Accélération du nucléaire : coup d'envoi des débats au Sénat

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Le Sénat, majoritairement favorable à une relance de l'énergie nucléaire, a débuté mardi l'examen en première lecture du projet de loi d'accélération porté par Agnès Pannier-Runacher, qui vise à favoriser la construction de nouveaux réacteurs.

"En gros, on ne perd pas de temps", a résumé la ministre de la Transition énergétique, précisant que ce texte technique "permettra de ne pas ajouter un délai de deux à trois années à la construction d'un réacteur".

Deuxième volet du triptyque énergie - après un texte dédié aux énergies renouvelables et avant une loi de programmation - il doit permettre de concrétiser la relance d'une politique nucléaire "ambitieuse et durable" amorcée par Emmanuel Macron.

Un objectif partagé par la quasi-totalité des sénateurs, majoritairement de droite, à l'exception du groupe écologiste. Même si, à l'instar du rapporteur LR Daniel Gremillet, ils déplorent que le "gouvernement légifère dans le désordre".

Le président de la République a annoncé son intention de construire six nouveaux réacteurs et souhaité que soient lancées les études pour la construction de huit autres.

Le projet de loi vise à "gagner du temps" en simplifiant les procédures administratives pour la construction de nouvelles installations à proximité de sites nucléaires existants. Cela pour une durée limitée à 15 ans dans le texte initial, portée à 20 ans par les sénateurs en commission.

Concrètement, les sites seront dispensés d'autorisation d'urbanisme car le contrôle de conformité sera assuré par l'Etat. Le droit d'expropriation sera assoupli.

Ou encore les travaux sur les bâtiments non destinés à recevoir des substances radioactives pourront être engagés avant clôture de l'enquête publique.

Les deux prochains EPR devraient être implantés à Penly (Seine-Maritime), suivis de deux autres à Gravelines (Nord), selon les plans d'EDF.

Concernant le calendrier, Mme Pannier-Runacher avait avancé lors de son audition par les sénateurs l'objectif de 2027, "plutôt 2027" pour "la première coulée de béton", "2035-2037" pour la mise en service.

« Volonté politique »

Dans l'hémicycle, la présidente LR de la commission des Affaires économiques Sophie Primas a fait le procès d'un "gouvernement qui a totalement délaissé le nucléaire".

"Notre commission a transformé un texte technique en affirmation d'une volonté politique pour réussir enfin la relance du nucléaire", a-t-elle affirmé.

"Ce texte n'est pas un texte de programmation énergétique", a au contraire insisté la ministre, alors qu'en commission les sénateurs ont élargi sa portée, pour lui donner une dimension plus stratégique.

M. Gremillet a ainsi fait sauter des "verrous" en supprimant notamment l'objectif passé de réduction à 50% de la part du nucléaire dans la production d'électricité d'ici à 2035, et en imposant la révision du décret qui prévoit la fermeture de 12 réacteurs, en plus de Fessenheim.

La France, qui tire du nucléaire environ 70% de son électricité, avait décidé en 2015 de diversifier son approvisionnement en fermant 14 de ses 58 réacteurs, avant un revirement annoncé par le président de la République.

Les sénateurs ont, en outre, adopté une série d'amendements sur "deux axes majeurs: simplifier et sécuriser". Il s'agit en particulier d'intégrer les risques liés au changement climatique dans la démonstration de sûreté des réacteurs et la cyber-résilience dans leur protection contre les actes de malveillance.

Gouvernement et majorité sénatoriale vont quand même trouver sur leur chemin les sénateurs écologistes, pour qui "ce nouveau nucléaire va à contre-sens de l'Histoire", selon leur chef de file Daniel Salmon.

Ils ont défendu sans succès une motion de rejet d'emblée du texte, qui met selon eux les parlementaires devant le "fait accompli", alors qu'un débat public sur la construction de nouveaux réacteurs nucléaires n'est pas terminé. Argument réfuté par la ministre.

"Ce texte ne préempte en aucun cas les décisions qui seraient prises sur l'avenir du mix énergétique français ou sur la construction du programme EPR2", assure-t-on au ministère.

Un vote solennel sera organisé le mardi 24 janvier dans l'hémicycle du Sénat, puis le projet de loi ira à l'Assemblée nationale.

Commentaires

Daphné

Qu'en est-il du "Grand Carénage" aux investissements de 49Mds d'EU. Et de la remise en route des 14 réacteurs encore en maintenance. Malgré tout cela, en ce début de 2023 la France a repris ses exportations d'électricité et se suffit à elle-même sans pollution carbonée. . La durée de vie de nos réacteurs installés devraient être prolongée d'environ 15 ans en toute sécurité. Et nous avons l'epr de Flamanville à terminer et mettre en route. Cela fait beaucoup d'argent. Ne serait-il pas envisageable de repousser les investissements dans de nouveaux réacteurrs à 10 ans? D''ici-là, les technologies et surtout les techniques de construction auront progressé; On pourra peut-être investir dans des réacteurs de 4ème génération qui fonctionneront au thorium plus abondant , moins générateur de déchets radioaactifs et moins corrosif que nos carburants actuels, , uranium, plutonium, MOX etc. ??

Goldorak

Si on repousse de 10 ans, il sera trop tard. Il faut s'attendre à ne pas voir de nouveau réacteurs (hors flamanvile 3) démarrer avant 2035 (plutôt 2037).
D'ici là, certains réacteurs auront presque 60 ans (17 réacteurs en activité ont été mis en service avant 1982).
Même si rien n'est décidé, Il faut s'attendre a ce que certains réacteurs soient arretés pour des raisons techniques (cuve HS par exemple) ou commerciales (ex : le réacteur a trop de panne).
Pour ce qui concerne la 4è génération, je pense que, même si superphoenix n'a pas été l'echec que les verts nous ont vendus, il faut reconnaitre qu'il y a eu de nombreux soucis. La technologie a besoin de renaitre.

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