Attaques en mer Rouge: des échanges maritimes perturbés

  • AFP
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Après les attaques répétées de bateaux dans la mer Rouge par les rebelles houthis, les compagnies maritimes évitent l'un des principaux corridors du commerce mondial, ce qui devrait perturber les échanges, avec des retards et des surcoûts.

Que s'est-il passé?

Ces dernières semaines, des rebelles houthis du Yémen, proches de l'Iran, ont multiplié les attaques près du détroit stratégique de Bab al-Mandeb, qui sépare la péninsule arabique de l'Afrique.

Ils ont prévenu qu'ils viseraient des navires naviguant au large des côtes du Yémen ayant des liens avec Israël, en riposte à la guerre entre Israël et le mouvement islamiste palestinien Hamas dans la bande de Gaza.

Ces dernières semaines, plusieurs missiles et drones ont été abattus par des navires de guerre qui patrouillent dans la zone.

Les Houthis ont affirmé lundi avoir mené des attaques en mer Rouge contre deux navires "liés à Israël", notamment le Swan Atlantic qui appartient à une compagnie norvégienne.

Un navire norvégien, le M/V Swan Atlantic, a été touché lundi par un "objet non identifié", selon son propriétaire.

Comment ont réagi les compagnies?

Face à ces attaques, plusieurs géants du transport maritime mondial ont annoncé suspendre le passage de leurs navires en mer Rouge.

Le danois Maersk, l'allemand Hapag-Lloyd, le français CMA CGM et l'italo-suisse MSC ont fait savoir que leurs navires n'emprunteraient plus la mer Rouge "jusqu'à nouvel ordre", au moins jusqu'à lundi ou jusqu'à ce que le passage "soit sûr".

Le premier transporteur maritime français CMA CGM a "décidé d'ordonner" à tous ses porte-conteneurs "dans la région qui doivent passer par la mer Rouge, de rejoindre des zones sûres" ou de ne pas sortir des eaux jugées sûres, "avec effet immédiat et jusqu'à nouvel ordre".

Lundi, le géant britannique des hydrocarbures BP a annoncé lui aussi la suspension de tout transit en mer Rouge.

Que représente la mer Rouge dans le trafic?

La mer Rouge est une "autoroute de la mer" reliant la Méditerranée à l'océan Indien, et donc l'Europe à l'Asie.

Environ 20.000 navires transitent chaque année par le canal de Suez, porte d'entrée et de sortie des navires passant par la mer Rouge.

Selon la Chambre internationale de la marine marchande (ICS) basée à Londres, 12% du commerce mondial passe normalement par la mer Rouge.

Selon Jean-Philippe Casanova, délégué général d'Armateurs de France, de 200 à 250 navires de commerce qui vont vers le Moyen-Orient sont contrôlés par des armateurs français tous les ans, "ce qui fait entre 800 et 900 passages dans la région par an".

Quelles conséquences pour le commerce maritime?

Afin d'éviter la mer Rouge, les bateaux devraient passer par le Cap de Bonne-Espérance - à la pointe sud de l'Afrique -, ce qui rallonge considérablement les trajets: "Cela pourrait rallonger de six jours le trajet d'un bateau moyen qui vient d'Asie pour l'Europe et pourrait rajouter 300.000 à 400.000 dollars au coût du carburant", souligne Andreas Krieg, professeur au King's College de Londres.

Ce détournement pourrait "introduire une légère hausse du prix des marchandises (...) et le besoin de mettre un bateau de plus" dans les rotations des armateurs, avance Paul Tourret, directeur de l'ISEMAR, observatoire des industries maritimes mais "aujourd'hui la marchandise peut subir un surcoût d'une route plus longue".

Les marchandises les plus touchées seraient "tout ce qu'on consomme au printemps ou au début de l'été". Ces perturbations n'auront donc pas d'incidence sur les produits de Noël, déjà arrivés, précise M. Tourret.

Le retard dans tout le processus d'approvisionnement de la "chaîne logistique" dans l'industrie pourrait néanmoins donner plus de difficultés.

Selon Torbjorn Soltvedt, de l'entreprise spécialisée dans l'analyse de risque Verisk Maplecroft, la menace économique la plus immédiate concerne l'Egypte: "Dans un contexte de crise monétaire et d'inflation élevée, une baisse des revenus vitaux du canal de Suez arriverait à un mauvais moment" pour ce pays.

Jean-Philippe Casanova confirme que plusieurs questions se posent, "mais (qu')il faudrait avoir une boule de cristal pour connaître les impacts réels de ce conflit".

"L'inquiétude est surtout pour nos marins", souligne-t-il.

Poussés par les inquiétudes sur des difficultés d'approvisionnement par cette route commerciale capitale, les cours du pétrole étaient en hausse lundi.

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