Energie: l'UE cherche à surmonter le coup de froid franco-allemand

  • AFP
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Les dirigeants de l'UE se sont retrouvés jeudi à Bruxelles pour tenter d'aboutir à une réponse commune face à la flambée de l'énergie, une équation compliquée par la fracture de plus en plus visible entre Paris et Berlin.

La guerre en Ukraine et les sanctions imposées à la Russie ont provoqué un choc sur les prix du pétrole, du gaz et de l'électricité. Mais, depuis février, l'Europe réagit avec lenteur, affaiblie par les intérêts divergents des pays membres.

Le couple franco-allemand, moteur de la coopération européenne, semble en panne. Une réunion des ministres des deux pays, prévue le 26 octobre à Fontainebleau (France), a été reportée en janvier.

Le président français Emmanuel Macron a estimé jeudi que Berlin jouait une partition solitaire, semblant rejeter sur les Allemands la responsabilité des difficultés européennes.

"Je pense que ce n'est pas bon ni pour l'Allemagne ni pour l'Europe qu'elle s'isole (...). Notre rôle est de tout faire pour qu'il y ait une unité européenne et que l'Allemagne en fasse partie", a-t-il dit.

"Il est très clair que l'Allemagne a toujours agi de façon très solidaire", a répliqué Olaf Scholz.

Le chancelier avait été accusé d'égoïsme après avoir annoncé fin septembre un plan de soutien à 200 milliards d'euros pour l'économie allemande, non concerté avec ses partenaires.

Les deux dirigeants se sont vus en tête-à-tête juste avant la réunion des Vingt-Sept.

Une avancée a été annoncée sur un projet d'infrastructure bloqué depuis des années. La France, l'Espagne et le Portugal ont annoncé un accord pour remplacer le projet MidCat par un pipeline sous-marin entre Barcelone et Marseille, destiné à acheminer du gaz puis de l'hydrogène vert.

Lancé initialement en 2003, le projet MidCat (abréviation de Midi-Catalogne), était défendu par Lisbonne, Madrid et Berlin, mais se heurtait à l'opposition de Paris. Il visait à relier les réseaux gaziers français et espagnol via un pipeline de 190 kilomètres allant d'Hostalric, au nord de Barcelone, à Barbaira, à l'est de Carcassonne, en passant par les Pyrénées.

- Entreprises menacées

Bruxelles a lancé une série d'initiatives pour réduire la consommation d'énergie, faire baisser les prix et assurer sa sécurité d'approvisionnement, mais les difficultés persistent.

Il y a pourtant urgence, avec des milliers d'entreprises européennes qui craignent pour leur survie, menacées par la concurrence aux Etats-Unis ou en Asie où les tarifs sont restés plus sages.

Plusieurs diplomates s'attendent à des discussions très longues, se prolongeant dans la nuit, entre les 27 chefs d'Etat et gouvernement.

Dans un entretien à l'AFP, la ministre espagnole de la Transition écologique, Teresa Ribera, a critiqué ouvertement le travail de la Commission européenne.

"Les propositions sont encore un peu timides: on manque toujours de mesures concrètes sur une grande majorité de sujets. Il y a eu certes un réel effort depuis un an (...) mais il est frustrant de voir à quel point la réaction de l'Europe face au défi auquel nous faisons face est lente et laborieuse", a-t-elle dit.

Mais la présidente de la Commission Ursula von der Leyen est confrontée aux désaccords entre les Vingt-Sept qui ont chacun leur propre mix énergétique, les uns s'appuyant sur le nucléaire, d'autres sur le gaz ou même le charbon pour produire leur électricité.

Ils se divisent notamment sur la question d'un plafonnement du prix du gaz utilisé pour produire de l'électricité. Un dispositif de ce type est déjà appliqué en Espagne et au Portugal, où il a permis de faire chuter les prix.

Plusieurs pays dont la France demandent l'extension de ce mécanisme, dit "ibérique", à l'échelle de l'UE.

Mais l'Allemagne s'y oppose, ainsi que plusieurs pays nordiques, dont le Danemark et les Pays-Bas, rétifs aux interventions étatiques sur les marchés.

Berlin estime que faire baisser artificiellement le prix du gaz nuirait à l'objectif de sobriété énergétique, en incitant à consommer plus.

Un projet de conclusions du sommet réclamait cependant à la Commission de préparer une proposition pour cet instrument. "Le modèle ibérique mérite d'être étudié. Des questions restent en suspens, mais je ne veux négliger aucune piste", a déclaré mercredi Mme von der Leyen.

Mme von der Leyen a détaillé cette semaine d'autres propositions: des achats de gaz en commun, de nouvelles règles pour tenter d'imposer le partage du gaz en Europe pour aider les pays les plus en difficulté, ou encore une réforme de l'indice du marché gazier TTF (la "Bourse du gaz" européenne), utilisé comme référence dans les transactions des opérateurs.

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