Lancement du programme Spin pour une économie numérique "frugale"

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Le programme national de recherche Spin, qui vise à garantir une économie numérique "frugale" et "durable", a officiellement été lancé lundi à Grenoble dans le laboratoire Spintec.

Le programme Spin, piloté par le Commissariat à l'énergie atomique (CEA) et le Centre national pour la recherche scientifique (CNRS), s'inscrit dans le plan "France relance 2030". Doté de 38 millions d'euros sur huit ans, il doit servir à financer la recherche la plus fondamentale en spintronique.

Les moyens alloués vont être concentrés sur des thématiques avancées ou plus risquées, allant de composants intégrant directement de l'intelligence artificielle à des capteurs plus autonomes ou des outils de calculs à faible consommation d'énergie.

Ils bénéficieront également à une recherche ouvrant la porte à des disciplines connexes, comme la physique quantique ou la biologie, mais aussi au développement indispensable de matériaux innovants, étudiés et utilisés à l'échelle du milliardième de mètre.

Cette science doit "ouvrir les portes d'une électronique agile, frugale et durable", a espéré Alain Schuhl, directeur général délégué à la science au CNRS.

Elle est au coeur de l'activité de Spintec, le laboratoire spintronique et technologie des composants composé d'une centaine de chercheurs.

La spintronique "a révolutionné par exemple le stockage et calcul informatique avec les têtes de lecture des disques durs" fonctionnant grâce aux découvertes sur l'électronique de spin à la fin des années 1990, a expliqué à l'AFP Vincent Cros, directeur du programme Spin pour le CNRS. Cette révolution se poursuit depuis avec les mémoires MRam développées depuis les années 2000.

Lucian Prejbeanu, directeur exécutif de Spintec et responsable du programme pour le CEA, a poursuivi sur les perspectives de recherche comme le "calcul informatique bio-inspiré, dont le fonctionnement s'inspire de celui du cerveau".

Le programme qui va mobiliser 440 chercheurs explorera plusieurs grands domaines, dont les capteurs de champs magnétiques, déjà utilisés par exemple dans les systèmes embarqués dans les automobiles, le stockage informatique, le calcul informatique, la communication sans fil et l'intelligence artificielle.

Les huit projets identifiés dans le programme doivent relever le "défi de la consommation énergétique de l'économie numérique", a rappelé Lucian Prejbeanu. Les prévisions montrent qu'à l'horizon 2030, le monde numérique sera responsable de 20 à 30% de la consommation mondiale d'électricité, selon un communiqué du CEA.

Le programme doit aussi permettre de s'affranchir de matériaux critiques comme les terres rares, aujourd'hui incontournables, et répondre à des enjeux de souveraineté dans l'électronique.

Il touche aussi bien à la physique des matériaux qu'à des travaux de recherche fondamentale, comme celui sur les skyrmions, des particules "virtuelles" qui pourraient être manipulées pour réaliser des calculs informatiques.

Des travaux effectués à l'échelle du milliardième de mètre, et avec des temps de réaction se mesurant en milliardième de secondes, voire moins.

La spintronique doit beaucoup aux travaux du physicien français Albert Fert, lauréat avec l'Allemand Peter Grünberg du Nobel de physique 2007 pour sa découverte, en 1988, de la magnétorésistance géante.

Ce phénomène change la résistance électrique d'un matériau conducteur quand il est soumis à un champ magnétique. Il utilise la propriété de spin d'un électron, c'est-à-dire sa capacité à s'orienter dans un sens ou un autre sous l'effet d'un champ magnétique, un peu comme l'aiguille d'une boussole.

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