Afrique du Sud: manifestations nationales pour l'emploi, la faillite d'Eskom pointée du doigt

  • AFP
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Des milliers de personnes ont défilé mercredi dans les grandes villes d'Afrique du Sud à l'appel du principal syndicat du pays pour dénoncer le chômage et la politique économique du gouvernement, à trois mois des élections générales.

Pour la plupart revêtus des couleurs rouge du Congrès des syndicats sud-africains (Cosatu), les manifestants ont parcouru les rues de Durban (nord-est) et de Johannesburg pour exiger la fin du "massacre des emplois". "Nous voulons des emplois, rien que des emplois", a lancé la patronne de la Cosatu, Zingiswa Losi, en ouvrant à Durban la journée de grève nationale de son mouvement. "Nous ne pouvons plus parler de plans de licenciements ou de restructurations. Il y a aujourd'hui dans ce pays 9,3 millions de personnes à la recherche d'un travail", a-t-elle ajouté, "si nous voulons relancer l'économie, nous ne pourrons pas le faire autrement qu'en créant des emplois".

Première puissance industrielle du continent, l'Afrique du Sud ne s'est jamais remise de la crise financière mondiale de 2008. Son économie oscille entre des périodes de faible croissance - 1,3% anticipé par la Banque mondiale pour 2018 - et de récession technique et son chômage reste endémique avec un taux officiel qui tourne autour de 27%.

Ces derniers mois, de nombreuses entreprises, notamment minières, ont annoncé des plans de restructuration prévoyant des milliers de suppressions de postes. "Aujourd'hui, les enfants noirs font des études mais ne trouvent pas de travail", a déploré Gloria Sithole, une femme de ménage de 58 ans qui a défilé à Johannesburg.

Au pouvoir après la démission du très controversé président Jacob Zuma il y a un an, son successeur Cyril Ramaphosa a promis de relancer l'économie, notamment en incitant les groupes étrangers à investir dans le pays. Mais malgré plusieurs plans, notamment de grands travaux, ou de sommets de mobilisation, les résultats se font attendre.

« Du travail »

Publiées mardi, les dernières statistiques ont enregistré une très légère baisse du taux de chômage à 27,1% au dernier trimestre 2018, contre 27,5% au précédent. "L'économie sud-africaine ne peut plus se permettre de perdre des emplois", a estimé le secrétaire général adjoint du syndicat des employés de banque, Ben Venter, au milieu de pancartes où l'on pouvait lire: "Nous exigeons du travail" et "non aux privatisations".

Dans toutes les villes du pays, de nombreux manifestants en ont profité mercredi pour reprocher au gouvernement la faillite du groupe public d'électricité Eskom, contraint depuis dimanche à des coupures de courant massives. Victime de la mauvaise gestion, de la corruption et d'un manque de contrôle de l'Etat, Eskom symbolise à lui seul le bilan catastrophique de la présidence de Jacob Zuma (2009-2018).

Mercredi, le ministre des Entreprises publiques, Pravin Gordan, a reconnu que le groupe, plombé par une dette de 27 milliards d'euros, serait déclaré en cessation de paiement en avril faute d'une nouvelle aide de l'Etat. Le chef de l'Etat a annoncé la semaine dernière un plan de redressement d'Eskom qui passe notamment par sa séparation en trois entités distinctes (production, distribution, service).

La Cosatu et le Parti communiste sud-africain (SACP), bien qu'alliés historique du Congrès national africain (ANC) de M. Ramaphosa y sont résolument opposés. Ils défendent sa nationalisation afin de "faire passer sa priorité de la maximisation des profits à la satisfaction des besoins du peuple", selon le vice-secrétaire général du SACP Solly Mapaila.

Malgré ces divergences, la Cosatu n'entend pas lui tourner le dos aux élections du 8 mai. "Nous n'abandonnerons pas notre allié", a assuré l'un de ses dirigeants, Amos Monyela. "Nous appellerons nos membres à voter pour l'ANC mais nous nous opposerons toujours aux politiques qui affectent les travailleurs". Malgré ses difficultés, la plupart des analystes anticipent une large victoire de l'ANC aux prochaines élections.

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