 4 ans en France, contre à peine plus d’un an en Allemagne », explique France Territoire Solaire. Pour le think tank, la cause est « bien identifiée : la lourdeur des procédures administratives et un goulot d’étranglement au niveau de l’instruction », ce qui renchérit le coût des projets solaires et peut « constituer un obstacle dissuasif pour les acteurs privés qui entreprennent » d’en développer.

La publication de France Territoire Solaire rappelle les différentes étapes (et coûts associés) que doit suivre une centrale solaire au sol pour obtenir un permis de construire « soumis à étude d’impact environnemental et enquête publique ». Les différentes autorisations et procédures dont il peut faire l’objet sont détaillées : « mise en compatibilité des documents d’urbanisme (PLU notamment), autorisation de défrichement, Loi sur l’Eau, dérogation à la protection des espèces protégées (avec avis du Conseil National de Protection de la Nature - CNPN, ou du Conseil scientifique régional du patrimoine naturel - CSRPN), arrêtés ICPE pour un grand nombre de sites dégradés, etc. »

Parcours de développement d'un projet solaire en France

Des recommandations pour clarifier le cadre de développement

France Territoire Solaire estime en conclusion que « les attentes de la puissance publique envers l’énergie solaire n’ont pas été clarifiées : on voudrait qu’elle soit à la fois locale avec de petits projets à faible impact, et la plus compétitive possible en privilégiant les grandes fermes solaires ».

Souhaitant éviter tout « choc de simplification radical mais inapplicable en pratique », France Territoire Solaire présente différentes recommandations concrètes pouvant être mises en œuvre rapidement, entre autres :

  • faire évoluer la qualification des centrales solaires, « en les considérant par principe comme ne relevant pas de l’artificialisation ou de l’urbanisation, mais plutôt comme relevant de l’intérêt général » ;
  • clarifier les échelons décisionnels (« qui doit décider ? ») au sein des services instructeurs ;
  • mettre en place « un système d’instructeur unique par typologie de projet ou par localisation (ou segmentation) afin de gagner en efficacité dans l’instruction et d’assurer une meilleure cohérence entre les avis ».

Il est rappelé qu’en France, « la variable d’ajustement la plus importante reste les volets urbanisme et environnement tandis dans les autres pays européens la majeure partie du processus de développement du projet est consacrée aux enjeux d’acquisition de terrains et d’obtention de l’accès au réseau électrique ». En Allemagne, les projets solaires bénéficient en particulier d’une procédure « plus intégrée qui ne démultiplie pas les contraintes et les interactions avec différents niveaux de gouvernance ». France Territoire Solaire note tout de même une éclaircie au milieu du « parcours du combattant » des porteurs de projets en France, par rapport aux pays voisins : « l’absence de contraintes d’enregistrement lourdes qui impactent le processus de développement, au contraire de l’Italie et de l’Espagne ».

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