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À l'heure où l'Europe suffoque sous une canicule inédite et où se multiplient les signaux toujours plus alarmistes du réchauffement, une nouvelle session de négociations climatiques s'achevait jeudi à Bonn sur quelques avancées timides mais aussi sur des points d'achoppement.
Comme tous les ans, des délégations du monde entier se sont retrouvées à Bonn pendant dix jours pour préparer la conférence annuel de l'ONU sur le climat (COP) qui se tiendra cette année en décembre au Chili. L'objectif? Avancer sur des points techniques pour préparer les décisions politiques à venir.
Une session qualifiée de "très intense" par Patricia Espinosa, responsable climat de l'ONU. Ces négociations interviennent six mois après la COP24 à Katowice en Pologne, qui avait permis de boucler les règles mettant en pratique l'Accord de Paris de 2015. Cet accord prévoit de maintenir le réchauffement climatique en-dessous de +2°C par rapport à la période pré-industrielle, voire de +1,5°C.
À Katowice, certains points restés en suspens avaient été renvoyés à Bonn. En octobre dernier, le groupe d'experts de l'Onu sur le climat (Giec) tirait la sonnette d'alarme, avertissant que les impacts d'un réchauffement de 2°C seraient bien plus importants qu'à +1,5°C. Les engagements actuels des Etats entraîneraient +3°C.
La Pologne, les États-Unis, l'Arabie Saoudite, le Koweit et la Russie avaient rejeté dans la déclaration finale une mention selon laquelle les participants accueillaient "favorablement" les conclusions de ce rapport scientifique, qui a encore fait l'objet de passes d'armes à Bonn.
Un observateur a fait savoir à l'AFP que la délégation saoudienne avait réagi violemment à une proposition de texte saluant le rapport du Giec, et refusé toute mention d'objectifs précis de réduction d'émissions des gaz à effet de serre.
"Pourquoi sommes-nous encore en train de débattre de ça?", a critiqué Eddy Perez, du groupement d'ONG Climate action network, lors d'une conférence de presse. "La science a été là (dans le processus des négociations ndlr) depuis le début et elle doit continuer à nous informer."
Le Giec doit remettre avant la fin de l'année deux autres rapports, l'un sur les océans et la cryosphère et un autre sur l'occupation des sols et la désertification.
« Qui s'en soucie ? Les jeunes »
Les règles des mécanismes d'échange de quotas d'émissions carbone décidées dans le cadre de l'article 6 de l'Accord de Paris ont aussi beaucoup occupé les négociateurs, lors de discussions très techniques. Cet article prévoit que les pays puissent atteindre leurs objectifs de réduction des émissions via des mécanismes de transfert. Il s'agit d'en définir précisément les contours et d'empêcher que des réductions d'émissions soient comptées deux fois.
Cet article 6 fera certainement l'objet de discussions supplémentaires, plus informelles, d'ici la COP25 au Chili, selon un observateur. "Si on rate la définition des règles liées aux mécanismes de marché liés à l'Accord de Paris, on crée un trou béant", a avertit Lucile Dufour du Réseau Action Climat (RAC). "On touche à sa crédibilité même." Les discussions ont aussi porté sur les "dommages et pertes" subies par les régions touchées par des catastrophes liées au réchauffement climatique. Avec la question sous-jacente : qui doit payer ?
"Les gouvernements des pays développés ne font pas preuve d'un intérêt significatif pour résoudre les pertes et dommages auxquels font face les pays en développement", a critiqué Sadie de Coste, une représentante des organisations de jeunes. "Savez-vous qui s'en soucie ? Les jeunes comme moi", a-t-elle martelé lors d'une conférence de presse, rappelant que des écoliers descendaient dans la rue depuis des mois pour réclamer plus d'actions contre le réchauffement climatique. "Si vous n'agissez pas, nous voterons contre vous", a-t-elle lancé à l'adresse des responsables politiques, suscitant des applaudissements.
Avant la COP25, le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres a convoqué un sommet en septembre à New York sur le climat. Il appelle les pays à présenter des plans concrets pour réduire de 45% les gaz à effet de serre sur les dix ans à venir et pour les supprimer totalement d'ici 2050.
Les ONG espèrent aussi que cette rencontre sera l'occasion pour plus de pays de relever leurs ambitions dans leurs contributions nationales (NDC), des plans qui doivent être mis à jour en 2020.