Glencore : des actionnaires critiques obtiennent une demi-victoire

  • AFP
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Des actionnaires de Glencore ont obtenu une demi-victoire vendredi dans leur bras de fer avec le géant suisse des matières premières pour le forcer à débattre de sa stratégie dans le charbon, un reponsable clé du réchauffement climatique.

Malgré des critiques récurrentes d'investisseurs, Glencore défend bec et ongle ses mines de charbon à la différence de concurrents comme Anglo-American ou Rio Tinto qui s'en désengagent.

Le groupe basé à Baar, dans le canton suisse de Zoug, répète régulièrement vouloir gérer ses mines de manière responsable jusqu'à ce qu'elles arrivent à épuisement. L'an passé, il s'est toutefois renforcé dans le charbon en rachetant les parts qu'il ne détenait pas encore de la mine de Cerrejón en Colombie.

Pour l'assemblée générale annuelle du groupe, des actionnaires s'étaient mobilisés pour déposer une résolution afin d'exiger que le groupe donne à l'avenir des informations détaillées sur le charbon dans son rapport climatique.

Cette résolution avait été déposée par les organisations actionnariales australienne ACCR (Australasian Centre for Corporate Responsibility) et britannique ShareAction avec le soutien de grands investisseurs, dont les sociétés de gestion d'actifs britannique Legal & General Investment Management et HSBC Asset Management, la branche de gestion du géant bancaire britannique HSBC. La fondation Ethos, qui représente des caisses de retraite en Suisse, avait également appelé à voter Pour.

Elle n'a obtenu que 29,2% de voix favorables, ce qui n'en constitue pas moins un résultat significatif. Ces actionnaires savaient qu'il serait difficile d'atteindre la barre de 50% dans la mesure où les cadres de l'entreprise détiennent un part importante du capital.

L'ancien patron, Ivan Glasenberg, détient à lui seul 9,58% des droits de vote, selon le rapport annuel du groupe.

Mais ces actionnaires comptent sur une disposition du droit britannique, qui supposait que ce vote obtienne au moins 20% des voix, pour forcer le groupe à engager le dialogue avec eux. Glencore est coté à la Bourse de Londres et donc assujetti au droit britannique.

- "Impossible à ignorer" -

"Ce résultat est une indication claire que les investisseurs institutionnels sont de plus en plus attentifs aux risques liés au charbon thermique", a déclaré l'organisation ACCR dans un communiqué, estimant qu'il est "impossible pour Glencore d'ignorer" ce vote dans la mesure où il est allé au-delà de 20%.

Bien que cette résolution ait été rejetée, Glencore a dit dans un communiqué vouloir rester engagé avec ses actionnaires "afin de s'assurer que leurs opinions sont pleinement comprises".

Vendredi, les actionnaires ont été accueillis par une vingtaine de militants de l'ONG Yukpa Solidarity Network qui étaient venus protester contre les conséquences des mines de Glencore en Colombie devant le Théâtre-casino de Zoug où se tenait l'assemblée générale.

"Glencore continue d'étendre ses mines de charbon sur des territoires indigènes, c'est complétement insensé dans une période d'escalade du changement climatique", a déclaré Lotte Jager, une militante âgée de 23 ans, à l'AFP.

Mais ces critiques trouvent un écho de plus en plus retentissant chez les investisseurs qui ne veulent plus de charbon dans leurs portefeuilles de placements.

En 2020, le fonds souverain de Norvège, le plus gros investisseur au monde, avait placé Glencore sur sa liste d'exclusion. Et en 2021, le fonds activiste BlueBell Capital avait pris une participation pour pousser Glencore à séparer le charbon du reste de ses activités, estimant que cette matière première empêche une partie des investisseurs de s'intéresser au groupe, même s'il détient aussi des métaux importants pour la transition énergétique comme le cuivre ou le cobalt.

Selon Naomi Hogan, responsable de projet chez ACCR, les investisseurs ont besoin de davantage d'informations sur la stratégie du groupe dans le charbon pour gérer les risques dans leurs portefeuilles.

"Nous voyons une déconnexion entre ce que l'entreprise [...] écrit dans son rapport climatique et ce qu'elle fait en Australie", a-t-elle affirmé à l'AFP, soulignant que le groupe continue d'y "développer et étendre ses mines de charbon".

En avril, Glencore a fait une offre complexe et controversée au groupe canadien Teck Resources, rejetée à deux reprises, que certains analystes ont interprétée comme une inflexion de sa stratégie dans le charbon.

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