Climat : le gaz naturel, énergie de transition ou fausse solution ?

  • AFP
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Le gaz naturel a-t-il un rôle à jouer dans la transition énergétique ? Moins polluant à l'usage que les autres énergies fossiles, il est toutefois de plus en plus critiqué par les ONG, et aussi désormais les investisseurs.

L'Agence internationale de l'énergie (AIE), qui vient de présenter sa somme annuelle sur l'avenir énergétique du monde, estime que le gaz a sa place dans un scénario compatible avec l'accord de Paris sur le climat. Dans son scénario dit de "développement durable", la demande en pétrole et en charbon doit chuter rapidement tandis que le gaz naturel doit au contraire progresser de 10% jusqu'à la fin des années 2020.

Pour l'AIE, la mission principale de cette source d'énergie relativement bon marché et abondante est de se substituer au charbon, très polluant mais largement utilisé aujourd'hui pour produire de l'électricité, en particulier en Asie. De façon plus anecdotique, le gaz naturel liquéfié (GNL) peut aussi propulser des navires en remplacement du fioul.

La position de l'AIE, qui conseille des pays développés, est cependant violemment attaquée par certaines ONG de défense de l'environnement. Global Witness juge ainsi la position de l'agence "perverse" et appelle à réduire de près de moitié le recours au gaz sur la prochaine décennie.

"L'AIE doit se libérer de l'influence de l'industrie des énergies fossiles et des pays qui nient l'urgence climatique, comme les États-Unis", estime Murray Worthy, chargé de campagne pour l'ONG. "Les gouvernements ne doivent pas être trompés par des prévisions irresponsables d'une organisation de plus en plus discréditée, et plutôt travailler à l'extinction des champs de pétrole et de gaz existants, tout en cessant de chercher de nouvelles réserves."

Signe que le rôle du gaz est controversé, la Banque européenne d'investissement (BEI) vient d'annoncer qu'elle cesserait de financer de nouveaux projets liés aux énergies fossiles, y compris le gaz, à partir de 2022. Une décision qui a suscité "l'opposition résolue" et "l'inquiétude" de l'Union internationale du gaz (IGU).

Énergie équivoque

Ces oppositions soulignent la nature équivoque du gaz naturel : c'est une énergie fossile qui émet du CO2 à la combustion, mais 30% de moins que le pétrole et moitié moins que le charbon, et elle s'avère moins néfaste pour la qualité de l'air. Pour ses défenseurs, c'est une "énergie de transition", et les groupes pétroliers comme Total ou Shell en produisent d'ailleurs de plus en plus, lançant des projets prévus pour durer des décennies.

"Lors de sa combustion, le gaz relâche moins de CO2, d'oxydes d'azote et de soufre que le charbon et le pétrole. Le remplacement du charbon par du gaz a eu un impact profond sur la qualité de l'air dans le nord de la Chine avec un immense bénéfice sur la santé publique", souligne Nicholas Browne, du cabinet Wood Mackenzie. Pour autant, "le gaz et le GNL sont peut-être meilleurs, mais sont-ils assez bons ?", s'interroge l'expert.

En effet, l'industrie gazière est aussi responsable, dès l'extraction, d'importantes fuites de méthane, un gaz à effet de serre à l'effet trente fois plus réchauffant que le CO2. "Les émissions de méthane liées à la production d'énergie à partir du gaz (sur toute la chaîne) sont largement sous-estimées", dénonce Cécile Marchand, des Amis de la Terre : au final, "le gaz n'émet pas toujours moins de gaz à effet de serre que d'autres sources d'énergie fossiles".

Le GNL, qui est en plein essor, nécessite aussi un certain nombre d'étapes (liquéfaction, transport, etc.) qui aggravent son empreinte carbone. "Exporter massivement du GNL sur les marchés asiatiques pour remplacer le charbon ne nous permettra pas de faire face au défi climatique", souligne Cécile Marchand, dont l'ONG prône une réduction drastique de la consommation d'énergie.

Sous pression, l'industrie gazière s'est engagée à limiter ses émissions de méthane, notamment à travers la Oil and Gas Climate Initiative (OGCI) qui regroupe les plus grands groupes mondiaux. Elle parie aussi sur le développement des techniques de capture et stockage de CO2, ainsi que sur l'essor des gaz renouvelables (la méthanisation des déchets agricoles ou la production d'hydrogène par l'électricité). Ces techniques restent cependant peu développées et pour certaines encore très coûteuses.

Commentaires

Eric

Il est évident que de remplacer tout de suite des centrales a charbon par des centrales a gaz est une bonne nouvelle pour la planète et il en est de même pour le transport martime ou il vaut mieux bruler du gaz que du fioul .
Quant aux ONG qui prônent une réduction immédiate de la consommation des énergie fossiles et donc du gaz, ce n'est que de la retorique contre-productive et totale inefficace. Oui devant le réchauffement, il faudrait arrêter tout de suite de brûler les énergies fossiles, mais comme notre civilisation est a présent total dépendante de l'energie ce que voudrait ces ONG entraînerait un effondrement de notre civilisation. Le remplacement des énergies fossile par des énergies renouvelables ne peut se faire que sur une durée de plusieurs décennies. Aucun gouvernement au monde ne risquera une décroissance brutale de sa consommation d'energie.
Vouloir tout , tout de suite, n'est pas du domaine du possible.
Un exemple: la technologie pour faire fonctionner les voitures essence au gaz existe depuis 30 ans. Renault et d'autres constructeurs le proposait dans leur catalogue. Il y a trente ans si la ville de Paris avait imposé le gaz pour les voitures et les bus même avec une période de transition de 15 ans Ce qui aurait été raisonnable, et bien aujourd'hui les particules fines ne seraient plus un sujet, et l'on aurait pas organisé un embouteillage permanent. Et pour enfoncer le clou sachez que des bus diesel ont encore été commandés récemment.

HATO

Le problème reste qu'il ne s'agit pas de réduire un peu le CO2 mais de le réduire beaucoup. L'ONG ne voit comme solution que réduire tout simplement la demande en énergie : approche complètement irréalisable en raison de la démographie toujours en expansion et d'une 'irrésistible aspiration à réduire les énormes disparités des niveaux de vie.
Dans ces conditions, solaire et éolien ne sont malheureusement pas la solution, leur intermittence entrainant des investissements en capacités back-up équivalentes (en gaz?).
La seule solution, a moins d'être un climato-sceptique masqué, reste le nucléaire. Eh oui! Il ne produit pas de CO2, ne pollue pas, partant n'affecte pas la biodiversité(y compris humaine) car au final les faibles radio-activités sont des phénomènes contre lequel l'évolution nous a rendu résistant au cours des quelques milliards d'années de vie sur terre (ce qui n'est pas le cas de la multitude de productions chimiques léthales que nous ne contrôlons pas. . )

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