Réforme de la sûreté nucléaire : un appel aux parlementaires à être « vigilants »

  • AFP
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Le projet gouvernemental de réforme de la sûreté nucléaire porte des "risques de dégradation" de la compétence et de l'expertise dans la sûreté, mettent en garde des patrons de syndicats et d'anciens présidents de l'Office parlementaire des choix scientifiques, dans une tribune appelant le Parlement "à la vigilance et à la responsabilité".

Un projet de loi est en préparation, visant à fondre l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN), l'expert du secteur qui donne des avis, dans l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN), qui décide du sort des centrales en s'appuyant notamment sur ces avis.

"S'il est légitime de questionner l'organisation de la sécurité nucléaire, comme cela a déjà été fait dans le passé, les propositions de réforme ne doivent pas être examinées au regard d'arguments simplistes (+on va créer la seconde plus grande autorité de sûreté nucléaire au monde+)", s'alarment dans cette tribune parue jeudi dans Le Monde trois ex-présidents de l'OPECST, le mathématicien Cédric Villani, ex-député La République en marche, Claude Birraux, ex-député UMP, et Jean-Yves Le Déaut, ex-PS.

Sont aussi signataires la secrétaire générale de la CGT Sophie Binet, le président de la CFE-CGC François Hommeril, la secrétaire générale de la CFDT Marylise Léon. S'y ajoute le président de l'Institut pour la Maîtrise des Risques (IMdR) Jacques Repussard, ancien directeur général de l'IRSN.

S'adressant aux parlementaires, le texte "alerte sur les risques de dégradation que le projet fait peser sur la compétence de l'IRSN".

"Il y a tout lieu de craindre que cette +fabrique d'expertise+ assurée par l'IRSN ne soit pas déplaçable vers l'ASN, organisme à vocation essentiellement administrative du fait de son statut, sa culture et ses modes de recrutement. De nombreux départs de personnels sont à craindre, avec à la clé un affaiblissement du système d'expertise qui surviendra d'autant plus rapidement que la transition sera émaillée de difficultés juridiques et statutaires", estiment les signataires.

"À court terme cet affaiblissement risque de perturber sérieusement le plan de relance de la production électronucléaire. A moyen terme, le système évoluera insensiblement vers une expertise de +conformité réglementaire+, au détriment d'une véritable +expertise scientifique+. Or s'agissant du risque nucléaire, la conformité à la réglementation ne suffit pas", estiment-ils.

La tribune appelle "à veiller à ce que l'organisation maintienne une séparation claire entre expertise et décision, et un lien fort entre expertise et recherche". Elle doit aussi "favoriser un dialogue permanent avec la société civile", ajoute le texte.

Commentaires

studer

Bizarre de constater comment des personnalités aussi brillantes en apparence tombent dans des raisonnements aussi obtus.
Car la raison de cette fusion est simple : l'IRSN, composé d'experts (dotés d'un statut intéressant au passage) ne se contente pas de conseiller l'ASN. Il émet publiquement des avis AVANT que l'ASN ne publie sa décision, ce qui s'appelle couper l'herbe sous les pieds et faire de l'abus de pouvoir, ce qui est illégal.
En mettant l'IRSN sous l'autorité hiérarchique de l'ASN sans modifier sa mission, les experts pourront continuer à produire leurs analyses, mais devront laisser l'ASN prendre ses décisions sans la pression d'experts qui se servent de l'opinion publique (et des antinucléaires) pour obliger l'ASN à des décisions inflationnistes. Or, comme "trop d'impôt tue l'impôt", "trop de sûreté tue la sûreté, les difficultés rencontrées pour réaliser l'EPR en témoignent.

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