Trump et la science : une trentaine de chercheurs quittent les États-Unis pour la France

  • Connaissance des Énergies avec AFP
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Donald Trump

La France a été choisie à ce stade par plus d'une trentaine de chercheurs qui préfèrent y poursuivre leurs travaux plutôt qu'aux Etats-Unis, où l'administration Trump a multiplié les attaques contre les scientifiques.

L'exemple du chercheur Italien Matthias Preindl

Pour le chercheur italien Matthias Preindl, c'était le bon moment, "oui", professionnellement et personnellement, de traverser l'Atlantique pour rejoindre à CentraleSupélec. Il vient tout juste d'arriver dans l'établissement situé au sud de Paris, après treize années de recherches au sein de prestigieuses universités américaines.

Ce scientifique de 38 ans est un spécialiste en "conversion d'énergie et électrification des systèmes de transport". "C'est un domaine en lien avec le changement climatique", glisse-t-il. Un domaine qualifié de "plus grande arnaque jamais menée contre le monde" par le président Trump lui-même, en septembre devant l'ONU. Le président américain a par ailleurs sabré à coups de millions de dollars dans les financements publics et chapeauté des licenciements massifs de scientifiques dans les organes fédéraux.

Matthias Preindl a passé ces dix dernières années au sein de l'Université Columbia à New York, après avoir été chercheur à Berkeley en Californie, après avoir également travaillé au Canada, en Suisse et au Danemark. Il préfère toutefois rester pudique sur les raisons profondes qui l'ont poussé à quitter les Etats-Unis, où les prises de position de l'administration Trump sur les travaux scientifiques font débat.

"Ce n'est pas tant que j'ai quitté les États-Unis mais, personnellement, j'ai constaté certains changements dans le financement de la recherche. L'intelligence artificielle suscite beaucoup d'intérêt", explique-t-il.

« Grand besoin de recherche »

"Dans mon domaine, il y a de nouveaux défis, de nouvelles questions. Nous assistons actuellement à l'émergence de centres de données qui ont des besoins énergétiques de l'ordre du téraoctet, soit l'équivalent d'une centrale nucléaire. Si nous voulons faire cela de manière durable, il y a en fait un grand besoin de recherche", explique-t-il. Alors, la France, et l'école CentraleSupélec précisément lui ont paru un meilleur terrain de jeu pour poursuivre ses recherches.

L'Italien, qui possède également la nationalité américaine, est arrivé en France "il y a quelques semaines, au début de l'automne", dans un pays où sa compagne, "professeure de droit, enseigne depuis une vingtaine d'années". Mais il a débuté à CentraleSupélec il y a "deux jours", seulement. Le processus a été long, "mais la décision finale rapide".

Il s'exprime en anglais, ne parle que quelques mots usuels de français, mais a spécifiquement souhaité rejoindre la grande école d'ingénieurs, adossée à la prestigieuse Université Paris-Saclay, pour continuer sa carrière.

"D'une manière générale, la recherche est un environnement dynamique, et les domaines d'intérêt évoluent donc au fil du temps. Tous les professeurs et chercheurs le savent: nous nous concentrons et nous spécialisons dans des domaines spécifiques, mais les priorités et les axes de recherche des organismes de recherche changent avec le temps", préfère-t-il souligner, diplomate.

Séduire et attirer les chercheurs

Depuis le retour au pouvoir de Donald Trump, de nombreux pays, dont la France, ont mis en place des systèmes visant à attirer ces chercheurs souhaitant quitter les États-Unis. Choose France for Science, Choose Europe for Science, Safe place for Science (qui concerne spécifiquement CentraleSupélec): autant d'initiatives qui visent à séduire ces scientifiques en quête d'un autre environnement de travail.

Le ministère de la Recherche a annoncé la semaine passée que 33 scientifiques travaillant aux États-Unis avaient d'ores et déjà choisi la France. Ils sont deux désormais sur le campus de CentraleSupélec, alors que deux autres sont actuellement en discussions, selon l'école.

"Au total nous avons reçu 54 candidatures, dont sept que nous avons retenues, venant de Berkeley, de Georgia Tech et de Columbia", précise Romain Soubeyran, directeur de CentraleSupélec.

Pour Matthias Preindl, le sujet porte surtout sur le fait de pouvoir travailler en bonne collaboration avec tout le monde. "Il y a eu un certain changement d'orientation et le monde universitaire cherche actuellement des moyens de s'adapter afin de poursuivre les collaborations et les échanges internationaux d'idées et de personnes", confie le chercheur, qui va garder le contact avec certains de ses anciens étudiants restés aux États-Unis.

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