- Connaissance des Énergies avec AFP
- parue le
Le gouvernement serbe assure qu'il ne faut craindre aucune pénurie, NIS promet de "respecter toutes ses obligations" envers ses employés, mais à Pancevo, où la seule raffinerie du pays est à court de brut, l'incertitude grandit.
Du carburant dans les réserves
Pas une goutte de pétrole n'est entrée dans la raffinerie depuis le 9 octobre, quand les Etats-Unis ont imposé des sanctions à NIS, la principale compagnie pétrolière du pays, qui possède environ 20% des stations-service du pays, en fournit autour de 80% et exploite l'unique raffinerie serbe, à Pancevo.
Les États-Unix exigent que les entreprises russes qui possèdent 56% de NIS, Gazprom Neft et Intelligence, sortent totalement du capital - ce qu'elles semblent refuser pour l'instant.
Près de 1 700 employés travaillent encore à Pancevo, mais aucun d'entre eux n'accepte de parler. Comme les leaders syndicaux, qui ont tous refusé les demandes d'interview de l'AFP. Les employés s'attèlent "aux tâches effectuées lors d'arrêts planifiés des unités de production", a indiqué NIS à l'AFP, soulignant que l'entreprise respectait "toutes ses obligations" envers ses plus de 13 500 employés à travers le pays.
À Pancevo, à une vingtaine de kilomètres de la capitale Belgrade, le ballet des camions-citernes frappés du logo NIS n'est pas totalement à l'arrêt - il reste du carburant dans les réserves, même si on ignore combien. Et dans cette ville où la raffinerie est l'un des principaux employeurs, la fermeture est sur toutes les lèvres.
« La raffinerie a été modernisée »
Tomislav, qui refuse de donner son nom de famille, a travaillé pour NIS une grande partie de sa vie. "C'est un enjeu majeur - non seulement pour cette ville, mais pour tout le pays", explique le retraité à l'AFP.
NIS et ses filiales ont contribué en 2024 à hauteur de plus de 2 milliards d'euros aux revenus de l'État serbe, selon le rapport annuel de l'entreprise - soit près de 12% du budget national. "La raffinerie a été modernisée, et sur l'aspect technologique et sur l'aspect environnemental. C'est une excellente installation, j'espère qu'il y aura une solution à cette situation sera résolue", ajoute Tomislav.
À Pancevo, les inquiétudes sur l'environnement, du fait de la raffinerie, étaient parmi les principales de la population, explique Biljana Dejanovic, qui travaille à la mairie. Mais désormais, ce qui fait peur, c'est l'idée que la raffinerie ferme.
"Tout le monde attend une solution. Quelqu'un va devoir en trouver une", ajoute-t-elle, précisant que la mise en veille a été un choc pour les travailleurs. "Et ce n'est pas juste la raffinerie. Cela affectera aussi Petrohemija [dont les usines sont en face de la raffinerie, ndlr] qui dépend du pétrole raffiné de la raffinerie pour produire des plastiques", s'inquiète-t-elle. L'inquiétude pointe aussi chez Vladimir Mutavdzic, 33 ans. La situation "touche les transports, le chauffage - tous les aspects de nos vies ... ".
« C'est là que les problèmes commencent »
Au-delà de Pancevo, les risques qui pèsent sur NIS sont une épée de Damoclès sur l'Economie serbe. La banque centrale s'expose elle-même à des sanctions si elle continue à autoriser NIS - une entité sous sanction - à faire du commerce sur ses marchés.
L'entreprise court donc le risque d'être coupée du système de paiement serbe, ce qui la forcerait à arrêter totalement ses activités, et à fermer ses près de 330 stations-service - environ une sur cinq en Serbie. Plus de 50 villes n'ont aucune alternative à proximité.
Pour l'heure, les Américains n'ont pas imposé de sanctions secondaires, et la banque centrale autorise au jour le jour NIS à poursuivre ses activités. "La seule question est de savoir quand l'avertissement sur les sanctions secondaires arrivera", a cependant prévenu le président serbe Aleksandar Vucic mercredi soir depuis Bruxelles. "C'est là que les problèmes commencent".
Face au bras de fer entre Washington et Gazprom, Aleksandar Vucic a donné jusqu'à la mi-janvier aux Russes pour vendre affirmant que des Hongrois et des Emiratis étaient intéressés.
Mais si les Russes refusent de céder leurs parts, le président serbe a prévenu que son pays était prêt à racheter NIS et vient de mettre de côté, dans son budget 2026 tout juste adopté, 1,4 milliard d'euros à cet effet.
La Serbie avait vendu la majorité des parts de NIS à Gazprom pour 400 millions d'euros en 2008.