- AFP
- parue le
Un ex-dirigeant d'Alstom, arrêté aux États-Unis en 2013 dans une affaire de corruption, dénonce le "racket" mené par la justice américaine contre les entreprises européennes et se dit "victime" de la stratégie adoptée par l'ex-PDG Patrick Kron, dans un livre à paraître mercredi.
"Depuis près de vingt ans, l'Europe s'est laissée rançonner", dénonce Frédéric Pierucci, qui livre son témoigne sur son arrestation dans un livre intitulé "Le piège américain", écrit avec le journaliste Matthieu Aron, aux éditions JC Lattès. "Ce racket, car c'est bien de cela dont il s'agit, est inédit par son ampleur", affirme-t-il, rappelant que les entreprises françaises "ont déjà été ponctionnées de plus de 13 milliards de dollars" par les amendes infligées par la justice américaine.
Arrêté le 14 avril 2013 à son arrivée à l'aéroport de New York pour une affaire de corruption en Indonésie, une année avant l'annonce du rachat de la branche Energie d'Alstom par General Electric, M. Pierucci révèle que la justice américaine visait le PDG du groupe. "Ce que nous voulons, c'est poursuivre la direction générale d'Alstom et notamment M. Kron", lui affirme le procureur fédéral du Connecticut David Novick peu après son arrestation.
Bien que blanchi par une enquête interne d'Alstom sur son rôle dans l'obtention d'un contrat en Indonésie au début des années 2000, M. Pierucci entame dès lors une "glissade" avec une arrestation qui se prolongera pendant plus d'une année.
Il n'avait pas été prévenu par son entreprise que le Département de la Justice (DoJ) avait ouvert une enquête en 2009 sur l'affaire indonésienne et se rend compte que M. Kron "a voulu jouer au plus fin", "en faisant croire que l'entreprise collaborait, tout en faisant en réalité l'inverse". "Je suis salement piégé, victime de la stratégie adoptée par Patrick Kron et réduit à l'Etat de pantin dans les mains de la justice américaine", estime celui qui sera licencié le 20 septembre 2013 par Alstom après avoir plaidé coupable.
Comme sa détention se prolonge, M. Pierucci dit comprendre les raisons de son arrestation le 24 avril 2014, date de l'annonce du rachat d'Alstom par GE. "En une fraction de seconde, tout s'éclaircit et j'ai enfin les réponses à certaines de mes questions qui me taraudent depuis des mois", écrit-il. "M. Kron imagine peut-être avoir trouvé la solution pour échapper aux procureurs: vendre à GE l'ensemble des activités énergies et réseaux que les Américains convoitent depuis tant d'années", pense-t-il.
L'ex-PDG dément. Interrogé par le journal Le Monde, il a réitéré ce qu'il a toujours dit dans cette affaire: la vente d'Alstom "n'est en rien liée aux poursuites judiciaires américaines".