Réparer les panneaux solaires plutôt que les recycler trop tôt, « maillon manquant » de la filière

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Dans un laboratoire sécurisé, les panneaux solaires sont testés pour repérer leurs signes de faiblesse : en Savoie, la start-up SolReed, associée au CEA et à Engie, développe une technique pour réparer les pannes dans les champs photovoltaïques plutôt que d'envoyer trop tôt les panneaux au recyclage.

Face au constat que "chaque année en France, des dizaines de milliers de panneaux défaillants sont envoyés en filière de recyclage" alors qu'ils pourraient encore fournir de l'électricité décarbonée pendant des années, SolReed veut devenir "le premier acteur européen capable de prolonger" leur durée de vie, souligne Luc Federzoni, son cofondateur.

Jusqu'à 95% de matériaux valorisés

Selon l'AIE, l'énergie solaire est "le levier le plus important" pour atteindre la neutralité carbone en 2050. Or à mesure que le monde déploiera des panneaux solaires, il aura aussi accumulé à cette échéance 78 millions de tonnes de déchets issus de ces panneaux, selon un rapport de l'agence internationale pour les énergies renouvelables (Irena).

En France, les panneaux en fin de vie ou défectueux sont envoyés en recyclage, permettant de valoriser jusqu'à 95% de matériaux. Des entreprises de réparation proposent déjà leurs services aux particuliers, mais rien de tel n'existe à l'échelle industrielle dans des champs de plusieurs hectares.

« Recycler c'est bien » mais...

Depuis deux ans, la société, en incubation au CEA, au Bourget-du-Lac, étudie la pertinence d'une offre "tout-en-un" de détection et de réparation des panneaux. L'objectif est "d'aller directement au cœur des centrales" en faisant intervenir des unités mobiles de maintenance, explique Matthieu Verdon, cofondateur de SolReed, qui est accompagné par Engie depuis août 2021.

"Recycler c'est bien (...) mais il nous a semblé qu'il y avait un maillon de la chaîne qui manquait", souligne William Arkwright, directeur général d'Engie Green, la branche solaire et éolien terrestre d'Engie, qui se présente comme le premier exploitant de parcs solaires en France avec 2 gigawatts (GW) de capacités installées, et son lot de pannes à gérer.

Chaque année, le groupe doit en effet remplacer 2 000 panneaux sur les 6 millions qu'il a installés en France.

Engie a donc confié cet été à SolReed une centaine de ces cellules défectueuses pour qu'elles servent de cobayes aux experts du laboratoire de l'Institut national de l'énergie solaire (Ines) du CEA. L'expérience s'est avérée concluante: "99% des panneaux réparés ont retrouvé leur puissance d'origine", assurait Matthieu Verdon lors de l'officialisation récente de son partenariat avec Engie et le CEA.

Localiser LA cellule photovoltaïque en panne

Parfois, un simple coup d'œil permet de repérer un connecteur fatigué. Dans d'autres cas, des tests par simulateur solaire ou par injection de courant électrique sont nécessaires pour localiser les signes de faiblesse.

Différents composants - câbles, diodes, soudures - pourraient donc être réparés sans avoir à mettre le panneau au rebut avant la fin de son espérance de vie officielle, estimée entre 20 et 30 ans. De quoi peut-être aider la filière à en finir avec le casse-tête du remplacement des panneaux.

Pour les énergéticiens, il faut d'abord trouver LA cellule en panne au milieu de milliers d'autres panneaux. Des vols de drones embarquant des caméras thermiques permettent de repérer des anomalies, mais ces inspections ne sont réalisées qu'une ou deux fois par an. Et quand le panneau défaillant finit pas être localisé, tout n'est pas réglé.

Innovations technologiques

"Les innovations technologiques vont très très vite, donc quand le fabricant vous envoie un nouveau panneau qui n'a plus la même dimension ni la même puissance, concrètement, c'est un gros problème", affirme Philippe Alexandre, conseiller technique chez Engie Green.

À force, les modules non remplacés finissent par créer des "trous" ici et là dans le parc, occasionnant autant de pertes de production, évaluées à 6 GW de puissance dans les parcs solaires d'énergéticiens en Europe, selon SolReed. Certes, la fabrication sur mesure est possible, mais elle est coûteuse. Au contraire, SolReed a calculé que le réemploi permettrait un gain économique de 30% par rapport à un panneau neuf.

À terme, la start-up compte développer des outils de surveillance qui pourront contrôler en temps réel les performances électriques de chaque panneau solaire et ainsi constituer une base de données des défauts récurrents. Le cas échéant, des actions de maintenance pourraient être préconisées, avant même la survenue de la panne.

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