Hydrogène : la filière vacille avec l'annonce de Stellantis

  • Connaissance des Énergies avec AFP
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L'hydrogène est-il une énergie d'avenir pour l'automobile ? Stellantis vient de répondre par la négative en sabrant son programme d'utilitaires, tandis que certains constructeurs comme Toyota y croient encore.

« Segment de niche »

La nouvelle direction de Stellantis (marques Fiat, Peugeot) a annoncé mercredi mettre fin à son programme de développement dans l'hydrogène, une nouvelle qui a résonné comme un coup de tonnerre mercredi matin dans l'usine de sa coentreprise Symbio, qui joue son avenir.

Flambant neuve, l'usine de la banlieue lyonnaise prévoyait de produire 50 000 systèmes à hydrogène par an d'ici 2026, dont une grande partie pour Stellantis, pour accompagner la montée en puissance de son offre d'utilitaires. C'est aussi un nouveau signal funeste pour l'hydrogène dans les transports.

Les véhicules à hydrogène fonctionnent grâce à une forme pure du gaz combinée à de l'oxygène dans une cellule à combustion qui génère de l'électricité, et ne dégage que de la vapeur d'eau. Par rapport aux utilitaires électriques, qui commencent à se multiplier dans les villes, les véhicules à hydrogène se rechargent rapidement et profitent d'une grande autonomie, des critères particulièrement recherchés par les entreprises. Ils ont aussi besoin de plus petites batteries, et donc de moins de matières premières.

Mais les modèles à hydrogène sont très chers à l'achat, autour d'une centaine de milliers d'euros l'unité, et les stations de recharge, coûteuses à installer, restent rares.

Pour Jean-Philippe Imparato, directeur de Stellantis pour l'Europe, "le marché de l'hydrogène demeure un segment de niche, sans perspectives de rentabilité économique à moyen terme".

Ambition française

La France vient pourtant de subventionner l'achat de ces camionnettes à hydrogène, en les mettant à parité de prix avec les modèles électriques. L'État français affiche en effet l'ambition de devenir un "leader de l'hydrogène décarboné", avec un total de 9 milliards d'euros d'argent public mis sur la table via les plans France Relance et France 2030.

Cette énergie est notamment utile pour la décarbonation de l'industrie des engrais, de la pétrochimie, de la sidérurgie ou des transports lourds.

Stellantis était entrée au capital de Symbio, fondée par Michelin et l'équipementier Forvia, et qui compte 640 salariés. La direction de Michelin a condamné mercredi une "décision inattendue, brutale et non concertée", "d'autant plus surprenante que Stellantis a toujours affiché l'ambition d'être le pionnier de ce nouveau marché".

"Stellantis représente près de 80% du volume d'activité de Symbio", a indiqué de son côté Forvia. "De fait, l'intention exprimée par Stellantis entraîne des répercussions opérationnelles et financières, graves et immédiates, pour l'avenir de Symbio".

Renault a aussi mis en liquidation début 2025 son usine d'utilitaires à hydrogène de Flins (Yvelines). "En gros, il n'y pas de marché pour les véhicules à hydrogène (...). On vend des voitures à perte", avait expliqué le patron de Renault à l'époque, Luca de Meo, devant des députés.

Surtout, la quantité d'hydrogène "vert" (produit à partir d'énergies renouvelables, rendant cette énergie bien moins polluante, NDLR) est encore insuffisante, avait souligné le patron italien.

Le pari de BMW

Parmi les constructeurs automobiles, seuls Toyota, Hyundai et BMW continuent d'y croire avec de petits programmes de développement et une poignée de véhicules dans les rues. BMW prévoit toujours de lancer sur le marché en 2028 un SUV converti à l'hydrogène, en partenariat avec Toyota, le N°1 mondial de l'automobile et grand soutien de cette énergie.

"Retirer l'hydrogène du jeu serait une erreur", a averti le patron du constructeur allemand Oliver Zipse mercredi dans une interview au journal Die Welt.

C'est une question d'indépendance stratégique, selon Oliver Zipse: "L'hydrogène est la seule technologie que l'Europe peut utiliser de manière autonome", a-t-il souligné, alors que pour les batteries, le continent reste pour le moment dépendant des fournisseurs asiatiques.

Consciente de ces enjeux stratégiques, la Chine est déjà devenue le leader mondial de l'hydrogène et multiplie les innovations : fin 2024, elle comptait 540 stations de recharge et 24.000 véhicules équipés, selon un rapport gouvernemental cité par l'agence S&P.

Fin mai, le groupe chinois Wanrun a sauvé de la faillite Safra, unique constructeur de bus à hydrogène français.

Commentaires

DANIEL HOSTALIER
L'hydrogène pour les véhicules légers n'a d'avenir que si nous parvenons à exploiter des gisements à l'état naturel car pour simplement le produire par électrolyse (moyen le plus économique et le moins polluant) le rendement de transformation n'excède pas 60% à 65%, sans compter qu'après il faut compresser ce gaz, le transporter, pour ensuite le distribuer à la pompe, ce qui donne un rendement global qui est inférieur à 50%. Le plus efficace ensuite serait d'utiliser l'hydrogène comme carburant pour des moteurs à explosion car la pile à combustible est moins performante et moins fiable qu'un moteur thermique. Pour les transports lourds l'hydrogène pourrait toutefois être une réponse à la dépollution locale et globale ainsi qu'à la réduction de notre dépendance aux énergies fossiles.
Olivier Reginensi
Je pense qu'il n'y a que les politiques, ignares en sciences, qui ont crû à la filière H2 pour le transport. Le rendement catastrophique de la chaîne électrolyse, stockage, transport et c PAC suffit à écarter cette technologie au profit des batteries, y compris pour les camions. Le H2 peut avoir de l'intérêt pour les engrais.
nim
Y ont-il cru ou juste plié devant les lobbyistes des pétrogaziers? L’hydrogène permettait de justifier le maintien du support à tout un tas d’infrastructures et industries en mal de transition énergétique (les gazoducs de Natran, les chaudiéristes, le filière moteurs à explosion, la pétrochimie, etc) vous verrez demain on fera transiter et on brulera de l’hydrogène, en attendant on brule du méthane russe et le peu d’hydrogène est obtenu par craquage, mais ne ne vous en faites pas, tout pourra être converti en hydrogène vert plus tard (par l’opération du saint esprit, avec aucun équipement qualifié et testé pour ou au plus avec un mélange de 80% de méthane). Et surtout n’investissez pas dans l’électrique et les batteries, ça ne sert à rien. Si on ne se rappelle pas que Michelin est à la base un chimiste, on ne comprend pas son soudain intérêt pour Symbio.
EtDF
Ola de belles inepties !! "car la pile à combustible est moins performante qu'un moteur thermique3!!! "Le H2 peut avoir de l'intérêt pour les engrais"
Laurent
Le critère du rendement pour comparer le moteur H2 au moteur thermique n'est pas le meilleur, car un moteur à explosion essence a un rendement de 20 à 30% seulement. 30 à 40% pour le diesel.
Reg
Les chinois sont plus malins: ils copient nos technologies émergentes, puis les développent massivement (et baissent leurs coûts) alors que nous hésitons à les développer et serons dépassés par les chinois dans l'hydrogène (comme dans bien de domaines) qui nous revendra leur technologie.
Reg
Biensur que l'hydrogène est le vecteur énergétique du futur. il est abondant, facile à transporter à transformer en Energie.
Reg
Le problème est que les compagnies automobiles sont dirigées par des financiers et non par des scientifiques/ingénieurs.
Freudon Saké
Encore un délire techno-crade qui fait pschitt ! Combien de milliards cramé pour rien... Macron en avait annoncé 9 ! Ce sera exactement la même chose avec le nucléaire, mais en beaucoup plus cher ! Plus toute les fermetures d'usines et la casse sociale, l'endettement...
Un budget miteux et une opposition de cacaphoniques médiocres, pas une seule voix pour dire que la solution est l'électricité la moins chère, celle du charbon que nous possédons en grande quantité.
Pas une seule voix pour dire que le bioéthanol, l'Efuel au co2 du charbon et des usines, l'isobutène, plus le gaz de schiste au co2 récupérable pour le train et le fluvial avec batteries sodium pour des moteurs sans aimants pour les utilitaires légers, le tout produit avec un Mwh à 15 euros, constituent un Bifrost de croissance et d'emplois tout en permettant de restaurer le climat.
Dernière nouveauté pendant que les nucléopathes énarchiques planifient leurs centrales sur soixante dix ans, le four solaire à 4000° et c'est une entreprise française.
Est ce que quelqu'un pourrait calculer la production d'électricité de moteurs Sterling en étoiles, encerclant à intervales réguliers des pipes de réseaux de chaleur pour les bâtiments et les industriels, en partant de centrales solaires générant une température de 4000° et pouvant être implanté sur tout le territoire...
https://heliosand.com/en/technology/
M
L'échec de cette filière hydrogène pour des véhicules légers étaient malheureusement totalement prévisible, vu les nombreux désavantages (rendement, coût...) comparés aux autres filières. L'hydrogène vert a peut-être une place, mais sur des créneaux bien précis, pouvant accepter des coûts largement supérieurs, ou peut-être pour valoriser des excédents électriques non stockables autrement.
nim
Le seul secteur qui aurait clairement besoin de l’hydrogène c’est le transport aérien mais il refuse de payer le développement de la filière.

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