L’espoir d’une indépendance énergétique retrouvée en Égypte

  • Source : Ifri

Le gisement offshore de gaz naturel de Zohr (« prospérité » en arabe) a été découvert en Égypte en août 2015. Avec des ressources estimées à environ 850 milliards de m3, soit l’équivalent de près de 18 ans de consommation gazière dans ce pays(1), il est susceptible de « transformer le scénario énergétique » égyptien selon le directeur général d’Eni, groupe qui va exploiter ce gisement(2).

Dans cette étude publiée par le Centre Énergie de l’Ifri, Benjamin Augé rappelle la longue histoire de la production pétrolière et gazière de l’Égypte. Le pays est l’un des plus anciens producteurs de pétrole dans le monde (la production y a débuté en 1908 bien avant l’Arabie Saoudite). Il a intégré l’OPAEP (organisation des pays arabes exportateurs de pétrole) dès 1972 mais n’a jamais rejoint l’OPEP, compte tenu de ses capacités d’exportation limitées en comparaison avec les pays membres(3).

Avant l'été 2015, l’Égypte semble devoir se résigner à dépendre de plus en plus des importations pour satisfaire les besoins énergétiques croissants de sa population, y compris pour le gaz naturel alors que le pays est le 2e producteur africain derrière l’Algérie. Cette croissance de la consommation est essentiellement liée à la démographie égyptienne, la population ayant quasiment doublé entre 1986 et 2013.

A l'arrivée au pouvoir du général Al-Sissi en mai 2014, il est alors envisagé d'augmenter les livraisons de GNL auprès d’autres pays comme l’Algérie, le Qatar ou la Russie (un accord a été conclu avec ce dernier pays en août 2015 pour des livraisons de GNL jusqu’en 2019) ou d’importer du gaz auprès du voisin israélien via un gazoduc existant(4). Sur le plan politique, cette deuxième voie est toutefois sensible, compte tenu de la vive opposition d’une partie de la population égyptienne (notamment les Frères musulmans) aux relations avec ce pays.

Après avoir encouragé une importante activité d’exploration, l’Égypte envisage désormais une mise en production du gisement de Zohr deux ans seulement après sa découverte. Benjamin Augé explique que cette réactivité est rendue entre autres possible grâce à « un cadre légal clair, un prix d’achat du gaz attractif pour Eni ainsi qu’une certitude de vendre la totalité de la production à l’État ». Par ailleurs, le Premier ministre et le ministre du Pétrole du pays sont tous deux issus du secteur pétrolier, ce qui contribue encore à donner confiance aux investisseurs alors même que la situation sécuritaire est très dégradée en Égypte.

Les perspectives gazières égyptiennes ne se limitent d’ailleurs pas à Zohr et la consommation de gaz naturel du pays pourrait être à nouveau couverte par la production nationale à l’horizon 2020 selon les estimations actuelles. Il semble en revanche acquis, à l’heure actuelle, que le pays soit amené à poursuivre ses importations de pétrole brut pour satisfaire les besoins croissants de sa population(5).

Lire l'étude :
Découvertes de gaz en Egypte
Sources / Notes
  1. La consommation de gaz naturel de l’Égypte atteint 48 milliards de m3 en 2014 selon les dernières données du B Statistical Review of World Energy.
  2. Active en Égypte depuis 1954, la « major » Eni est le premier producteur du pays (avec 227 000 barils équivalent pétrole par jour). Le groupe extrait près de 14% de sa production totale de pétrole et de gaz naturel en Égypte.
  3. Notons que l’Indonésie a réintégré l’OPEP en 2016 alors même que ce pays est importateur net depuis fin 2003.
  4. Israël a déjà réalisé d’importantes découvertures en Méditerranée (gisements de Noa en 1999, Mari-B en 2000, Leviathan en 2009 et Tamar en 2010).
  5. La consommation dépasse la production de plus de 100 000 b/j en 2014.

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