Après les renouvelables, le gouvernement présente sa loi d'accélération du nucléaire

  • AFP
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Le gouvernement "accélère", au grand dam des partisans de la concertation: le projet de loi visant à lancer au plus vite de nouveaux réacteurs nucléaires a été dévoilé, avec la volonté de poser une première pierre avant la fin du quinquennat d'Emmanuel Macron.

La France comme le reste de l'Europe sait que ses besoins en électricité vont exploser d'ici à 2050 pour se passer des énergies fossiles, et le président français veut construire six réacteurs nucléaires de nouvelle génération EPR, avec une option pour huit autres, tout en accélérant le déploiement des énergies renouvelables avec priorité au solaire et aux éoliennes en mer.

Le nouveau projet de loi "permettra d'accélérer l'installation de nouveaux réacteurs, dans des sites déjà existants, accueillant déjà des réacteurs", a expliqué la ministre de la Transition énergétique, Agnès Pannier-Runacher, sur Europe 1 mardi.

"C'est une mesure de bon sens pour gagner du temps", a-t-elle ajouté, confirmant une information du Figaro selon laquelle l'objectif est de déposer la première pierre du futur réacteur de nouvelle génération EPR2 avant la fin du quinquennat en 2027, même si la mise en service ne pourra se faire avant 2035 voire 2037.

Dans l'exposé des motifs du texte, que l'AFP a consulté, le gouvernement invoque l'urgence climatique et la nécessité de produire 60% d'électricité en plus en 2050 par rapport à aujourd'hui.

Comme pour le solaire et l'éolien, traités dans un texte séparé et présenté lundi, le gouvernement veut simplifier les procédures administratives. La loi dispenserait par exemple les projets d'autorisation d'urbanisme car le contrôle de conformité sera assuré par les services de l'Etat lors du dépôt de la demande de création.

Le texte autorise des réacteurs dans les zones relevant de la loi Littoral, avec certaines dérogations pour les projets en continuité de sites nucléaires existants.

- "Parodie" -

Les projets répondront à "une raison impérative d'intérêt public majeur, leur permettant de bénéficier d'une des conditions d'octroi des dérogations relatives aux espèces protégées", stipule aussi le texte.

Et les travaux sur les bâtiments non destinés à recevoir des substances radioactives, mais aussi les fondations, pourront être réalisés avant la clôture de l'enquête publique.

Enfin, le traitement des contentieux serait traité en premier et dernier ressort par le Conseil d'Etat, pour "une sécurisation juridique rapide".

Les sites visés, sur ou près de centrales existantes, concerneraient d'abord Penly (Seine-Maritime) puis Gravelines (Nord).

"On peut se dire qu'on peut aller plus vite sur les phases d'instruction administrative, car on ne va pas mettre en danger la nature sur des sites déjà existants", a justifié Mme Pannier-Runacher.

Le texte a été envoyé lundi soir pour consultation au Conseil national de la transition écologique (CNTE), qui réunit syndicats, patronat, ONG, collectivités.

D'ores et déjà la Ligue de protection des oiseaux (LPO) a exprimé sa colère devant la méthode et le calendrier, et l'absence annoncée d'étude d'impact.

"Reçu lundi soir à 20h18. Demain mercredi première réunion de travail. Mais nous ne pouvons pas nous libérer en 24h! Ce vendredi 1er avis, et mercredi 5 octobre vote. S'agissant d'un sujet important, à savoir accélérer la construction de nouvelles installations nucléaires et ce sans débat démocratique, la LPO refuse de servir de caution à cette parodie de consultation", a réagi son directeur général, Yves Vérilhac.

"Le dialogue environnemental qui existe depuis le Grenelle de l'environnement est complètement court-circuité sur ce sujet du nucléaire. On ne comprend pas la précipitation", dit à l'AFP Anne Bringault, du Réseau Action Climat (RAC).

La France, qui dépend du nucléaire pour un peu moins de 70% de son électricité, avait décidé en 2015 de diversifier son bouquet électrique en fermant progressivement 14 de ses 58 réacteurs (deux ont déjà fermé).

Après le changement de politique annoncé par Emmanuel Macron, un débat doit avoir lieu au Parlement pour définir l'an prochain le destin énergétique du pays à horizon 2033.

D'ici là, un débat public aura lieu du 27 octobre au lundi 27 février sur la construction des six futurs réacteurs.

Quant au sujet plus général des choix énergétiques de la France, le gouvernement a promis "une concertation nationale" à partir d'octobre, sans plus de détails pour l'instant.

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