Ferme photovoltaïque de Puyloubier dans les Bouches du Rhône. (©EDF-Xavier Popy)
La loi énergie-climat datée du 8 novembre 2019 est présentée par Élisabeth Borne (ministre en charge de l'énergie à l'époque) comme un « nouveau pilier » de la transition écologique.
Cette loi phare actualise les objectifs de la politique énergétique de la France, décrète entre autres « l'urgence écologique et climatique » et fixe pour objectif à la France d'atteindre la neutralité carbone à l'horizon 2050.
Adoption de la loi
Le projet de loi relatif à l’énergie et au climat(1), baptisée à l’origine « petite loi » énergie, s’est étoffé au fil des négociations. Il a fait l’objet d’un accord entre députés et sénateurs fin juillet 2019 (en commission mixte paritaire).
Il a par la suite été adopté au Sénat le 26 septembre 2019, après avoir été voté à l’Assemblée nationale le 11 septembre 2019. Ce texte marque, selon Élisabeth Borne, ministre de la Transition écologique et solidaire, « une étape majeure dans la concrétisation de l’ambition du gouvernement en matière de lutte contre le changement climatique ».
La loi a été promulguée au Journal officiel en novembre 2019.
Objectifs
La loi énergie-climat comporte 69 articles.
« Urgence écologique et climatique » et neutralité carbone à l’horizon 2050
Pour répondre à « l’urgence écologique et climatique » énoncée à l'article 1er, la loi énergie-climat inscrit dans le code de l’énergie l’objectif de « neutralité carbone » à l’horizon 2050.
Cette neutralité carbone est « entendue comme un équilibre, sur le territoire national, entre les émissions anthropiques par les sources et les absorptions anthropiques par les puits de gaz à effet de serre ». Il est précisé que cette ambition devra être atteinte « en divisant les émissions de gaz à effet de serre par un facteur supérieur à 6 » par rapport au niveau de 1990.
Baisse de 40% de la consommation d'énergie fossile entre 2012 et 2030
Dans le premier chapitre de la loi consacré aux objectifs de politique énergétique de la France, il est fixé pour ambition de baisser de 40% la consommation française d’énergies fossiles d’ici à 2030 par rapport à l’année de référence 2012 (contre 30% auparavant).
La loi prévoit également de reporter de 2025 à 2035 la réduction à 50% de la part du nucléaire dans la production électrique (contre 71,7% en 2018).
Le texte vise par ailleurs à favoriser le déploiement de projets d’énergie renouvelables, notamment d'ombrières solaires.
Fermeture des centrales à charbon
Le gouvernement s’était également engagé à fermer les dernières centrales à charbon en service en France d’ici à 2022 (1,1% de la production électrique en France métropolitaine en 2018). Pour ce faire, la durée de fonctionnement de ces unités de production va être plafonnée, ce qui permettra de réduire leur rentabilité et conduira à leur fermeture, explique le ministère de la Transition écologique et solidaire.
Ce plafond sera « applicable, à compter du 1er janvier 2022, aux installations de production d’électricité à partir de combustibles fossiles situées sur le territoire métropolitain continental et émettant plus de 0,55 tonne d’équivalent dioxyde de carbone par mégawattheure », précise la loi.
Tarifs réglementés d'électricité
Le texte relève le niveau de l'électricité nucléaire qu'EDF peut livrer à un coût réglementé aux autres fournisseurs (dispositif ARENH). Il pourra passer de 100 à 150 térawattheures (TWh) par an à compter de 2020. L'idée est de donner ainsi accès à un volume un peu plus important à cette électricité à prix stable et de réduire le recours au marché européen plus « volatil ».
Le texte permet également une révision de ce dispositif ARENH par arrêté, pour prendre en compte cette évolution du plafond au regard de l'impact financier sur EDF. Il mentionne l'inflation parmi les éléments pouvant être pris en compte.
Principe des programmations pluriannuelles de l'énergie (PPE)
Avant le 1er juillet 2023, puis tous les cinq ans, il est désormais prévu qu’une loi « détermine les objectifs et fixe les priorités d’action de la politique énergétique nationale pour répondre à l’urgence écologique et climatique »(2) (en matière de réduction des émissions de gaz à effet et des consommations énergétiques, en particulier fossiles, de diversification du mix de production électrique, de rénovation énergétique, etc.).
Lutte contre les « passoires thermiques »
La loi énergie-climat contient également des mesures (très débattues lors des débats du texte) pour lutter contre les « passoires thermiques » (logements dont la consommation énergétique relève des classes F et G), la rénovation des bâtiments constituant « un enjeu majeur de la lutte contre le réchauffement climatique » selon les termes du ministère en charge de l'énergie.
Des mesures d’informations et d’incitation sont prévues dans un premier temps : à partir de 2021, le propriétaire d’une « passoire thermique » ne peut par exemple plus augmenter librement le loyer d'un bien entre deux locations sans l'avoir rénové. Des mesures plus contraignantes sont prévues à plus long terme : tous les propriétaires d’une « passoire thermique » devront entre autres avoir réalisé en 2028 des travaux d’amélioration de la performance énergétique de leur logement, leur permettant d’atteindre une classe « au moins E » (sauf certaines exceptions(3)).
Ainsi à compter du 1er janvier 2028, la consommation énergétique des logements ne devra pas excéder le seuil de 330 kilowattheures d'énergie primaire par mètre carré et par an, indique le texte.
Haut Conseil pour le climat
La loi énergie-climat pérennise par ailleurs le Haut Conseil pour le climat (organisme indépendant composé d'une douzaine d'experts placé auprès du Premier ministre) qui doit rendre chaque année un rapport sur « le respect de la trajectoire de baisse des émissions de gaz à effet de serre au regard des budgets carbone définis ».
Autres dispositions
Des dispositions sont également prévues en matière de lutte contre la fraude aux certificats d’économies d’énergie (CEE), de développement de l'hydrogène « bas carbone », de garanties d’origine ou encore de fourniture d’électricité.
La production d'énergie hydroélectrique, notamment la « petite hydroélectricité » devra être encouragée, de même que l'éolien en mer. La part de l'hydrogène décarboné devra être développée avec l'objectif d'atteindre entre 20 à 40% de la consommation totale d'hydrogène industrielle « à l'horizon 2030 ».
Rapport d'information sur la loi « énergie-climat » en 2023
Dans un rapport(4) déposé en mai 2023 par la commission des Affaires économiques, les députés Marie-Noëlle Battistel (NUPES) et Pascal Lavergne (Renaissance) font, plus de 3 ans après l’entrée en vigueur de la loi énergie-climat, état « des conséquences juridiques, économiques, financières, sociales et environnementales de la loi [...] ainsi que des éventuelles difficultés rencontrées lors de la mise en œuvre de ladite loi ».
Ils y recommandent entre autres d'inclure des objectifs de sobriété dans la prochaine loi de programmation énergie-climat « en tenant compte du bilan du plan de sobriété initié à l’automne 2022 par le Gouvernement », de renforcer les liens entre le Parlement et le Haut Conseil pour le climat (HCC), de maintenir un « suivi attentif » de la situation des salariés concernés par la fermeture des centrales à charbon, d'attendre la fin des difficultés actuelles liées aux prix de l’énergie avant de poursuivre le développement des offres à tarification dynamique ou encore de créer « un mécanisme de fourniture de dernier recours en électricité ».