Berlin dévoile un plan massif pour réduire les prix de l'électricité de son industrie

  • AFP
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L'Allemagne a dévoilé jeudi un plan d'aide de près de 30 milliards d'euros jusqu'en 2028 pour réduire les prix de l'électricité de son industrie, plongée dans la crise depuis plusieurs mois, à coup de baisses d'impôts massives et de subventions.

"Le gouvernement va soulager massivement l'industrie de ses coûts d'électricité", a affirmé le chancelier Olaf Scholz, dans un communiqué.

Fruit de plusieurs mois de discussions entre les partenaires de coalition au pouvoir à Berlin, le paquet prévoit d'abord de "réduire considérablement la taxe sur l'électricité" pour l'ensemble des entreprises industrielles, la ramenant de 1,537 centimes par kWh au minimum européen de 0,05 centime par kWh.

Un choc fiscal de 3 milliards d'euros par an, et qui pourrait s'appliquer jusqu'en 2028.

Quelque 350 entreprises les plus consommatrices d'énergie et "confrontées le plus à la concurrence internationale", bénéficieront en plus d'une prolongation "pendant cinq ans" de dispositifs compensant les coûts d'achats de certificats de CO2.

Le gouvernement a aussi intégré au paquet un versement unique de 5,5 milliards d'euros en 2024 pour réduire les redevances payées par les entreprises aux gestionnaires de réseaux électriques.

- 28 milliards d'euros -

"Le paquet décidé par le gouvernement fédéral apporte un soulagement urgent aux entreprises et constitue un pas important vers une plus grande compétitivité", s'est félicité le lobby industriel BDI, suite à ces annonces.

Au total, le plan devrait coûter "28 milliards d'euros" sur l'ensemble de la période, selon Berlin.

Il intervient après des semaines de discussions intenses entre les industriels, les syndicats, et le gouvernement.

L'Allemagne, qui a dépendu pendant des années du gaz russe bon marché pour se fournir en énergie, a dû se passer de cette ressource dans le sillage de la guerre en Ukraine l'an dernier.

Depuis, les industriels connaissent des prix de l'électricité particulièrement élevés, parmi les plus hauts en Europe. Certaines activités les plus énergivores, comme la chimie, peinent à retrouver leur niveau de production d'avant la guerre, menaçant d'opérer des délocalisations.

D'autant que le secteur doit investir massivement pour sa transition verte, et fait face à la concurrence des industries chinoise et américaine fortement subventionnées.

La crise de l'industrie fait plonger l'ensemble de l'économie, avec une récession de 0,4% prévue pour l'année par le gouvernement. L'ancienne locomotive de l'UE devrait être le seul pays du G7 à connaître une chute de son PIB cette année, selon le Fonds monétaire international (FMI).

L'allègement décidé sur la facture énergétique devrait se traduire par un prix d'environ six centimes le kilowattheure pour les entreprises énergivores, indique la presse allemande.

Cela correspondrait au montant proposé par le ministre fédéral de l'Économie, Robert Habeck, dans son plan initial dévoilé au printemps et prévoyant un mécanisme de plafonnement, mais catégoriquement refusé par le ministre des Finances, le libéral Christian Lindner.

Ce dernier craignait le coût engendré ainsi que les distorsions de concurrence vis-à-vis des entreprises n'en bénéficiant pas.

- Compromis -

Le paquet décidé jeudi constitue un compromis.

"Avec ces mesures, nous créons pour les prochaines années une sécurité de prix bas de l'électricité pour l'industrie", s'est félicité Robert Habeck.

Il a toutefois été critiqué par les syndicats, qui privilégiaient l'option d'un plafonnement massif des prix. "Ces allègements de taxes ne sont pas liés à des conditions de salaire et de pérennité de l'emploi", a ainsi fustigé IG Metall.

M. Lindner a de son côté salué un plan "reposant sur des solutions basées sur l'économie de marché" et respectant la règle constitutionnelle de "frein à l'endettement", qui interdit à l'Etat d'emprunter plus de 0,35% de son PIB chaque année.

Pour y parvenir, Berlin devrait financer une partie de son plan via un fonds pour "la transformation énergétique et climatique" qui est extérieur au budget fédéral.

Or, ce tour de passe-passe budgétaire pourrait être remis en cause mercredi par la Cour Constitutionnelle, saisie d'une plainte de l'opposition concernant la validité de l'utilisation de ces fonds prévus au départ pour faire face à la pandémie de coronavirus en 2020.

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