Méthanisation : le rapport du Sénat, une  « caution douteuse » selon l'association Eau et Rivières de Bretagne

  • AFP
  • parue le

Le rapport de la mission d'information du Sénat sur la méthanisation publié la semaine dernière est "partial" et "apporte une caution douteuse" à cette pratique industrielle, a estimé mardi l'association Eau et Rivières de Bretagne qui réclame un "moratoire immédiat".

"De par son caractère partial, ce rapport ne répond pas aux attentes des citoyens qui souhaitent une information complète, indépendante des lobbies qui ont de gros intérêts financiers dans le développement de la méthanisation", écrit l'association environnementale dans un communiqué.

Estimant que "beaucoup d'affirmations du rapport sont non démontrées, partielles, voire fausses", l'association considère que les avis d'experts indépendants ont été minorés au bénéfice de ceux émanant d'organismes impliqués dans le développement de la méthanisation.

"Loin de prendre appui sur les travaux de ces experts indépendants, les éléments retenus font entre autre la part belle aux avis de GRDF, du SER (syndicat des énergies renouvelables) et de Solagro (société qui propose, selon son site internet, une "expertise innovante au service des transitions énergétique, agroécologique et alimentaire", ndlr), organismes impliqués dans le développement de la méthanisation, ce qui ne manque pas de nous interroger sur les motivations de la mission", écrit l'association.

Nombre d'experts indépendants auditionnés ont "exprimé leurs réserves, pointant les effets négatifs de la méthanisation sur les systèmes de production agricole, et l'évaluation trompeuse des émissions de gaz à effet de serre", fait-elle valoir.

Eau et Rivières rappelle les pollutions récentes en Bretagne provoquées par des méthaniseurs et émet plusieurs critiques. La méthanisation "menace l'autonomie alimentaire du territoire en induisant un changement d'affectation des sols avec des surfaces agricoles détournées de leur vocation alimentaire, et en induisant une augmentation du prix du fourrage utilisé dans les méthaniseurs"; elle "accentue un modèle agricole intensif, et met en danger l'agriculture paysanne pourvoyeuse d'emploi"; elle "rend problématique l'installation de jeunes agriculteurs, avec l'augmentation forte du capital des entreprises et de la taille des unités" et mobilise "des financements très importants".

"Face aux incertitudes et aux effets négatifs avérés de la méthanisation, notre association renouvelle sa demande de moratoire immédiat", écrit encore l'association.

Selon le rapport de la mission sénatoriale, la France doit encourager un "développement maîtrisé" de la méthanisation pour accélérer la transition énergétique. Environ un millier d'unités de méthanisation sont en service en France et plus de 1 300 en projet. La méthanisation consiste à produire du gaz et de l'électricité à partir de matière organique, notamment des effluents d'élevage.

Commentaires

EtDF

Pour une méthanisation raisonnée et raisonnable...
https://www.bioenergie-promotion.fr/65352/situation-et-avenir-des-insta…
Il semble que l'on freine dur en Allemagne, malgré (ou du fait d') une très importante expérience... mais comme nous sommes toujours les meilleurs - même si beaucoup en retard - grâce à d’excellents lobbyers et non moins excellents sénateurs, on y va à fond le mensonge y compris en produisant du CO2 bio (c'est nouveau ça vient de paraître), exclusivement sélectionné par les plantes, natürlische!
L’Office franco-allemand pour la transition énergétique a rédigé une note de synthèse portant sur les installations de biogaz en Allemagne, sur leurs répercussions économico-écologiques au-delà du marché de l’électricité, et sur les scénarios d’évolution du parc jusqu’en 2035.

Cette note reprend les éléments d’un rapport rédigé dans le cadre du projet de recherche MakroBiogas. Elle s’emploie tout d’abord à exposer les effets du parc allemand d’installations de biogaz dans d’autres domaines que celui de la production d’électricité, et en premier lieu les répercussions sur les processus naturels et les activités agricoles que sont les sols et leur exploitation, les services écosystémiques, le recyclage et l’élimination ainsi que la réduction des gaz à effet de serre non énergétiques. Pour ces services supplémentaires, actuellement cofinancés par la loi allemande sur les énergies renouvelables (EEG), il a été procédé dans la mesure du possible à des estimations quantitatives ou financières.

La note présente ensuite des scénarios d’évolution du parc d‘installations de biogaz en Allemagne, compte tenu des réductions significatives des subventions jusqu’en 2035 introduites en 2014 et en 2017 par les modifications de la loi EEG. Ces scénarios vont de la « disparition progressive du parc » au « maintien du parc ». Pour le scénario « disparition progressive du parc », la note développe en outre les implications pour le système énergétique, qui requerrait que d’autres technologies se substituent à l’électricité et la chaleur renouvelables ainsi qu’aux services contrôlables du modèle précédent. Ces questions gagneront particulièrement en importance à partir du milieu des années 2020, une grande partie du parc d’installations de biogaz étant alors amenée à ne plus bénéficier du tarif d’achat fixe introduit par la loi EEG.

Et il n' y a pas que Eaux et Rivières de Bretagne qui prend position....
Voir le Collectif Scientifique National, pour une Méthanisation raisonnée 'CSNM et ses dossiers

Laurent Rigole

Il était prévisible que ce rapport, qui a pris les avis des uns et des autres, et ne s'est positionné que lorsqu'il y avait suffisamment de preuves, et a laissé des questions ouvertes lorsqu'il n'y avait que des doutes, ne ferait pas l'unanimité, notamment de la part des détracteurs farouches comme le fameux CSNM, qui n'a de scientifique que son nom et qui cumule un nombre incalculable de contre-vérités.
Quant à l'Allemagne on la prend toujours en comparaison en oubliant de préciser que :
- certains de ses sites sont anciens et ont "essuyé les plâtres"
- les règles ne sont pas du tout les mêmes qu'en France (notamment au niveau des intrants, limités à 15% de cultures alimentaires en France et pas là-bas)
- la production d'électricité nucléaire étant réduite il a bien fallu aller à marche forcée vers d'autres alternatives
Bien entendu que la méthanisation doit être surveillée et qu'on ne doit pas faire n'importe quoi. Mais la réalité aujourd'hui c'est que 80% des unités sont sur des sites agricoles, que la plupart sont à taille humaine, qu'elle permet un revenu stable durant des années à des exploitant qui pourraient disparaître autrement du jour au lendemain à cause de la fluctuation des marchés, et que les incidents sont tellement rares (je ne parle même pas des accidents, quasi inexistants) et avec peu de conséquences que ce sont toujours les mêmes qui sont pris en exemple, ad nauseam. Pour avoir visité un certain nombre de sites, la méthanisation est l'affaire de gens responsables, souvent des regroupements d'agriculteurs. C'est aussi aujourd'hui la chance de décarboner rapidement le gaz naturel, de le produire localement et s'affranchir des fluctuations brutales des cours (on peut en voir encore les effets ces jours ci), car il ne faut pas rêver : ce n'est pas demain la veille qu'on pourra s'en passer. 3/4 de la pointe d'hiver de chauffage utilise cette énergie, et si on voulait la remplacer par des ENR électriques il faudrait des milliers d'éoliennes ou des dizaines de centrales nucléaires supplémentaires.

Ajouter un commentaire

Suggestion de lecture