Qu'est-ce que « l'effacement » de l'électricité ?

Effacements d'électricité

RTE sollicite ses usagers pour limiter l'impact des pics de consommation électrique.

Les effacements d’électricité permettent de lisser la puissance appelée sur le réseau (en diminuant la demande lors des pics de consommation) et de contribuer ainsi à sa stabilité, tout en évitant le recours ponctuel à des unités de production « de pointe » coûteuses.

Des « opérateurs d’effacement » valorisent ces effacements sur les marchés de l’électricité : ils rémunèrent des consommateurs pour que ceux-ci acceptent de limiter ou d’arrêter leur consommation à certaines périodes. Ils peuvent revendre sur les marchés de gros l’électricité qui était initialement dédiée à ces consommateurs ayant accepté de s’effacer(1).

Au cours des deux dernières décennies, la France a déployé différents moyens de valoriser ces effacements (inclusion dans le mécanisme d'ajustement(2) grâce auquel RTE assure l'équilibrage du système électrique, vente directe sur les marchés de l’électricité via le mécanisme NEBEF(3), etc.). Et le ministère en charge de l'énergie a ajouté en 2018 un appel d'offres « effacement » parmi les mécanismes de soutien visant à rémunérer les effacements(4).

Définition

Lorsque la production électrique présente un risque d’insuffisance face à la demande, RTE peut demander aux consommateurs de diminuer volontairement leur consommation.

L’effacement de l’électricité désigne l’action temporaire de réduction de la consommation électrique par un industriel ou un particulier. Cela permet de maintenir un équilibre entre l’offre et la demande sur le réseau électrique par une meilleure répartition dans le temps de la consommation et non nécessairement à la réduction globale de cette dernière.

RTE souligne à ce titre qu'il ne faut pas confondre « maîtrise de l'énergie » (ensemble des actions d'économies d'énergie résultant de la sobriété énergétique ou de l'efficacité énergétique) et « effacement » (réduction de consommation volontaire et délimitée dans le temps).

Mention dans le Code de l'énergie

Les effacements sont définis par les articles L-271-1 à L-271-4 du Code de l'énergie(5).  Voilà ci-après la définition retenue par le législateur :

« Un effacement de consommation d'électricité se définit comme l'action visant à baisser temporairement, sur sollicitation ponctuelle envoyée à un ou plusieurs consommateurs finals par un opérateur d'effacement ou un fournisseur d'électricité, le niveau de soutirage effectif d'électricité sur les réseaux publics de transport ou de distribution d'électricité d'un ou de plusieurs sites de consommation, par rapport à un programme prévisionnel de consommation ou à une consommation estimée.

L'effacement peut avoir pour effet d'augmenter la consommation du site de consommation effacé avant ou après la période d'effacement. La part de consommation d'électricité effacée qui n'est pas compensée par ces effets et qui n'est pas couverte par de l'autoproduction est une économie d'énergie.

Des catégories d'effacements de consommation sont définies par arrêté du ministre chargé de l'énergie en fonction des caractéristiques techniques et économiques des effacements concernés ou du procédé au moyen duquel sont obtenus les effacements ».

Lissage de la consommation d'électricité

Grâce à des effacements, un gestionnaire de réseau peut ainsi lisser à court terme les pics de consommation électrique. Cela évite notamment d’activer ponctuellement des centrales de production coûteuses, souvent fortement émettrices de CO2, ou d’exposer le réseau à un risque de rupture de l’approvisionnement partiel (via des délestages : coupures ciblées).

La consommation électrique connaît des périodes de pointe (ex. : en hiver vers 19h et lors de périodes de grand froid). Pour y répondre, les centrales thermiques à flamme peuvent être rapidement démarrées. La production thermique utilisant du combustible fossile étant coûteuse et ayant un impact environnemental, RTE privilégie une réduction de la consommation par les usagers.

Types selon la capacité d'effacement

On distingue notamment les effacements « industriels » (gros consommateurs choisissant d’arrêter temporairement leur chaîne de production ou d’en adapter le fonctionnement pendant une période donnée) des effacements « diffus » (consommateurs tertiaires ou particuliers interrompant par exemple le fonctionnement de leurs appareils électriques).

Effacement industriel

Prévenu par un signal de RTE, un industriel peut « effacer » sa consommation en arrêtant les équipements électriques de ses usines ou en s'appuyant sur des groupes électrogènes.

La quantité d’électricité à économiser et la durée sont fixées par contrat qui permet de bénéficier d'un tarif bas auprès d'EDF et d’être rémunéré pour les économies effectuées.

Un marché de l’effacement (ou « mécanisme d’effacement ») est également développé à cette fin en complément du « mécanisme de capacité ».

Effacement électrique
Lorsqu'un consommateur « réalise un effacement », il accepte de réduire son appel de puissance sur le réseau électrique pour une période donnée. (©UFE)

Effacement diffus des particuliers

La consommation électrique des particuliers peut également être réduite grâce à un boitier intelligent installé chez eux. Lors d’un pic de consommation, le boitier peut interrompre pendant une dizaine de minutes le chauffage électrique et voire certains équipements électroménagers. Le client réduit ainsi sa consommation et allège sa facture d’électricité sans que ses usages en soient affectés.

Effacement par le biais de l'option tarifaire

Le principe des heures creuses et des jours de pointe des offres EJP et Tempo d'EDF reprennent le principe de l'effacement. Ces deux dernières, qui concernent plus d'un million de foyers, prévoient 22 jours « rouges » avec un prix du kWh très élevé. Le consommateur - prévenu la veille - peut s’organiser pour réduire ses consommations (et donc s’effacer partiellement).

Dispositifs de soutien à l'effacement

Le projet de 3e programmation pluriannuelle de l'énergie prévoit de « favoriser le développement des offres tarifaires valorisant la flexibilité des usages tout en protégeant au mieux le consommateur comme par exemple les offres à pointes mobiles (effacements indissociables de la fourniture (EIF)) et des tarifs horosaisonnalisés tout en encourageant le développement de nouveaux produits de marché »(6).

Appel d'offres effacement

Un appel d’offres effacement a été mis en place en 2018(7) : RTE a contractualisé chaque année des capacités d’effacement via cet appel d'offres entre 2018 et 2023. En 2024, la CRE a approuvé un nouveau dispositif de soutien via un appel d’offres ouvert aux « flexibilités décarbonées » (incluant les effacements et le stockage) pour la période de 2024 au premier trimestre 2026. 

Mécanisme « NEBEF »

Les effacements participent également, au même titre que les installations de production d’électricité, aux mécanismes de marché (mécanisme d’ajustement, réserves, mécanisme « NEBEF »). Le mécanisme de capacité, opérationnel depuis 2016 et autorisé jusqu’en 2026, « est actuellement en cours de refonte pour l’hiver 2026-2027 et devra soutenir le développement des nouvelles flexibilités requises pour la sécurité d’approvisionnement », précise le projet de 3e PPE(8).

Le mécanisme dit « NEBEF » (Notification d’Échanges de Blocs d’Effacement) permet entre autres de valoriser les effacements sur les marchés de l’électricité : un opérateur d’effacement peut vendre de gré à gré ou sur des bourses de l’énergie « des blocs d’électricité correspondant à la quantité d’électricité qui n’a pas été consommée ».

Prime d'effacement dans la « loi Brottes » de 2013

Dans le passé, la loi du 25 avril 2013 dite « loi Brottes »(9) prévoyait le versement d’une prime aux opérateurs d’effacement au titre des bénéfices pour la collectivité de ces effacements. L’arrêté ministériel prévoyait que la prime soit uniquement versée aux opérateurs pour des effacements provenant de petits consommateurs, souscrivant une puissance inférieure ou égale à 36 kVA (kilovoltampères). Cette prime était donc essentiellement dédiée à l’effacement résidentiel dit « diffus » dont elle est censée stimuler le développement. Voltalis est le principal opérateur d’effacement sur ce marché. L’Afieg (Association française indépendante de l’électricité et du gaz) a entre autres déploré cette restriction de la prime n’incluant pas les effacements tertiaires et industriels.

Financée via la contribution au service public de l'électricité (CSPE), cette prime avait été mise en place par le gouvernement en janvier 2015(10). Chaque opérateur d’effacement pouvait bénéficier de cette prime dans une limite d’un volume de 250 gigawattheures par an.

Le Gouvernement est ensuite revenu à des primes en capacités(11)

La question du report des consommations

Un effacement électrique peut, selon les cas, faire l’objet ou non d’un « report », c’est-à-dire d’un décalage dans le temps de la consommation effacée par les clients incités financièrement. Par exemple, l’effacement d’un ballon d’eau chaude ou d’une machine à laver est sujet à un effet report de 100% et aucune économie d’énergie n’est effectuée in fine dans ces cas.

En revanche, il est possible de constater dans d’autres situations des baisses de consommation sans effet report. Par exemple, si un ménage baisse ponctuellement son chauffage électrique, il ne va pas nécessairement surchauffer après un effacement. Des études sont actuellement réalisées par le gestionnaire de réseau RTE pour mieux mesurer l’effet report qui reste difficile à quantifier.

Mesurer la valeur réelle des avantages de l’effacement pour la collectivité est une opération délicate. Il est en particulier encore difficile d’évaluer « l’effet report », c’est-à-dire la proportion de la consommation « effacée » qui n'est pas réellement économisée mais uniquement différée d’une période (lors de l’effacement) à une autre (après l’effacement). Lorsque l’effet report est fort, cela signifie que les économies d’énergie sont faibles en définitive.

La CRE a estimé différentes valeurs de l’effacement en fonction du taux de report (allant de 0 à 100%). Le gouvernement a retenu par arrêté un niveau de 50% du taux de report. Cela signifie que l’on estime que la moitié de la consommation effacée durant une période donnée est finalement bien consommée, avec un décalage dans le temps.

Sur le même sujet