Climat : les investissements mondiaux dans l'efficacité énergétique à leur plus haut niveau, et pourtant insuffisants

  • AFP
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Les investissements mondiaux dans l'efficacité énergétique vont atteindre un niveau record en 2023, mais ils devront encore tripler annuellement si le monde veut tenir sa trajectoire de neutralité carbone face aux déréglements climatiques, prévient l'Agence internationale de l'énergie (AIE) dans un rapport publié mercredi.

Le sujet de l'"efficacité" est tellement important mais aussi tellement sous-estimé que l'Agence, émanation de l'OCDE, réunit cette semaine à Versailles 700 décideurs, dont des PDG et plus de 30 ministres, de Chine, de l'UE ou encore d'Indonésie, pour lui donner un coup d'accélérateur.

Rénovation des bâtiments, transports publics, infrastructures destinées aux véhicules électriques... Ces investissements devraient atteindre 624 milliards de dollars cette année, selon le rapport. C'est 20% de plus par rapport à 2021.

L'efficacité dans l'usage de l'énergie (moins d'énergie consommée pour un même service rendu) est revenue à l'avant-scène l'an dernier avec la flambée des prix du gaz, du pétrole, de l'électricité, encore accentuée par la guerre en Ukraine.

Elle représente par exemple un quart des mesures de l'Inflation Reduction Act de l'administration américaine. Le Green Transformation Plan du Japon s'intéresse à l'efficacité dans les immeubles, le REPowerEU a rehaussé les objectifs de l'UE, l'Inde a adopté un projet de "conservation de l'énergie", le Chili une loi efficacité...

Du côté des équipements, les ventes de pompes à chaleur ont crû en 2022 de 10% mondialement (+40% en Europe), les véhicules électriques ont représenté 14% du total écoulé (18% attendu en 2023) et les technologies de gestion énergétique de la maison se développent, mais moins nettement.

Les normes progressent aussi, en place dans plus de 100 pays, a recensé l'AIE, qui cite l'Afrique du Sud où les nouvelles lampes devront être équipées en LED.

Résultat, l'efficacité de l'énergie a globalement augmenté de 2,2% l'an dernier, quatre fois le taux des deux années précédentes.

« Dix ans pour agir »

Et pourtant, tout cela ne suffit pas.

"Un élan fort pousse l'efficacité énergétique, et depuis un an et la crise mondiale de l'énergie, des mesures sont prises dans des pays représentant plus de 70% de la consommation énergétique globale", souligne le directeur de l'AIE, Fatih Birol. Mais "maintenant il faut passer à la vitesse supérieure, et doubler les progrès d'ici la fin de la décennie", prévient-il.

Doubler ces progrès et donc les relever à 4% par an permettrait de réduire d'un tiers d'ici à 2030 la demande mondiale d'énergie et les émissions de CO2 du secteur, conformément au scénario de neutralité carbone à l'horizon de 2050 destiné à protéger le monde des pires effets du réchauffement. Pour cela, les investissements devront tripler, à plus de 1 800 milliards de dollars annuels d'ici 2030.

Or, "quand on parle d'énergie propre, les États pensent encore souvent renouvelables, solaire, hydrogène... C'est important, mais il faudrait penser plus aussi à la manière dont on utilise l'énergie", souligne Brian Motherway, responsable Efficacité à l'AIE. D'où cette 8e conférence annuelle de l'AIE sur l'efficacité, à la fréquentation renforcée cette année.

L'Agence a notamment concocté pour les dirigeants une "boîte à outils", avec des exemples de mesures efficaces et de "paquets sectoriels" (la cuisson, le chauffage, la climatisation, les financements...).

"Une décennie pour agir", tel est aussi le titre du briefing à destination des ministres, qui insiste sur la nécessité d'agir dès à présent pour éviter de développer de nouvelles infrastructures énergétiques inutiles.

Ces progrès seraient également synonymes de bénéfices sociétaux notamment dans les pays en développement, fait valoir l'AIE, une énergie plus efficace étant susceptible de bénéficier à un plus grand nombre d'usagers.

Quelque 625 millions de personnes dans le monde restent aujourd'hui sans accès à l'électricité, selon un bilan publié mardi par l'AIE, l'ONU et la Banque mondiale. Et environ 2,3 milliards d'humains restent dépendants pour faire la cuisine de combustibles nocifs.

Commentaires

Albatros

C'est comme le communisme, si ça ne marche pas c'est parce qu'il n'y en a jamais assez...

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