- Connaissance des Énergies avec AFP
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Trente-cinq frappes de drones menées par les paramilitaires ont visé jeudi à l'aube l'est du Soudan, dont une importante centrale électrique, a déclaré une source militaire à l'AFP, entraînant une coupure de courant dans les principales villes du pays et faisant trois morts.
"A l'aube, la milice a lancé 35 drones contre les villes d'Atbara, Ad-Damer et Berber, dans l'Etat du Nil, visant des installations civiles", a déclaré cette source sous couvert d'anonymat.
Les frappes, qui ont ciblé les transformateurs de la station électrique d'Al-Muqrin à Atbara, dans l'Etat du Nil, dans l'est du pays, "ont également fait deux morts", a indiqué un responsable de la centrale, attribuant lui aussi cette attaque aux paramilitaires des Forces de soutien rapide (FSR), en guerre depuis avril 2023 contre l'armée régulière.
Les victimes sont deux secouristes tués par une deuxième frappe de drone alors qu'ils tentaient d'éteindre l'incendie provoqué par la première, selon cette source.
Le gouvernement de l'Etat du Nil a confirmé leur mort, accusant "des milices qui n'ont aucun respect pour la vie humaine".
L'ONG Emergency Lawyers, qui documente les atrocités du conflit, a fait état de frappes ayant touché des habitations civiles, et rapporté "la mort d'une fillette, quatre blessés (...) et un incendie dans l'une des maisons endommagées."
- Vastes coupures de courant -
L'attaque "a conduit à l'interruption de l'approvisionnement en électricité dans plusieurs Etats", a précisé la compagnie d'électricité nationale.
"Depuis deux heures du matin, nous n'avons plus d'électricité", a déclaré à l'AFP Abdel Rahim Al-Amin, fonctionnaire à Port-Soudan. "Nous espérons qu'elle reviendra rapidement."
La station d'Al-Muqrin est un noeud stratégique du réseau électrique soudanais, recevant l'électricité produite par le barrage de Merowe, la plus grande source d'énergie hydroélectrique du pays, avant sa redistribution vers plusieurs régions.
Des témoins ont indiqué que vers 02H00, les forces de l'armée régulière avaient activé leur défense antiaérienne, rapportant avoir vu des flammes et de la fumée s'élever au-dessus d'Atbara.
"Depuis deux heures du matin, l'électricité est coupée et nous craignons que les dégâts soient importants et qu'il faille du temps pour réparer", a déclaré Ahmed Al-Bashir, un habitant de la ville.
Les coupures d'électricité se sont étendues à plusieurs Etats, notamment ceux du Nil et de la mer Rouge, où se trouve Port-Soudan, siège provisoire du gouvernement pro-armée, selon des témoins.
La capitale Khartoum a également été touchée avant que le courant soit raccordé en partie à un nouveau réseau.
Ces derniers mois, les FSR ont visé plusieurs fois des infrastructures militaires et civiles, provoquant des coupures de courant et affectant des millions de personnes.
- Plus de 1.000 civils tués -
Alors qu'aucune trêve ne se dessine, le général Abdel Fattah al-Burhane, chef de l'armée et dirigeant de facto du pays, est attendu jeudi au Caire "afin d'examiner les moyens de régler la crise soudanaise", a indiqué la présidence égyptienne.
Depuis la reprise de Khartoum par l'armée en mars, les FSR avaient concentré leurs opérations au Darfour, dans l'ouest, où elles sont accusées de nombreuses exactions et atrocités, selon des ONG et des témoignages de rescapés.
En avril, plus de 1.000 civils ont été tués dans le camp de déplacés de Zamzam dans le Darfour-Nord, lors d'une attaque des paramilitaires, a indiqué jeudi le Haut-Commissariat aux droits de l'homme de l'ONU.
Fin octobre, la ville d'El-Facher, dernier bastion de l'armée dans le Darfour, est tombée aux mains des FSR, qui dominent désormais un tiers du territoire soudanais.
Depuis, les violences se sont déplacées vers la région voisine du Kordofan, dans le sud, où plus de 50.000 civils ont été déplacés, selon l'Organisation internationale pour les migrations (OIM).
La capitale du Kordofan-Sud, Kadougli, déclarée en état de famine par l'ONU, ainsi que la ville voisine de Dilling, classée comme "à risque", sont assiégées par les FSR depuis 18 mois.
La guerre a fait plusieurs dizaines de milliers de morts, des millions de déplacés et provoqué ce que l'ONU décrit comme "la pire crise humanitaire au monde".