L’industrie électrique américaine au défi de la transition bas-carbone

  • Source : Ifri

Aux États-Unis, le Clean Power Plan fait partie des politiques énergétiques et climatiques les plus emblématiques des mandats de Barack Obama. Il vise à réduire les émissions de CO2 du secteur électrique de 32% d’ici à 2030 par rapport à leur niveau de 2005(1). Suite à une bataille juridique entre autres initiée par les compagnies charbonnières(2), l’application de ce plan est actuellement suspendu, sur décision de la Cour suprême en février 2016, jusqu’à « l’épuisement des recours » (a priori pas avant fin 2016 ou début 2017).

Carole Mathieu, chercheuse à l’Ifri, rappelle que la transition bas-carbone américaine ne se résume toutefois pas au Clean Power Clan qui vient « essentiellement prolonger un mouvement » de baisse de l’intensité carbone de la production américaine d’électricité (sur la période 2005-2014, cette production a augmenté de 1% alors que les émissions associées de CO2 ont baissé de 15%). Cette transition pose d’importants enjeux pour le secteur électrique parmi lesquels les modalités d’intégration d’une production décentralisée (photovoltaïque) en pleine croissance et la place des entreprises historiquement responsables de l’approvisionnement électrique, les « utilities ».

Dans cette étude publiée par le Centre Énergie de l’Ifri, Carole Mathieu présente ainsi le paysage morcelé du secteur électrique américain. Elle y souligne les défis que doivent en particulier relever les utilities, acteurs du système de production centralisé qui sont confrontés à une baisse de rentabilité de leurs actifs de production et à un tassement de la consommation d’électricité : la consommation américaine a seulement progressé d’environ 1% par an durant la dernière décennie (l’EIA prévoit une croissance de 0,4% en 2016 et de 1% en 2017) et des programmes de maîtrise de la demande sont actuellement menés dans 24 États.

Le modèle des producteurs historiques d’électricité est également susceptible d’être fragilisé par l’essor des « prosumers » (« consommateurs-producteurs » en anglais) : près de 800 000 foyers et entreprises américaines étaient équipées d’une installation photovoltaïque à fin 2015(3). Dans un pays fortement attaché à la notion de liberté individuelle, la perspective de satisfaire une partie de sa consommation électrique de façon autonome rencontre un large écho. Le « net metering », principal dispositif de soutien au photovoltaïque décentralisé, est en outre très avantageux pour ces « prosumers » : toute l’électricité que ces derniers produisent et dont ils n’ont pas besoin est injectée sur le réseau et déduit de leurs factures (cette électricité est donc rachetée au prix de détail).

Carole Mathieu détaille ainsi les grandes réflexions en cours dans le secteur électrique américain, portant tant sur les réformes du « net metering » aujourd'hui décrié (en vue d'attribuer à la production décentralisée un prix correspondant à sa « valeur réelle » pour le système électrique(4)) que sur les adaptations possibles pour les utilities dans ce nouveau paysage électrique.

Lire l'étude :
Secteur électrique américain

Sources / Notes

  1. Ce secteur compte encore pour plus d’un tiers des émissions américaines de gaz à effet de serre.
  2. Les opposants au Clean Power Plan contestent notamment le fait que les standards d’émissions aient été introduits par l’Agence fédérale de protection de l’environnement (EPA) et n’aient pas fait l’objet d’une action législative (pour contourner l’opposition du Congrès).
  3. Près de 40% de ces consommateurs-producteurs étant situés en Californie.
  4. Notamment à travers un système de « tarification dynamique » dans le temps contribuant à réduire la pointe de demande.

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