- Connaissance des Énergies avec AFP
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Pays le plus peuplé du monde et troisième plus gros émetteur de gaz à effet de serre de la planète, l'Inde reste profondément dépendante au charbon pour satisfaire sa demande en énergie. Et pourtant, elle est aussi un poids lourd de la diplomatie du climat.
Voici ce que l'on sait des engagements de New Delhi en matière de climat, avant l'ouverture lundi au Brésil de la COP30, la conférence des Nations unies sur le climat.
Émissions de gaz à effet de serre
L'Inde a émis 4,4 milliards de tonnes équivalent CO2 en 2024 - une unité de mesure des gaz à effet de serre favorisant le changement climatique - selon l'ONU, dépassée seulement par la Chine et les États-Unis. Mais avec une population de 1,4 milliard d'habitants, ses émissions par tête sont loin de figurer en haut du tableau.
L'Inde s'est engagée à atteindre la neutralité carbone en 2070 et, d'ici 2030, de réduire de 45% l'intensité de ses émissions (c'est-à-dire le niveau de ses émissions relatif au PIB) par rapport aux niveaux atteints en 2005.
Électricité
Cette année, New Delhi a annoncé que 50% de sa capacité de production d'électricité était désormais d'origine renouvelable, avec cinq ans d'avance sur le calendrier fixé par le traité de Paris.
Mais il ne faut pas confondre capacité de production et production : les chiffres officiels le confirment, environ les trois quarts de l'électricité consommée en Inde reste générée par de très polluantes centrales à charbon. Le pays est même le deuxième plus grand consommateur de ce combustible. Et ses besoins en électricité devraient doubler d'ici 2047, selon le Centre pour la science et l'environnement (CSE) de New Delhi.
Pour l'heure, le pays reste en mauvaise passe pour atteindre un objectif ambitieux, celui de générer 43% de son électricité via les énergies renouvelables d'ici 2030. Seuls 2,5% des véhicules vendus dans le pays l'an dernier étaient par ailleurs électriques, selon S&P Global.
Objectifs climatiques
Comme toutes les parties de l'Accord de Paris de 2015, qui vise à limiter le réchauffement climatique à long terme à 1,5°C par rapport à l'ère préindustrielle, l'Inde doit présenter prochainement une feuille de route détaillée sur ses engagements, fixant des objectifs d'ici 2035.
Aman Srivastava, spécialiste en politique climatique pour le think tank Sustainable Futures Collaborative, estime que les ambitions de New Delhi en la matière seront probablement modestes, lui permettant de les atteindre, voire de les dépasser.
Une annonce majeure pourrait être celle d'un pic de ses émissions, sans doute entre 2040 et 2045, juge-t-il auprès de l'AFP. Cela "lui permettra ensuite de réduire en quelque sorte ses émissions pendant les quelque 30 années suivantes". Avec dans le viseur, la neutralité carbone en 2070. L'Inde pourrait aussi prévoir de réduire davantage l'intensité de ses émissions, de plus de 50%, selon Aman Srivastava.
Défis
L'Inde est en première ligne, parmi les pays en développement, pour solliciter des aides financières face aux effets du changement climatique.
Selon un récent rapport, l'Inde estime devoir rassembler jusqu'à 21.000 milliards de dollars pour tenir ses engagements climatiques tout en répondant aux besoins de sa population.
"L'Inde fait face à des priorités multiples", entre créations d'emploi, demandes en énergie et infrastructures, et croissance permettant de réduire la pauvreté, observent Nakul Sharma et Madhura Joshi du think tank E3G spécialisé dans le climat.
Son "programme climatique est profondément mêlé à ses priorités en matière de développement et de sécurité énergétique", ajoutent-ils.
Diplomatie climatique
L'Inde se fait le porte-voix des pays en développement, et a dit sa déception face aux objectifs de financement face au changement climatique, jugés par elle insuffisants, fixés à la dernière COP, en 2024.
L'Inde pourrait d'ailleurs publier deux scénarios d'objectifs climatiques, dont un conditionné à une augmentation des financements, juge Aman Srivastava.
New Delhi va probablement demander lors de la COP30 davantage de soutien de la part des pays riches et mettre en avant leur responsabilité historique dans la trajectoire climatique actuelle. "Restaurer la confiance dans le multilatéralisme sera vraiment important" lors de la conférence, ajoute Aman Srivastava.