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Fin du premier round pour le marathon budgétaire: l'Assemblée nationale doit approuver mardi soir en première lecture l'ensemble du projet de budget 2019, dans un contexte de forte crispation autour du pouvoir d'achat, "gilets jaunes" en tête.
Après 36 jours et nuits d'examen, les députés LREM et MoDem vont voter pour ce deuxième projet de loi de finances du quinquennat, recettes et dépenses comprises, qui doit être adopté définitivement d'ici fin décembre. Le Sénat s'en saisira dès jeudi.
Le ministre des Finances Bruno Le Maire, qui a défendu le texte avec Gérald Darmanin (Comptes publics), martèle le cap fixé: "Baisser les impôts, baisser la dépense publique, baisser la dette". Quelque 4 160 postes seront supprimés dans la fonction publique. Le déficit doit atteindre 2,8% du PIB, sous la barre des 3%.
Pas question non plus d'un "zigzag" pour le Premier ministre, qui s'est rendu dans la matinée devant les élus du groupe majoritaire. "On vit un moment d'inquiétude" et "c'est difficile" mais "nous gagnerons collectivement par la cohérence, la constance et la détermination", a lancé Édouard Philippe au quatrième jour du mouvement des "gilets jaunes".
Les autres groupes politiques s'apprêtent à voter contre le budget. Même les centristes de l'UDI-Agir, qui s'étaient majoritairement abstenus sur le volet recettes il y a un mois, se prononceront "très majoritairement contre", a indiqué leur président Jean-Christophe Lagarde, car "parler d'un budget de pouvoir d'achat" est "un mensonge".
Les Républicains sont aussi vent debout contre un mitraillage selon eux "des classes moyennes, des retraités et des ruraux". D'après le groupe "Libertés et territoires", ce budget "n'est pas efficace économiquement" et "injuste socialement".
« Souffler sur les colères »
La gauche est unanimement contre. Selon les socialistes, "le gouvernement alourdit massivement et sans concertation la fiscalité sur le carburant" et "en même temps" allège "la fiscalité sur les plus-values des grands groupes". Les communistes dénoncent un gouvernement qui a "multiplié" les cadeaux aux plus riches, les Insoumis réclament "le rétablissement immédiat" de l'ISF.
Les bases avaient été posées l'année dernière - suppression de l'ISF, "flat tax" sur les revenus de l'épargne, suppression progressive de la taxe d'habitation... - si bien que la majorité pouvait anticiper des débats allégés. Il n'en a rien été, au gré d'une pluie d'amendements et d'échanges à rallonge.
La bataille a d'abord porté sur les chiffres, le gouvernement mettant en avant pour 2019 près de 19 milliards de baisse d'impôts et cotisations pour les entreprises, 6 milliards pour les ménages, tandis que les oppositions ont critiqué des tours de "passe-passe" et rapporté le vécu des Français.
Très vite, la question du pouvoir d'achat est devenue centrale et s'est cristallisée autour de la hausse des taxes sur les carburants au 1er janvier, de 2,9 centimes par litre sur l'essence et 6,5 centimes sur le diesel, au nom de la lutte contre le réchauffement climatique.
Les oppositions ont réclamé en vain un moratoire, et critiqué globalement que les recettes issues de la fiscalité écologique n'aillent pas intégralement à l'environnement. "Le ras-le-bol fiscal n'est pas nouveau", balaie M. Darmanin, accusant certains de "souffler avec démagogie sur les colères".
Les députés ont voté dès la fin de la semaine dernière une des mesures d'accompagnement annoncées, prévoyant d'exonérer en 2020 les aides au transport mises en place par des collectivités comme dans les Hauts-de-France.
Côté majorité, si l'adhésion aux objectifs est totale, certains, vivement interpellés sur le terrain, doutent de la méthode ou de la communication. "Depuis six mois on est en riposte; il faut arrêter de subir et valoriser ce qui est fait", selon la porte-parole LREM Aurore Bergé. Sa collègue Brigitte Bourguignon, présidente de la commission des Affaires sociales, juge qu'"on n'a pas encore répondu à cette colère" et cette demande de "protection" dans le pays.
Les députés MoDem soutiennent un budget qui "redonne du pouvoir d'achat au monde du travail, même si les Français ne l'entendent pas toujours".