Le solaire décentralisé à l'assaut des villes africaines

  • Source : Ifri

Le taux d’électrification(1) n’est « pas toujours un bon indicateur pour juger de l’accès réel à l’électricité », rappellent Hugo Le Picard et Matthieu Toulemont(2) dans l'étude ci-après publiée le 18 janvier par le Centre Énergie & Climat de l'Ifri. La fiabilité de l'approvisionnement électrique doit également être prise en considération : au Nigéria, le taux de connexion au réseau électrique atteint par exemple près de 83,9% dans les zones urbaines mais « celui-ci ne fonctionne que 50% du temps ».

Des systèmes décentralisés de production électrique (générateurs diesels ou panneaux solaires), dédiés à l'origine aux zones rurales, se développent dans les villes d'Afrique subsaharienne. L’analyse de millions d’images satellite(3) a permis d'estimer les capacités solaires décentralisées installées dans 14 grandes villes d’Afrique subsaharienne(4)(5). Ces informations ont été croisées avec une base de données d'Afrobarometer pour expliquer les « déterminants socio-économiques qui expliquent le développement du marché des systèmes solaires décentralisés dans les zones urbaines de la région »(6).

Hugo Le Picard et Matthieu Toulemont montrent « que l’autonomisation progressive des consommateurs vis-à-vis du réseau est une tendance de fond et qu’elle ne peut être contrée simplement en améliorant la gestion et la fiabilité de l’approvisionnement électrique » en Afrique subsaharienne(7).

Lire l'étude :
Le solaire décentralisé à l'assaut des villes africaines

Sources / Notes

  1. En 2020, le nombre de personnes n’ayant pas accès à l’électricité en Afrique subsaharienne « est reparti à la hausse en 2020 du fait de la crise du Covid-19 », souligne les deux auteurs.
  2. Hugo Le Picard est chercheur au Centre Énergie & Climat de l'Ifri et spécialiste des questions de pauvreté énergétique, d’accès à l’électricité et de financement d’infrastructures électriques en Afrique subsaharienne. Matthieu Toulemont est Senior Machine Learning Engineer chez PhotoRoom.
  3. Collecte réalisée avec l'API Maps Static de Google.
  4. Accra au Ghana, Bamako au Mali, Le Cap en Afrique du Sud, Dakar au Sénégal, Harare au Zimbabwe, Ibadan et Lagos au Nigéria, Kampala en Ouganda, Khartoum au Soudan, Lusaka en Zambie, Nairobi au Kenya, Niamey au Niger, Ouagadougou au Burkina Faso et Windhoek en Namibie.
  5. Capacités installées entre 184 MW et 231 MW, soit « près de 10% de la capacité solaire installée dans la région (hors Afrique du Sud) ».
  6. « Le principal problème avec les données collectées à partir d’imagerie satellitaire est que le modèle ne peut pas différencier les panneaux solaires résidentiels d’une part et les panneaux solaires installés sur les installations commerciales d’autre part. Ceci peut par la suite introduire un biais dans l’analyse économétrique car les données socio-économiques de l’étude ne concernent que les enquêtes auprès des ménages résidentiels », précisent les auteurs.
  7. Les auteurs notent les effets positifs de cette autonomisation (progression du solaire par rapport aux générateurs diesels et baisse de la pollution, résilience des réseaux, moindre besoin d'investissements dans de nouvelles infrastructures, moins d'impayés pour les utilities, etc.) mais également un potentiel effet pervers pour les compagnies d'électricité africaines : « la perte partielle à court terme de leurs meilleurs clients (résidentiels mais aussi commerciaux ou petit industriels) porterait un coup sévère à leurs finances ».

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