Le nucléaire n'est « plus un tabou » mais a encore du chemin à parcourir, selon le patron de l'AIEA

  • AFP
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L'énergie nucléaire a encore du chemin à faire pour concrétiser sa renaissance, même si elle n'est plus "tabou" en particulier dans l'arène des négociations climatiques, a déclaré mardi le patron de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA).

"À la fin de cette semaine, la COP28 commence. Nous revenons de loin dans ces importantes réunions internationales", a dit Rafael Mariano Grossi devant responsables et professionnels du nucléaire réunis au World Nuclear Exhibition (WNE), le salon du nucléaire civil organisé près de Paris. "Avant, jamais les pays qui recourent à l'énergie nucléaire n'auraient été prêts à le dire. C'était un tabou aux COP, le nucléaire n'était pas considéré comme faisant partie de la solution. Et cette fois, tous les pays qui utilisent le nucléaire vont fièrement s'unir et dire à la COP que pour eux le nucléaire fait partie de la solution" face au réchauffement climatique.

M. Grossi a cité les projets de pays européens, la Chine championne des constructions nouvelles, "des développements importants en Afrique" avec l'édification d'une centrale de plusieurs tranches en Egypte, le premier démarrage aux Etats-Unis depuis des décennies, et "peut-être des nouvelles à venir en Arabie saoudite".

Selon lui, le monde devrait compter une douzaine de nouveaux pays nucléaires "dans la décennie à venir", a-t-il aussi dit à la presse. Ghana, Kenya, Kazakhstan, Ouzbekistan, Philippines... dix pays sont en phase de décision et 17 moins avancés. "Tout cela pourrait signifier que nous sommes dans une situation extrêmement positive. Or ce n'est pas le cas : la réalité est que tous ces développements ajoutent bien moins de nucléaire qu'il n'en faudrait si nous voulons respecter les accords de Paris" sur le climat, a prévenu le responsable.

Selon le directeur de l'agence onusienne, le monde a gagné cette année 7 gigawatts (GW) de capacités supplémentaires, et 4 GW l'an dernier, "ce qui veut dire que nous sommes très en deçà du niveau qu'il faudrait". Pour atteindre la neutralité carbone en 2050, l'AIEA comme l'Agence internationale de l'énergie (AIE) tablent au moins sur un doublement des capacités de production nucléaire. Aujourd'hui "on a environ 400 réacteurs dans 31 pays, on aurait besoin du double ou peut-être plus", selon M. Grossi.

Le responsable cite des obstacles politiques, avec par exemple les débats au sein de l'UE. Le financement est un autre sujet.

A la COP28 de Dubaï, six pays dont la France espèrent engager une quarantaine d'Etats à appeler à tripler les capacités de production nucléaire d'ici à 2050.

Commentaires

Schricke Daniel

Tant qu'il sera possible de se faire "beaucoup de blé" avec les ENRi, le nucléaire sera combattu avec énergie par tous ceux qui n'ont aucun intérêt à le voir se développer... ou par des pays qui ont choisi d'abandonner le nuc. et qui redoutent que ceux qui ne l'ont pas suivi dans cette évidente impasse (malgré d'importantes "pressions" !...) en tirent un avantage économique à moyen ou long terme...
Bien entendu, tout rapprochement avec la "bagarre" franco-allemande, au niveau européen, concernant l'énergie, ne serait qu'une coïncidence sans objet !...

Marfaing

Il est toujours fascinant de constater que les français, qui ont une position unique au monde en termes de nucléaire civil, veulent absolument que cette source d’énergie soit une réponse incontournable à la production d’énergie. Mais, combien de pays dans le monde se passent aujourd’hui du nucléaire sans problème ?
Ils occultent plusieurs points sciemment ou inconsciemment. Oublions les aspects écologiques un instant.

• Même si l’uranium entre aujourd’hui pour une faible part dans le coût de production électrique, il provient à 100% de l’étranger où la Russie et ses satellites ont une position mondiale dominante. Quid d’un futur "OPEP de l’uranium" ? Rappel : l’uranium 308 a pris déjà + 60% les 6 derniers mois !
• La CRE sur la base d’une capacité d’utilisation du parc actuelle de 68% (ce qui est très bas au regard des performances des autres pays utilisant l’énergie nucléaire) fournit un prix de production d’environ 60 Euros /MWh. Ce prix est déjà supérieur à l’éolien onshore et au photovoltaïque.
• Le parc nucléaire actuel doit être remplacé dans les 15 ans à venir. Or les prix du nouveau nucléaire dépasse les 100 Euros/ MWh (hinkley Point ou Flamanville)
• Les solutions de stockage des énergies renouvelables sont aujourd’hui au prix du nucléaire existant français.
• Qui financent et à quel taux les nouveaux investissements nucléaires français ?
• Les coûts de production des énergies renouvelables ne cessent de baisser !

Les allemands soucieux de la compétitivité de leurs industries sont plus inquiets du développement des énergies renouvelables outre Atlantique, subventionnées massivement par l’IRA de Biden, que du nucléaire français qui est pour le chancelier Olaf Scholz :"un cheval mort !"
Selon l’institut Böckler Stiftung IMK, les coûts de production par mégawatt-heure d'électricité en 2021 en Allemagne, par exemple pour l'éolien terrestre, se situaient dans une fourchette de 37 à 66 euros. Aux États-Unis, il est de 29 à 51 euros. Pour l'éolien offshore, les coûts de production allaient de, en Allemagne de 63 à 102 euros, aux États-Unis de 69 à 112 euros. La conclusion des experts de l'IMK est que l'Allemagne n’est pas condamnée à la désindustrialisation.
L'Allemagne est en mesure d'assurer la rentabilité de la production d'électricité renouvelable comparable à celle des États-Unis.

Rochain Serge

Personne n'a autant attaqué les renouvelables que les nucleophiles y voyant un danger pour leur machine infernale sans avenir.

Schricke Daniel

à Marfaing:
Si vous le dites !... C'est certainement vrai ?
Quoi que...., j'ai quelques questions à vous proposer:
Par exemple vous écrivez (je cite): "La CRE sur la base d’une capacité d’utilisation du parc actuelle de 68% (ce qui est très bas au regard des performances des autres pays utilisant l’énergie nucléaire) fournit un prix de production d’environ 60 Euros /MWh. Ce prix est déjà supérieur à l’éolien onshore et au photovoltaïque."
Bien ! Alors, comment expliquez-vous qu'EDF soit obligée (afin de permettre à la "concurrence" de seulement exister !) de céder sa production nucléaire "historique" à 42 €/mwh, à ses "concurrents" ? (en perdant ainsi beaucoup d'argent, et en creusant ainsi son "déficit"...) alors que ces "concurrents" ne prennent aucun risque industriel, puisqu'ils se contentent de piller EDF en achetant à bas prix les Mwh qu'ils revendent 2 à 3 fois plus cher, en "s'en mettant plein les poches"... (quand ça les arrange !)
Par ailleurs, vous fustigez le problème de "dépendance" de la France vis à vis de la fourniture d'uranium, en "oubliant" complètement que la plupart des composants des ENRI sont importés de l'étranger, en particulier, de Chine !... (un "ami"... pour l'instant !)
Et, puisqu'on en parle, vous n'ignorez certainement pas que cette Chine a, actuellement, en chantier, ou en projet, plusieurs dizaines de nouveaux réacteurs nucléaires, comme la plupart des pays développés ou en développement (en plus des panneaux PV, dont iles ont pratiquement l'exclusivité de la production), malgré votre affirmation "gratuite" selon laquelle (je cite):"les français, qui ont une position unique au monde en termes de nucléaire civil, veulent absolument que cette source d’énergie soit une réponse incontournable à la production d’énergie..."
Enfin, vous écrivez (je cite): "L'Allemagne est en mesure d'assurer la rentabilité de la production d'électricité renouvelable". Bien ! Vous qui semblez bien documenté, vous n'ignorez certainement pas que l'Allemagne propose les tarifs de l'électricité parmi les plus élevés de l'Europe, avec un taux de rejet de GES/Mwh 4 fois plus élevé que le taux français, malgré les centaines de milliards dépensés dans la production d'électricité "renouvelable" !... (chacun sait, que "l'energiewende" allemand est un fiasco retentissant !...)
Alors, merci de ne pas inverser les vérités !...

Marfaing

Bien ! Alors, comment expliquez-vous qu'EDF soit obligée (afin de permettre à la "concurrence" de seulement exister !) de céder sa production nucléaire "historique" à 42 €/mwh, à ses "concurrents" ? (en perdant ainsi beaucoup d'argent, et en creusant ainsi son "déficit"...) alors que ces "concurrents" ne prennent aucun risque industriel, puisqu'ils se contentent de piller EDF en achetant à bas prix les Mwh qu'ils revendent 2 à 3 fois plus cher, en "s'en mettant plein les poches"... (quand ça les arrange !)

Vous oubliez que c'est Sarkozy qui a fait ce choix . les allemands étaient opposés à l'Arenth pour concurrence déloyale!

Oui la Chine exporte aujourd'hui ses production de PV. Mais une fois installé le soleil reste chez nous. L'uranium il faut toujours en acheter!

Comme vous le savez certainement le coût de production de l'électricité en Allemagne représente 49 % du prix final le reste se sont des taxes et des coûts de raccordement au réseau. Comme au Danemark ces coûts élevés permettent les investissements en ENR.

Compte tenu de la situation financière d'EDF comment la France va-t-elle réaliser ses investissements colossaux?

chacun sait, que "l'energiewende" allemand est un fiasco retentissant !...) développer cette assertion!
Car oui l'Allemagne pollue encore beaucoup trop. Mais la consommation de charbon a diminué de 19,1 % sur les neuf premiers mois de l'année et la diminution de sa demande de pétrole est de 90.000 barils par jour. Ce sera la plus forte de la planète, à l'exception du Pakistan.
Les objectifs d'installation en PV ont dépassé les prévisions. Donc cela bouge et cela bouge très vite! Beaucoup plus vite que la France!

Esperluette

Ils étaient présentés à l’époque comme impossibles, et pourtant les accidents graves ou majeurs se sont multipliés, entraînant des rejets massifs de matières radioactives. Ils ont touché aussi bien des cœurs de réacteurs (Three Mile Island, Tchernobyl, Fukushima) que des dépôts de déchets radioactifs ou des usines de combustible (Mayak, Tokaimura, WIPP, Asse).

De vastes zones géographiques ont été ainsi rendues toxiques pour tous les êtres vivants et les irradiations et les contaminations radioactives continuent de faire de nombreuses victimes, y compris autour des installations en fonctionnement « normal ».

J'ajoute que l’industrie du nucléaire a officiellement accumulé en France plus de 2 millions de tonnes de déchets radioactifs, dont 200 000 tonnes dangereuses sur de longues périodes, un volume très sous-estimé qui ne comptabilise ni les stériles et déchets miniers abandonnés à l’étranger, ni les « matières » destinées à un hypothétique réemploi (combustibles usés, uranium appauvri, uranium de retraitement…).
Le démantèlement et la dépollution des sites déjà contaminés sont à peine engagés, s’annoncent excessivement longs et coûteux, et vont encore aggraver le bilan des déchets.

Pourtant, hors de tout débat démocratique, et sans avoir procédé à un réel bilan des choix passés et des options qui s’offrent aujourd’hui, nos gouvernants s’apprêtent à relancer un nouveau programme électronucléaire. Sous prétexte d’urgence climatique, et sur la base d’arguments tronqués, simplistes, voire lourdement erronés, des lobbyistes disposant d’importants relais médiatiques s’emploient à organiser l’amnésie.

Rappelons que les conséquences d’accidents majeurs tels que Tchernobyl et Fukushima ne peuvent se réduire à un petit nombre de morts « officiels ». Le fait qu’un bilan sanitaire et économique sérieux du drame de Tchernobyl ne soit toujours pas établi devrait interpeller tout esprit scientifique. Un large éventail de morbidités affecte les habitants des territoires contaminés : conditions de vie dégradées, paupérisation et stigmatisation seront leur lot pour des siècles.

Deux faits majeurs de notre actualité devraient plus que jamais nous alerter : le dérèglement climatique, qui s’accélère, et la guerre en Ukraine. La raréfaction de l’eau douce et la réduction du débit des fleuves liés à une sécheresse bientôt chronique en France, tout autant que les risques de submersion des zones côtières dus à l’élévation du niveau des océans et à la multiplication d’évènements climatiques extrêmes vont rendre très problématique l’exploitation des installations nucléaires. Miser sur de nouveaux réacteurs dont le premier serait, au mieux, mis en service en 2037 ne permettra en rien de réduire dès aujourd’hui et drastiquement nos émissions de gaz à effet de serre, comme l’urgence climatique l’exige. Par ailleurs, au-delà des horreurs de la guerre, la vulnérabilité de la centrale de Zaporijia menace l’Europe entière. Dans un tel contexte d’instabilité géopolitique, comment allons-nous garantir la paix éternelle requise par le nucléaire ?

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