- Connaissance des Énergies avec AFP
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Projet de Sizewell C
L'Élysée y a consacré sa première annonce lors de la visite d'État d'Emmanuel Macron au Royaume-Uni : l'énergéticien public français EDF détiendra 12,5% de la future centrale nucléaire britannique de Sizewell C, que Paris érige en symbole de sa collaboration avec Londres sur la relance de la filière.
Sizewell C
Cette annonce conjointe avec EDF marque "une nouvelle étape" dans ce projet à la mise en œuvre laborieuse, dans laquelle l'entreprise publique française investira "environ 1,1 milliard de livres" (1,3 milliard d'euros), a indiqué l'Elysée dans un communiqué.
Mais si les autorités en font volontiers un exemple de la collaboration de Londres et Paris sur le nucléaire, des voix critiques s'élèvent déjà au Royaume-Uni pour dire que l'énergéticien y investit trop peu.
Depuis le début de la guerre en Ukraine, Londres redouble d'efforts pour se dégager des hydrocarbures et a fait du nucléaire l'une de ses priorités. Une façon aussi d'atteindre ses ambitions climatiques, en complément des immenses champs d'éoliennes construits en mer.
Sizewell C, qui verra sortir de terre deux réacteurs nucléaires de nouvelle génération de type EPR, est porté par le groupe français, qui gère déjà le vieillissant parc nucléaire britannique et construit en parallèle une autre centrale nucléaire, Hinkley Point C, dans le sud-ouest de l'Angleterre.
« Plus d'hésitations »
"Par cet investissement, EDF s'implique donc financièrement dans ce projet rentable, en complément de son rôle plus opérationnel", a souligné l'Elysée.
Le groupe chinois CGN avait été évincé du projet en 2022. Depuis, le gouvernement britannique était devenu actionnaire majoritaire et EDF a réduit sa part - l'énergéticien détenait 16,6% à fin 2024, ce qui équivalait alors à 652 millions d'euros.
EDF avait dès le début posé comme condition à sa contribution financière qu'il ne garde "qu'une participation minoritaire (...) d'un maximum de 20%", mais les participations finales restaient à déterminer.
Sizewell C, qui ne devrait pas commencer à produire de l'électricité avant 2035, coûtera au total au moins 20 à 30 milliards de livres (23 à 35 milliards d'euros), selon les chiffres officiels. Ce sera sans doute bien davantage selon des estimations récentes contestées par le gouvernement britannique.
Londres a déjà alloué presque 18 milliards de livres à ce projet et s'active en coulisses pour chercher d'autres partenaires privés.
Le groupe britannique Centrica est pressenti pour prendre une part substantielle aux côtés d'EDF tandis que le canadien Brookfield Corporation pourrait devenir premier actionnaire, à plus de 20%, selon le Financial Times.
Le Premier ministre britannique Keir Starmer a salué l'annonce d'EDF mardi, assurant "qu'il n'y aurait plus d'hésitations ni de retards concernant Sizewell C". Mais le gouvernement britannique ne prendra sa "décision finale d'investissement" sur Sizewell C que plus tard cet été.
« Strict minimum »
L'organisation britannique d'opposants Together Against Sizewell C (TASC) assure qu'EDF investit en réalité "le strict minimum dans le projet", ce qui fera peser une part plus importante du financement sur le contribuable britannique.
Mais en France, où la relance de la filière a été actée par le gouvernement, on surveille de près les dépenses d'une entreprise 100% publique. Les sommes astronomiques et les dérapages de budgets associés aux projets nucléaires d'EDF au Royaume-Uni font grincer des dents.
En janvier, la Cour des comptes avait appelé l'État et EDF à lever les nombreuses "incertitudes" avant de poursuivre le vaste programme de construction de nouveaux réacteurs nucléaires EPR. Et deux députés français ont qualifié en avril de "gouffre financier" l'autre grand projet nucléaire britannique, Hinkley Point C, dont le groupe français détient 72,6%.
La construction est en cours mais le projet a vu son calendrier et ses coûts déraper à plusieurs reprises.
Londres investit de son côté massivement dans la filière : le gouvernement a promis il y un mois d'injecter plus de 30 milliards de livres (35 milliards d'euros) pour relancer l'énergie nucléaire dans le pays, pour Sizewell C, mais aussi des petits réacteurs et la recherche sur la technologie prometteuse de la fusion.