Systèmes de volant d'inertie de l'entreprise Beacon Power, basée dans le Massachusetts. (©Beacon Power)
Fonctionnement
L’énergie stockée augmente avec la masse et est proportionnelle au carré de la vitesse de rotation. Dès lors deux « stratégies » de stockage sont possibles. Elles correspondent aux deux typologies de volants d’inertie, dont l’une joue sur la masse, l’autre sur la vitesse :
- les volants d’inertie basse vitesse : ce sont les systèmes les plus matures, ils mettent en jeu des masses importantes dans des matériaux lourds type acier. Leur vitesse de rotation est inférieure à 10 000 tr/min (tours par minute) ;
- les volants d’inertie haute vitesse : ils utilisent des matériaux plus légers type fibre de carbone ou de verre. Ils ont des vitesses de rotation pouvant aller jusqu’à 50 000 tr/min.
Un critère capital pour le fonctionnement d’un volant est la capacité à minimiser les pertes d’énergie lors de la phase stationnaire. Pour ce faire, il est nécessaire de limiter les frottements subis par la masse en rotation. Parmi les solutions utilisées, on peut citer : l’utilisation de roulement à bille haute performance, l’enfermement de la masse dans une enceinte sous vide, la suspension magnétique de la masse, etc.
Un autre élément primordial du choix du matériau de la masse est sa résistance à la rupture. En effet, les vitesses de rotation élevées entraînent des contraintes importantes sur les masses qui, si elles sont mal dimensionnées, peuvent se rompre, provoquant alors la destruction immédiate du volant.
Schéma de volant d'inertie à rotation lente de la société AER (©AER)
Définition
Un volant d’inertie est un système de stockage d’énergie sous forme d’énergie cinétique de rotation en électricité, et inversement. Il est constitué d’une masse, la plupart du temps un cylindre creux ou plein (mais d’autres formes sont possibles). Cette masse est mise en rotation autour d’un axe, fixe en général, et enfermée dans une enceinte de protection. Elle est reliée à un moteur/générateur électrique qui permet de convertir l’énergie cinétique en électricité et inversement.
Ce mécanisme permet le stockage d’énergie :
- en phase de stockage, le moteur convertit l’énergie électrique entrante en énergie cinétique, ce qui augmente la vitesse de rotation de la masse ;
- en phase stationnaire, c’est-à-dire de conservation de l’énergie, la vitesse de rotation de la masse doit être maintenue constante. L’apport d’énergie est alors minime et ne fait que compenser les pertes liées au frottement ;
- en phase de déstockage ou de restitution, le générateur convertit l’énergie mécanique en électricité, freinant ainsi la masse.
Les applications pour les volants d’inertie sont nombreuses : régulation de fréquence et soutien en tension sur les réseaux électriques, lissage de la production des énergies renouvelables, applications décentralisées, etc.
Les deux plus grandes installations, d'une puissance de 20 MW chacune, se trouvent aux États-Unis.
Applications
Les applications possibles pour les volants d’inertie sont nombreuses.
Parmi elles figurent :
- la régulation de fréquence et le soutien en tension sur les réseaux électriques : maintenir la fréquence et la tension autour de valeurs moyennes et dans des limites définies par l’opérateur du réseau ;
- le lissage de la production des énergies renouvelables : compenser les fluctuations de la production électrique liées à l’intermittence de la source d’énergie (passage d’un nuage, fin d’une rafale de vent, etc.) ;
- le suivi de charge : accompagner de façon temporaire les variations journalières d’appel de puissance sur le réseau électrique, par exemple en début ou fin d’heure de pointe, le temps que des modes de production à grande échelle démarrent ou s’arrêtent ;
- les applications décentralisées : optimiser l’utilisation de l’énergie par récupération de l’énergie de freinage de métros ou de l’énergie potentielle de pesanteurs de grues ou garantir l’alimentation sans coupure (UPS – Uninterruptible Power Supply) qui consiste à assurer le relai entre l’instant de l’incident et le démarrage du générateur de secours.
Les deux plus grandes installations se trouvent aux États-Unis à Stephenson (État de New York) et Hazle Township (Pennsylvanie). Ces deux centrales ont une capacité de 20 MW chacune.
L’utilisation des volants d’inertie est mondiale :
- une centrale de 5 MW dédiée au lissage de la production électrique d’éoliennes a été construite au Canada, en Ontario ;
- l’aéroport de Mexico City est équipé d’un système d’alimentation sans coupure utilisant des volants d’inertie ;
- l’île de Kodiak Island, en Alaska, en est également équipée afin de stabiliser ce réseau isolé ;
- le métro de Rennes utilise un volant d’une masse de 2,5 tonnes. Il permet, en récupérant l’énergie pendant les phases de freinage (alors qu’elle était précédemment dissipée sous forme de chaleur) de la restituer pendant les phases d’accélération, et ainsi d’économiser environ 230 MWh par an ;
- En 2009, les écuries Ferrari et McLaren ont intégré à leurs véhicules de Formule 1 un volant d’inertie ou SREC (Système de Récupération d’Energie Cinétique). L’objectif était de récupérer l’énergie pendant le freinage et de la restituer pendant certaines phases d’accélération. L’intérêt du SREC est une accélération plus intense que celles des voitures non équipées. L’inconvénient est, outre les coûts de développement, le poids du système qui pénalise la performance de la voiture. Ce système a notamment permis à Kimi Räikkönen de gagner le grand prix de Belgique en 2009 au volant de sa Ferrari.
Principales entreprises
La société américaine Beacon Power est considérée aujourd’hui comme le leader du marché des volants d’inertie. La société a notamment construit et opère deux centrales de 20 MW aux Etats-Unis dédiées à la régulation de fréquence.
Une dizaine d’acteurs existe aujourd’hui dans le monde. Néanmoins, le marché reste assez segmenté, les différents acteurs se concentrant sur des régions et/ou des applications spécifiques. Par exemple, la société Temporal Power se concentre sur le Canada pour des applications de régulation de fréquence ou d’intégration d’énergies renouvelables. Un autre exemple est la société Active Power qui a une large présence géographique mais ne sert que les marchés de l’alimentation sans coupure.
Chiffres clés
L’AIE (Agence Internationale de l’Energie) estime les coûts d’investissement d’un volant d’inertie entre 1 000 et 4 500 $/kWh. Ce coût initial est élevé par rapport à d’autres technologies (le prix des batteries au lithium est estimé entre 500 et 2 300 $/kWh). Il est néanmoins compensé par des coûts de maintenance très faibles et par une durée de vie très importante.
Notons par ailleurs que la rentabilité d’un volant d’inertie dépend essentiellement de l’application visée et de ses particularités. Ainsi, il est courant dans la régulation de fréquence de valoriser la puissance disponible plutôt que le kWh délivré. De même, pour certaines applications, l’énergie entrante peut être considérée comme « gratuite » car perdue autrement (par exemple la récupération de l’énergie de freinage d’un train) alors qu’elle représentera un coût dans d’autres cas.
Histoire de son usage
Le concept du volant d’inertie remonte au néolithique (d’environ -10 000 à -5 000 ans AJC), notamment avec l’usage des tours de potier (une fois le tour mis en rotation, il continue de tourner via l’inertie du système).
Néanmoins, le premier véritable essor du volant d’inertie en tant que système de stockage d’énergie date de la révolution industrielle. Des volants d’inertie massifs et de grande taille, généralement en métal, étaient utilisés pour lisser la production des machines à vapeur, notamment dans les usines. Certains de ces volants sont d’ailleurs toujours en opération aujourd’hui. Le XXe siècle a vu le déclin des volants, en lien avec les progrès de l’ingénierie électrique et l’usage des moteurs à combustion.
Le second essor des volants d’inertie date de la seconde moitié du XXe siècle où des problématiques d’économies d’énergie, de lissage des énergies renouvelables et de stabilité des réseaux ont remis au goût du jour cette technologie.
Besoins en stockage
Entre 2011 et 2030, on estime à environ 330 GW la future augmentation des capacités de stockage reliées aux réseaux électriques (hors stockage mobile type batteries de voitures, de téléphones, etc.), toutes technologies et tailles de stockages confondues. La part réservée aux applications de petites et moyennes tailles (correspondant au marché couvert par les volants d’inertie) serait de 141 GW, soit 43% du total.
Ces chiffres sont à comparer à la capacité mondiale de stockage d’énergie de 141 GW en 2010, dont plus de 99% provient de STEP (Stations de Transfert d’Énergie par Pompage). Il est à noter que cette prédominance des STEP n’est pas forcément représentative de l’attractivité des technologies. Les STEP ont par essence des puissances importantes et tendent donc à être surreprésentées dans les comparaisons globales de puissance installée par rapport aux technologies de faible et moyenne puissance.