Fuite de gaz en mer du Nord : état des lieux

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Fuite de gaz Elgin

Vision aérienne de la plateforme Elgin (©Total)

Dimanche dernier, une fuite de gaz a été découverte sur la plateforme du champ gazier d’Elgin, à 240 km à l’est d’Aberdeen (Ecosse). Etat des lieux de cet incident important, suite à la première conférence de presse de l’opérateur qui s’est tenue ce matin.

Fuite de gaz sur le champ d’Elgin : les faits

Le réservoir du gisement d’Elgin, en mer du Nord, se trouve à près de 5 500 m sous le plancher océanique, lui-même situé à 93 m de profondeur. Il permet à Total, opérateur possédant  une participation de 46% dans la production de ce champ, de produire jusqu’à 5,5 millions de m3 de gaz et 9 000 tonnes de condensats légers par jour.

Dimanche dernier, une fuite de gaz est découverte sur ce champ dit « HP-HT » (à Haute Pression et Haute Température).  S’en suit un plan d’urgence, prévoyant l’évacuation des 238 salariés du site et la mise en place d’une zone d’exclusion maritime (de près de 3,7 km autour de la plateforme) et aérienne (de 5,5 km). L’alimentation électrique de la plateforme est coupée.

La fuite est localisée hier au niveau d’un puits désaffecté (bouché il y a un an), à 4 000 mètres de profondeur. La torchère(1) continue actuellement de brûler le gaz résiduel resté dans la plateforme après son arrêt. Bien que la flamme se soit affaiblie au cours de la semaine, c’est le risque d’une explosion de gaz naturel au contact de cette flamme qui suscite les principales craintes. Jusqu’ici, la direction du vent permet d’écarter « tout risque immédiat » d’explosion selon Total.

Perspectives et conséquences financières pour Total

Reste à colmater la fuite de gaz. Total a présenté aujourd’hui ses deux actions lancées en parallèle :

  • la mise en place d’une base flottante pour injecter des boues à haute densité si les conditions de sécurité permettent d’approcher de la plateforme ;
  • le forage de deux puits de dérivation pour soulager la pression du gaz et permettre l’injection de boues pour sceller le puits.

De nombreuses incertitudes pèsent sur la durée de l'arrêt de la production (au moins six mois en cas de mise en place d’un puits de secours). L’agence Moody’s estime que le groupe Total est privé d’environ 1,5 million de $ de résultat opérationnel net par jour(2).

La crainte d’une marée noire est exclue par les analystes, les condensats rejetées en plus du gaz étant des liquides très légers qui s’évaporent ou se dispersent dans l’eau à la surface.

La mer du Nord, une zone dense en plateformes

Il existe plus de 15 000 plateformes dans le monde, dont plus de 450 en mer du Nord réparties entre la Grande-Bretagne, la Norvège, les Pays-Bas et le Danemark. Elles sont actuellement exploitées par Statoil (Norvège), Shell (Pays-Bas), BP (Royaume-Uni) ou encore Total. Certaines des plateformes exploitées ont la superficie d’un terrain de football (5 000 m²) et pèsent plusieurs dizaines de milliers de tonnes.

Les gouvernements européens ont décidé de développer l'exploitation des champs pétroliers et gazéifères de la mer du Nord après le premier choc pétrolier de 1973. Les normes de sécurité liées à la fabrication et l'installation de plateformes pétrolières ont été mises en place dans les années 1970-1980 et se sont renforcées suite à des accidents dont le plus grave en juillet 1988 a causé la mort de 167 personnes (explosion de la plateforme gazière de Piper Alpha).

La durée d’exploitation moyenne d’une plateforme est approximativement la même que celle d’un gisement pétrolier offshore, soit près d’une trentaine d’années. Les opérations de production ont débuté en 2001 sur les champs d’Elgin-Franklin. La fuite de gaz actuelle constitue « le plus gros incident pour Total en mer du Nord depuis au moins 10 ans » selon un porte-parole du groupe.

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